Les Tables d'Olaria
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilPortailRechercherDernières imagesS'enregistrerConnexion
-20%
Le deal à ne pas rater :
-20% Récupérateur à eau mural 300 litres (Anthracite)
79 € 99 €
Voir le deal

 

 Mademoiselle, du poison s'il vous plait !

Aller en bas 
2 participants
AuteurMessage
Lell Llureyin
Ilédor
Ilédor
Lell Llureyin


Nombre de messages : 1173
Age : 33
Date d'inscription : 28/05/2010

.:: Le Carnet ::.
Âge du Personnage: 20 ans
Profession: Apprentie guérisseuse
Positionnement : Dissidente
Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty
MessageSujet: Mademoiselle, du poison s'il vous plait !   Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! EmptyMer 14 Sep - 17:17

La vie suivait son cours dans les rues commerçantes. Lavée par la pluie de la nuit, l’endroit respirait la fraîcheur et la propreté, chose bien étonnante dans une Cité en siège. La journée particulièrement belle poussait les gens à sortir de chez eux, et il était bien naturel que leurs pas les mènent jusqu’au cœur du quartier bourgeois. Oh certes, il y avait bien moins à vendre qu’en temps ordinaire, mais de toute façon, on n’avait guère à dépenser. A vrai dire, les marchands s’obstinaient à sortir leur marchandise pour conserver un semblant de normalité.
Cette absence de normalité plutôt. Guerre, siège et meurtre. Voilà ce qui faisait le quotidien d’Edor Adeï. Ce serait un miracle que la Cité ne devienne pas totalement folle. Alors, pour faire comme si, on s’habillait, on quittait les maisons, et on allait flâner au milieu des étals des rues commerçantes.
Malgré cet état de fait, elles réussissaient à conserver un certain prestige. Les articles étaient les mêmes que deux mois auparavant, et le stock, sauf si l’on avait ses contacts au marché noir, diminuait peu à peu sans se renouveler, mais l’habitude et aussi le besoin rendaient service aux commerçants.

Pour l’heure, Lell se trouvait parmi la foule bigarrée flânant d’un pas tranquille bras dessus bras dessous dans la rue, s’intéressant parfois de plus près à un quelconque étal avant de poursuivre son chemin, tout cela dans le but de se promener.
Pourtant, Lell ne flânait pas. Du moins, pas tout à fait. Elle profitait peut être un peu de l’occasion pour repérer quelques articles dont elle aurait besoin pour plus tard, mais sa principale motivation restait sa couverture. Elle avait rendez-vous ici avec Eléni, dissidente très impliquée qu’elle savait être l’un des bras de l’Al’Faret. Seulement voilà, bien qu’elle connaisse Eléni de nom et qu’elle lui ait été présentée une fois, peu après son recrutement par Sipik, la jeune guérisseuse se trouvait dans l’incapacité de pouvoir la reconnaître dans la foule, quand bien même elles se seraient trouvées l’une en face de l’autre. C’était principalement pour cette raison qu’elle évoluait en cercles autour du point de rendez-vous, espérant que la dissidente se souviendrait suffisamment d’elle pour la trouver.

Cette incapacité à repérer Eléni n’était en aucun due à un manque de mémoire. Cette femme avait cela de particulier qu’on ne savait jamais sous quel visage elle allait apparaître au grand jour. Chaque personnage était une véritable métamorphose qui ne laissait aucun soupçon quant à sa crédibilité. Personne ne pouvait deviner qu’une seule personne se cachait sous ces multiples traits. Du moins, si ce qu’on lui avait raconté était vrai. Mais tous ceux qui avaient côtoyé Eléni s’accordaient à cette version là.
D’ailleurs, Lell gardait le souvenir d’une femme d’âge mûr, à l’air sévère et très propre. Les rares dissidents qu’elle avait rencontré lui avait évoqué une vieille femme souffreteuse ou encore une matrone rigide voire même, parfois, un jeune homme. Eléni était un mystère, un mystère qu’elle ne tarderait plus à rencontrer pour la seconde fois.

