Bienvenue au Royaume de l’Eclat.Ceux qui ont connu les Bals organisés par les Arlanii depuis des siècles peuvent attester qu’il n’y a eu que trois concurrents à ce somptueux décor. Lors du couronnement de Joaldor Arlanii, lors de son mariage, puis lors de la montée sur le trône de son fils, Elandor.
Si le luxe est habituel dans la Palais, il ressort de ces fêtes mémorables et grandioses des sensations qui ne peuvent être décrites, tant par le faste, l’opulence, et par la démesure de ces soirées. Ce soir, le Bal des Fiançailles annoncent à tout Ilédor bien-né, combien la lignée des Arlanii n’est pas éteinte, au contraire, et ô combien ils sont puissants, tant par la force de leur nom, que par leurs richesses et leur pouvoir.
Impossible de passer à côté des nombreux emblèmes de leur Maison, cet étalon blanc couronné d’or, majestueux et élégant. L’animal se dresse, fier, mais mesure sa fougue, la contrôle, et sait dominer. Voilà, ce qu’est un véritable Arlanii.
Cependant… ce soir, la Fête demeure sur cette ligne tangible entre le maintien et la frivolité. Car depuis les troubles que subit Edor Adeï, c’est le premier grand événement, et la première occasion de pouvoir célébrer qu’une grande nouvelle. On retrouve avec une joie parfaitement déraisonnable le marbre qui accueille les couples virevoltants. Car il est bien sûr question de danse, dans ce Bal. Les robes à panier tournent, les mains agrippent les hanches avec fermeté, les parures laissent autour d’elles des étincelles colorées.
Bienvenue au Royaume du Masque.Car, si le protocole veut que l’on se tourne à l’annonce d’un nouvel invité, son nom savamment articulé par le Maître d’Hôtel aussi fier qu’un Paon, et aussi raide qu’un Piquet, au bout d’un quart d’heure de Banquet, plus personne ne se prend au jeu de la Noblesse. Oh, bien sûr, à l’entente d’un nom illustre, l’on va concéder un regard insistant… Qu’il s’agisse de quelqu’un à admirer, ou à railler, beaucoup guettent le moindre faux pas. A la moindre faute de goût, défaut d’élégance, ou méprise dans un prénom, on se chargera de vous juger et de faire courir les plus basses rumeurs à votre sujet.
Mais rassurez-vous, tout ceci ne se fera que derrière votre dos. Devant vous, les Vipères, qui ne sont pas toujours celles que l’on croit, sourient et complimentent. On échange des courtoisies banales, on s’inquiète de votre santé… Si vous faites partie du Jeu, alors les intrigues vous seront enseignées. Les murmures, les pires complots se déroulent comme si de rien n’était, à la vue de tous. Sans qu’on puisse s’en apercevoir.
Car l’orchestre de cinquante musiciens couvre de leurs mélodies, tantôt entraînantes, tantôt suaves, les sournoiseries. Les deux larges tables, qui soulignent toute la longueur de la pièce, accueillent ce qu’Edor Adeï compte de plus coûteux et de plus goûteux. De Fameux Chefs paradent non loin des buffets, acceptant naturellement les compliments avec de faux sourires humbles.
On compte près de cent Domestiques, valets, servantes, garçons au service, au garde à vous, prêt à apporter victuailles et surtout boisson aux Nobles. Derrière le visage sans expression que réclament leurs rangs inférieurs, qui se cache réellement ?
Bienvenue au Royaume de l’Excès.Il y a bien des noms qui attirent l’attention. Et l’on remarque assurément ces Olarils, invités ou accompagnateurs. L’ont cherche à s’approprié une rencontre, l’on dit en avoir déjà vu, l’on se targue d’avoir une composition florale de cette jeune Olarile aux cheveux blonds. L’on se vante de les connaître, ou d’en savoir plus que son voisin à leur sujet.
On les critique, parfois, mais bien bas. On les dit fourbes, on les dit Révolutionnaires, aussi… On s’en méfie ? Mais l’on veut les observer… Ou les approcher, car on les dit plus… conviviaux. Plus prompt à faire la fête. On rêve de goûter aux ivresses de ce que l’on a entendu de leurs propres fêtes Olariles…
On goûte aux plats fins succulents, les épices douces ou acidulées, les pâtisseries sucrées ou fruitées, comme s’il n’existait aucun Siège qui bloque l’arrivée de marchandises rares. On boit le vin et le cidre si cher et si précieux, on trempe ses doigts dans les crèmes pimentées, on déguste, à l’aveugle, les liqueurs et les fruits exotiques comme s’ils n’étaient pas hors de prix.
Plus tard dans la soirée, l’on goûtera les poudres et les volutes de fumées, l’on sentira les onguents et les opiums, l’on cherchera à dévoiler de la peau, sans se préoccuper du Protocole, et de la Bienséance. Il faudra bien sûr s’éloigner, ou attendre que les Maîtres du Bien soient couchés… Sans penser au lendemain, où l’on reprendra sa place et ses carcans.
Mais il faut bien fêter dignement les Fiançailles du Gardan Edorta.
Car derrière tout ceci… l’on craint peut-être que les occasions de faire la fête ne disparaissent trop vite…