Cette rencontre avec l’une des têtes du mouvement rentrait bien évidemment dans le cadre de la dissidence.
Deux semaines auparavant, par le biais d’un message, on lui avait demandé de réaliser un poison rapide à tuer et si possible, de pouvoir le dissimuler dans la bouche. Pour la poison, Lell n’avait eu aucun problème à fournir ce qui correspondait à la demande : un produit mortel en quelques secondes, et surtout sans trop de douleur.
Cependant, malgré tous ses efforts et son travail de recherche, elle n’avait pas été en mesure de trouver une matière ou une substance pouvant conserver le poison de manière imperméable. Elle avait dû se résoudre à utiliser une méthode plus simple, quoique peut être moins discrète, mais en tout cas beaucoup moins dangereuse pour l’utilisateur du produit. Disons qu’il ne risquerait pas de décéder sans le vouloir…
Tout cela lui avait donc pris un peu plus de temps que prévu, mais elle tenait une solution prête. Ne restait plus qu’à savoir si celle-ci plairait à Eléni.

Résistant à l’envie de scruter la foule du regard, Lell se contraignait à marcher calmement et à s’attarder à chaque étal. Sa main restait fermement serrée sur la lanière de sa sacoche dans laquelle, outre diverses fioles et plantes, se trouvait, bien à part, sa commande. Il n’était pas question de se la voir arrachée, pas avec son contenu.
Un marchand de fripes retint son attention. Pourquoi pas après tout ? Plusieurs femmes s’y trouvaient déjà et fouillaient dans le tas à la recherche de l’étoffe de leur rêve. Lell se joignit au groupe, cela l’occuperait un petit moment au même endroit. L’heure du rendez-vous devait d’ailleurs être arrivée, elle pouvait s’attendre à tout moment à rencontrer Eléni.
La fouille méthodique à laquelle elle se livrait parmi les tissus de couleurs n’exigeait pas toute son attention, aussi sentit-elle la présence qui s’insinua juste derrière son épaule. Résistant à son envie irrésistible de lui faire face, elle se contenta de continuer à agiter les mains dans les étoffes, avec l’espoir que s’il s’agissait d’un simple client, celui-ci s’éloignerait.
La présence persista. Elle se trouvait bête de se faire violence pour ne pas jeter un simple coup d’œil par-dessus son épaule, mais la personne qui se trouvait derrière elle l’effrayait et lui nouait l’estomac. C’était sans doute ridicule, mais c’était ainsi.
Prenant finalement sur elle, Lell se résolut au moins à prononcer la phrase de reconnaissance.

« Je suis résolue à tout changer pour le meilleur… » Après tout, si ce n’était pas la bonne personne, elle partirait peut être en la prenant pour une folle à marmonner toute seule. Peut être…
Revenir en haut Aller en bas
Charis Sandragil
Ilédor
Ilédor
Charis Sandragil


Nombre de messages : 281
Age : 33
Date d'inscription : 01/04/2010

.:: Le Carnet ::.
Âge du Personnage: 34 ans
Profession: Informatrice
Positionnement : Régulière (en surface)
Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty
MessageSujet: Re: Mademoiselle, du poison s'il vous plait !   Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! EmptyJeu 22 Sep - 15:40

Éléni marchait d’un pas qu’elle ralentissait délibérément. Elle avait le cœur un peu lourd, comme si un orage soudain allait survenir, éclater et noyer tous les siens dans un long et interminable déluge. Il n’y avait pourtant rien de si grave en cours, seulement ses propres pensées ressassant du noir. Peut-être voulait-elle retarder, inconsciemment, le moment où débuterait vraiment sa mission.

Suite à une discussion avec Elandor, Éléni avait accepté de continuer à semer le trouble dans l’esprit de Beltxior. Ils touchaient là à son code d’honneur le plus intime, le plus personnel. Qu’Ajowan parte affaiblir Beltxior n’avait rien d’exceptionnel. Par contre qu’elle, Éléni, Révolutionnaire à temps partiel, le fasse, c’était bien plus ambigu. La jeune femme n’aimait pas la tournure que prenaient certaines décisions d’Elandor. Oui, les Révolutionnaires ne devaient pas l’emporter face à la Dissidence, mais ils ne devaient pas non plus être balayés. Pour le moment, Éléni trouvait son compte en soutenant les deux mouvements, mais elle savait que le moment du choix approchait. Si elle avait toujours considéré la Révolution et la Dissidence comme complémentaires, elle n’avait jamais pensé un jour en venir à de tels cas de conscience. Sabotait-elle son propre travail en acceptant la mission d’Elandor et en induisant Beltxior en erreur ? Non. Parce qu’elle ne se retournerait pas contre ses propres intérêts. La seule explication qui lui convenait était la suivante : elle voulait que la Révolution gagne en influence, mais certainement pas les pouilleux, qui n’avaient rien à faire en Edor Adeï. Or, Beltxior avait reconnu la suprématie – elle avait versé des larmes de rage en l’apprenant – d’un certain Arngrim, Olaril très aimé des siens. Et elle refusait de continuer à soutenir une Révolution avec un Arngrim, tout sympathique soit-il, à sa tête.

Éléni avait commencé par faire des recherches poussées sur l’Olaril, avant de constater avec dépit qu’il n’était pas aussi facilement attaquable que Lis Diantha. Oh, il y avait bien une sombre histoire de femme abandonnée, mais les Olarils eux-mêmes semblaient considérer qu’il n’avait pas eu le choix, et qu’il en avait tellement souffert qu’il était malsain de revenir avec une telle histoire. Éléni avait tendance à le juger férocement, cet homme seul parce qu’il l’avait bien voulu, mais elle avait parfaitement compris qu’une campagne de diffamation était impossible. La seule solution pour l’amener à se faire évincer, c’était de convaincre Beltxior qu’il devait reprendre la Révolution en main. Et pour convaincre Beltxior du bien-fondé de cette assertion, il y avait… ce message, qu’elle tenait roulé au creux de sa poche. Si l’Olarii posait les yeux dessus, la graine de doute semée par Ajowan continuerait de germer jusqu’à s’épanouir. Le travail de sape était lent, et aux limites de la morale d’Éléni.

La mission ne se voulait pas inoffensive, et en contrepartie de l’avantage qu’elle leur conférait, Éléni mettait sa propre vie en jeu. Elle savait que si Beltxior la perçait à jour, il n’y aurait pas de quartiers. Encore moins de grâce. La jeune femme en était consciente, mais ça ne la faisait pas reculer. Sa Volonté n’était pas de celles qui s’effrayaient facilement. Toutefois, oui, Éléni avait peur. Elle avait déjà vécu la certitude de mourir bientôt, et refusait de devoir se soumettre à la question. Elle avait retenu la leçon : plus personne ne la capturerait jamais vivante. C’était ainsi qu’elle avait eu l’idée de demander de l’aide à une autre Dissidente, Belladone. La jeune fille était la protégée de Sipik, mais bien qu’elle connaisse son nom et son histoire, Éléni n’avait jamais vraiment été en contact avec elle. Oh, elle l’avait bien rencontrée quelques fois, mais jamais sérieusement avant qu’elle n’ait besoin de ses capacités en… poison. Comme l’indiquait son nom de code, Lell maîtrisait les poudres, plantes et autres toxines, ainsi qu’elle l’avait brillamment prouvé lors de l’empoisonnement du camp Révolutionnaire. Éléni lui avait donc demandé de lui concocter quelque chose de discret, mais qui la tue de façon rapide et efficace, si possible indolore.

Et voilà qu’elle se retrouvait au lieu de rendez-vous, presque surprise d’être arrivée, à peine prête à recevoir un violent poison. Elle s’imaginait mille manières de mourir différentes, mais elle ne savait pas vraiment ce que Belladone lui avait concocté. Paradoxalement, elle était curieuse de voir comment la Dissidente travaillait. Même si elle espérait ne jamais mesurer par elle-même la qualité de son travail…

Pour l’heure, il fallait l’aborder. Éléni avait revêtu l’allure d’une femme enceinte, plutôt jeune, aux cheveux noirs et à la bouche rieuse. Des paupières lourdes, un nez trop crochu pour être beau, des yeux trop petits pour voir vraiment clair, quelques années de plus que Charis Arcarian. Porter ce genre de leurres sur le ventre la faisait toujours rire, et la rendait presque rêveuse : le jour où elle attendrait un enfant, elle devrait renoncer à Éléni pendant neuf longs mois. Et c’était hors de question. L’herbe donnée par Ajowan reposait tranquillement dans son armoire, prête à l’usage. Pour le jour où Charis Arcarian perdrait le dernier vestige de son innocence.

En avançant d’une démarche un peu chaloupée, celle des femmes qui doivent apprendre à équilibrer différemment leur corps en attendant la naissance, Éléni se porta à la hauteur de la jeune fille et l’entendit murmurer leur phrase de reconnaissance. Elle se pencha à son tour près des articles qui intéressaient Belladone et répondit sur le même ton :

- Dis-moi qui tu fréquentes, et je te dirai qui tu es.

Elle adressa un léger sourire à la Dissidente et s’éloigna de l’étal, espérant que Belladone la suivrait. Quand elles se furent bien fondues dans la foule, elle reprit :

- Merci d’être venue. As-tu ce que je t’ai demandé ? Comment m’en servir ?

Éléni se tourna vers Belladone, curieuse de découvrir ce qu’elle lui réservait.
Revenir en haut Aller en bas
Lell Llureyin
Ilédor
Ilédor
Lell Llureyin


Nombre de messages : 1173
Age : 33
Date d'inscription : 28/05/2010

.:: Le Carnet ::.
Âge du Personnage: 20 ans
Profession: Apprentie guérisseuse
Positionnement : Dissidente
Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty
MessageSujet: Re: Mademoiselle, du poison s'il vous plait !   Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! EmptyJeu 6 Oct - 8:37

Le déguisement était parfait. Jamais Lell n’aurait pu soupçonner que la femme enceinte qui se tenait devant elle était la même personne brièvement rencontrée auparavant dans cette taverne. Aucun point commun ne pouvait rapprocher ses deux déguisements si ce n’est qu’il s’agissait de deux femmes. Cette prouesse était réellement incroyable, la dissidence recelait bien des surprises, même pour ceux qui en faisaient partie…
N’adressant qu’un simple signe de tête à Eleni, elle détourna son regard de la jeune femme pour le reporter sur l’étal, faisant du même coup une place à la nouvelle arrivante. Son malaise était perceptible. Cette rencontre en plein jour étant une première pour l’empoisonneuse, et elle ne savait pas trop comment s’y prendre.

« J’ai effectivement ce que tu m’as demandé, mais pas sous la forme que tu souhaitais. Je n’ai rien trouvé pour que cela tienne bouche… » Curieuse façon de parler d’une question pourtant peu anodine. Elles évoquaient la mort dans un murmure – il s’agissait aussi de ne pas se faire repérer – en plein cœur des rues commerçantes bouillonnantes de vie.
Lell sortit de son sac le sachet enveloppant les deux boulettes contenant le poison qu’elle tendit ensuite discrètement à Eleni. « Tu trouveras là-dedans deux produits finis… pour le cas où. » Il valait toujours mieux avoir une seconde dose sous la main, quand beaucoup de choses dépendaient de la première.

« Ce sont de petites billes un peu molles dans lesquelles tu trouveras une gélatine. C’est ça le poison. La croûte tout autour n’est là que pour le protéger lui, et toi. C’est un poison assez violent, une infime quantité suffit pour donner la mort. Il est rapide… et pas trop douloureux. » Eleni avait l’air d’accueillir plutôt sereinement les informations que lui donnait Lell et qui pourtant concernait possiblement sa mort prochaine. Hésitant un instant, la jeune femme continua néanmoins son exposé. Il était nécessaire d’aller jusqu’au bout.
« Tu peux les dissimuler dans l’ourlet d’une chemise, tant que le tissu n’est pas trop épais, il te suffira alors de mordre un bon coup dedans pour libérer la gélatine. »

Le mode d’emploi était exposé, ne restait plus que les recommandations. « Certaines choses que je vais te dire te paraîtront bêtes, mais je préfère… enfin il vaut mieux que tout soit clair. » Elle n’avait aucune connaissance de la mission qui appelait Eleni, mais pour avoir besoin d’un tel poison… la mission comme son issue devait être dangereuse.
« Tu dois absolument protéger les boulettes de l’eau et de l’humidité en général, la couche de protection pourrait être altérer et libérer inopinément son contenu. Cache les dans un repli que tu peux amener aisément jusqu’à ta bouche, et si possible pas trop proche de ton corps. C’est pour ça que je t’ai parlé d’un ourlet, celui de ta manche par exemple, cela protègera le poison de toute sudation. Et dernière chose, évite de les toucher directement, utilise un linge et nettoie consciencieusement tes mains. Et si jamais tu ne te sers pas du poison, brûle-le, et prends bien garde de nettoyer correctement le vêtement qui a été en contact. Il est… vraiment efficace. »

Pour la première fois depuis qu’elle avait commencé à parler, Lell releva la tête et croisa le regard d’Eleni. Elle lui adressa un léger sourire d’encouragement, la pitié était inutile ici. « Y a-t-il quelque chose qui ne te semble pas clair ? »
Revenir en haut Aller en bas
Charis Sandragil
Ilédor
Ilédor
Charis Sandragil


Nombre de messages : 281
Age : 33
Date d'inscription : 01/04/2010

.:: Le Carnet ::.
Âge du Personnage: 34 ans
Profession: Informatrice
Positionnement : Régulière (en surface)
Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty
MessageSujet: Re: Mademoiselle, du poison s'il vous plait !   Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! EmptySam 22 Oct - 16:58

Ses mains étaient-elles vraiment gelées, ou était-ce seulement dans son esprit ? Quand Éléni reçut les boulettes préparées par Belladone, elle se sentit lourde, vieille et fatiguée. Quand avait-elle commencé à flirter avec la mort, au juste ? Quand avait-elle sciemment fait le pas d'envisager sa propre mort, volontairement ? Deux produits. Prévoyante, Belladone, c'était le moins qu'on puisse dire. Elle ne pouvait même pas faire semblant de gâter elle-même le poison, certainement pas au vu des instructions précises qu'elle recevait. De toute façon, elle n'y avait jamais vraiment compté. Un sourire ironique étira douloureusement les lèvres d'Éléni. Elle ne souhaitait pas reculer, mais là, elle n'en aurait même pas la possibilité. Elle songea à l'endroit dans lequel elle devrait coudre la boulette. Découdre un de ses costumes pour y insérer le poison ne poserait pas de problème. À elle de choisir le parfait emplacement. Main gauche, main droite ? La main gauche était la main de cœur, disait son précepteur, et elle préférait que la mort lui vienne de celle-là. Soit, va pour la manche gauche. Elle dissimulerait la seconde boulette dans l'ourlet du surcot qu'elle porterait pour tromper Beltxior.

Éléni écouta presque religieusement les recommandations de la Dissidente. Pas d'humidité, c'était noté. Elle réalisa que le QG Révolutionnaire demeurerait à l'abri de toute incursion avec ce poison : ne serait-ce que parce qu'il fallait plonger pour y pénétrer, jamais l'arme subtile que lui donnait Belladone ne serait efficace là-bas. Il lui faudrait à tout prix être trouvée près du campement révolutionnaire pour tuer toute chance de la faire emmener au mauvais endroit... De toute façon, il fallait qu'elle se débrouille pour être aussitôt traînée devant Beltxior en personne. C'était lui la cible, pas la Révolution.

Éléni avait envie de poser mille questions supplémentaires, stupides et inutiles, pour ralentir le cours du temps, discuter même encore un peu avec Belladone. Elle repoussa courageusement cette tentation enfantine. Notant soigneusement tous les détails, elle hocha lentement la tête. Sa voix n'était plus qu'un murmure. Elles devaient parler discrètement et tant mieux : Éléni aurait été incapable de formuler sa phrase à voix haute.

- À quoi ressembleraient mes derniers instants ?

Première précaution, parler au conditionnel. Ne serait-ce que pour apaiser sa propre panique. Un large éventail de possibilités s'offrait à elle. Deviendrait-elle violette, avant de succomber en portant les mains à sa gorge ? Fermerait-elle les yeux en sentant sa gorge enfler et éclater ? Se plierait-elle en deux, sous le coup d'une douleur stomacale fulgurante ? Vomirait-elle ses tripes avant de chuter lourdement ? Quelles seraient ses dernières pensées avant de succomber ? Éléni était déjà ailleurs, très loin. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Même pas frondeur, seulement doux.

- Merci pour tout, Belladone.

C'était ridicule de tout prendre tellement à cœur. Elle n'allait pas au suicide, au contraire : elle prévoyait et mesurait les risques, ce qui était entièrement différent. Toutefois, difficile d'arrêter le scénario qui se déroulait dans sa tête et de freiner son imagination. Elle l'avait toujours eue débordante, et voilà que ça jouait contre elle. Éléni prit une inspiration, porta les mains à son ventre en une mimique tendre et maternelle avant de souffler à la Dissidente :

- J'espère que nous nous reverrons. Bonne chance...

Avant de réaliser que c'était elle qui en avait besoin, de la chance.

Un dernier regard, un dernier salut, et elle repartait de son pas alourdi vers une planque. Tout était prêt : il ne lui restait plus qu'à entrer en scène. L'Amphithéâtre donnait une adaptation de l'Alouette, ce soir. Peut-être que Gribus Sandragil y assisterait, belle ironie. Elle, elle donnerait sa propre pièce, avec le gratin Olarii comme public. Hors de question de manquer le rendez-vous. Il lui faudrait d'ailleurs briller pour convaincre. Et alors, il n'y aurait pas de final ensanglanté semblable à celui de l'Alouette.
Revenir en haut Aller en bas
Lell Llureyin
Ilédor
Ilédor
Lell Llureyin


Nombre de messages : 1173
Age : 33
Date d'inscription : 28/05/2010

.:: Le Carnet ::.
Âge du Personnage: 20 ans
Profession: Apprentie guérisseuse
Positionnement : Dissidente
Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty
MessageSujet: Re: Mademoiselle, du poison s'il vous plait !   Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! EmptyMar 25 Oct - 20:20

Lell ne pouvait pas savoir l’âge d’Eleni, en tout cas pas sous ce déguisement si sous celui des nombreux autres rôles que cette femme endossait. Etait-elle plus jeune qu’elle ? Plus vieille ? Une question qu’elle n’aurait sans doute jamais l’occasion d’éclaircir… et c’était peut être mieux ainsi. Apprendre son âge signifiait aussi apprendre son identité. Or, il n’existait pas beaucoup de moyens de connaître ces informations…
Cependant, jeune ou vieille, Eleni accueillit ses instructions sans manifester d’émoi particulier. Une personne les observant aurait pu croire à une scène simple de la vie quotidienne où une jeune femme, apprentie guérisseuse, livrait une quelconque recette à une femme enceinte jusqu’aux yeux, plutôt qu’à, totalement inconcevable, une empoisonneuse livrant son poison à celle qui pourrait mettre fin à ses jours par son intermédiaire. Solution guère envisageable au premier abord par le tout venant.
Cependant, au fur et à mesure que Belladone délivrait ses instructions, Lell concevait une véritable admiration pour la métamorphe. La pensée l’effleura qu’elle-même n’aurait surement pas conservé un tel stoïcisme si elle s’était retrouvée dans la situation inverse : elle accueillant les instructions concernant un produit la destinant à une mort certaine… Oui, il y aurait pourtant de quoi paniquer. Elle ignorait tout de la tempête intérieure qui enveloppait Eleni, elle ne voyait que sa maîtrise apparente, peut être tout de même teintée d’une légère appréhension. Tout le monde est humain…

Les instructions semblaient suffisamment claires à Eleni pour qu’elle ne pose qu’une seule et unique question. Question que Lell attendait et à laquelle elle mit quelques secondes à répondre.
« Crise cardiaque… Le produit est suffisamment concentré pour que l’effet soit immédiat. Tu… » Elle hésita. Ce n’était pas le moment de flancher. « Tu souffriras le temps de quelques secondes, et tout sera terminé. D’abord le bras gauche, puis le cœur… Tu n’auras même pas le temps d’y penser, c’est quasi-immédiat. »

Cela allait-il la rassurer ? Lell en doutait. Il était difficile d’être apaisé à l’idée d’une mort possiblement proche. Mais elle ne pouvait rien faire de plus. Au moins, si Eleni devait l’utiliser, elle n’aurait pas à supporter bien longtemps la douleur d’un arrêt cardiaque. Quelques secondes tout au plus, quoi que quelques secondes puissent parfois paraître une éternité.

« Bonne chance à toi, Eleni. »

Elle ignorait sa mission, n’en connaissait pas les dangers, mais ce n’était pas son rôle. Le sien était accompli, elle regarda la femme enceinte s’éloignée de son pas chaloupée et disparaître dans la foule après un dernier regard dans sa direction. La tension qui l’avait accompagnée jusqu’ici sans qu’elle ne s’en rende compte disparu tout à coup, laissant la jeune Lell lasse et la gorge nouée. Son regard erra encore un petit moment sur le dernier endroit où elle avait vu la dissidente avant qu’elle ne détourne les yeux et ne reprenne son propre chemin dans un murmure adressé à une ombre.

« Je souhaite de tout cœur que tout ceci ne te serve pas. »
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty
MessageSujet: Re: Mademoiselle, du poison s'il vous plait !   Mademoiselle, du poison s'il vous plait ! Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Mademoiselle, du poison s'il vous plait !
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Je vous sors un verre?
» Je jure de vous servir
» Ce boulet vous appartient ?

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Les Tables d'Olaria :: Introduction à Olaria :: ♦ Les chemins de la vérité :: ♦ Quinze ans plus tôt :: Ville basse :: Les Quartiers Commerçants :: Les Rues Commerçantes-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser