Les Tables d'Olaria
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 La Veuve et le Chef

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Mithra Edorta
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MessageSujet: La Veuve et le Chef   La Veuve et le Chef EmptyLun 23 Aoû - 18:30

      Ce sont ses mots. Les mots d’un chef, les mots d’un roi. Les mots d’un époux. Et ceux de beaucoup avant lui. D’autres chefs, d’autres rois, d’autres époux. Les confidences d’une lignée de dirigeants. Certains rendus fous par leur pouvoir, enivrés par ce que le destin a bien voulu leur confier. Des révélations qui ne sont autorisées qu’à être partagées entre personnes de pouvoir. Leur lignée, leur… essence…

      Le livre est lourd sur ses cuisses. Mais c’est une douleur qui lui plait. Celle de l’engourdissement, de la fixité. Son esprit, lui, est actif et vagabonde comme jamais. Tout comme ses doigts qui effleurent le papier jauni. Ils déchiffrent plus que ses yeux.

      Lire, ça lui prend du temps et c’est difficile, mais elle s’en sort. Et peu à peu, elle redécouvre l’histoire, leur histoire sous un jour nouveau. La Conseillère, on le lui a dit, est allée chercher Lysandre et Luminara. Et bientôt elles reviendront. Alors, au bout d’un moment, elle décide de sauter des passages, des pages, des chefs. Elle s’arrête lorsqu’elle lit le nom des siens, et elle apprend.

      Qui est elle, qui est Mithra Edorta, pour le peuple Olaril… ? Pourquoi est-elle la femme d’un chef, elle qui n’en est ni la fille, ni une parente. Et alors, tout change. Elle fait une pause, abaisse les Tables, et laisse son regard s’égarer. Le monde est nouveau, les perspectives… Infinies.

      Stupéfaction. Elle reprit sa lecture… Laclaos, son bon Laclaos, ses propres mots. Parfois, dans les Tables, il y a son nom qui traîne de ci de là, aux côtés de ceux des chefs de famille et de ses fils… Mithra Edorta… Ce personnage ambigu au rôle mal défini. L’épouse la…

      Elle comprit, au fil des pages, pour quelle raison Xan n’eut jamais le droit de les parcourir. Pourquoi Lysandre, pourquoi cette chasseresse, vaine.

      Mais il s’était trompé, sur son compte. Sur le sien, sur celui de l’Hirune… Le seul point sur lequel il a eu raison… Le seul point que l’avenir a confirmé…

      Xan.

      Sa folie, la folie et l’ambition démesurée de sa propre chair.

      A présent qu’elle sait, tout est plus tranquille. Sa lecture, sa position qui se fait plus détendue. Car qui détient le savoir, dans cette histoire, détient du pouvoir. Qu’il soit politique ou moral.

      Quelques heures, quelques heures puis un domestique du Palais du Gardan l’interrompt. C’est un homme jeune et aux traits tirés. Ici, les pauvres sont épuisés, on les exploite, jusqu’à ce qu’ils s’effondrent.

      « Deux femmes sont venues vous voir, madame. L’une d’elle se nomme Lysandre Hirune. »

      Un sourire, et Mithra hoche la tête.

      « Merci bien, je les attends. »

      Une révérence, et le domestique s’efface. Une ombre, rien de plus. Ici, les hommes qui n’ont aucun pouvoir ne sont qu’ombres.

      Mithra en aura.

      Mithra en a.




    Lorsque Lysandre entra dans le salon où l’on avait demandé à la veuve de demeurer, seule, en possession des Tables, elle la trouva en pleine lecture. Ergan, elle l’avait congédié. Il fallait qu’elle soit seule, pour accueillir Lysandre. Seule pour lire. Seule, un tête à tête vital. Il est certaines choses que Lysandre devait savoir. Certaines choses que Mithra avait à dire.

    Ostensiblement, les Tables ouvertes sur ses genoux, Mithra éleva ses yeux noirs en direction du chef. Un sourire, mince, étira ses lèvres. Puis les Tables se refermèrent avec un son mat entre ses mains. Geste complexe pour qui venait de passer deux heures sans bouger d’un poil, elle se leva et fit deux pas pour déposer l’ouvrage sur la tablette qui se trouvait au centre de la pièce. Pas un mot, toujours pas.

    Deux pas de plus, et c’est la lame qui rejoignit la tablette. Alignée avec soin le long de la couverture. Puis elle lève en sa direction un regard perçant.

    « Eh bien, Lysandre, ne viens-tu pas chercher ton bien… ? » Elle plissa les yeux, sa voix était douce. « Ou bien, le fait que j’en connaisse également le… contenu te trouble-t-il ? » Elle avait l’air charmant, un air feint…

    Puis, finalement, ses traits se durcirent pour une expression plus franche et plus forte. Sincère, surtout.

    « Avant de te les rendre, j’ai deux mots à te dire. Ne t’inquiète pas, tu les récupèreras, mais… Je dois te parler. » Elle marqua une légère pause. « Je sais pourquoi Laclaos t’as désignée. Je sais qui tu es, ton rôle. Et le mien. A présent que je comprends les motivations de Laclaos, je ne regrette pas d’avoir accepté de revoir mon jugement à ton sujet, après les feux. Car quoi que tu en dises, ou quoi que tu en penses, j’ai été honnête avec toi. » Elle plissa les yeux, caressant du bout des doigts les reliefs de la reliure. « J’ai placé ma confiance en toi, je t’ai offert ma crédibilité, mon soutien. Et avec eux ceux de nombre de tes opposants. Et tu l’a trahi au nom de ton petit pouvoir. Prétention… Bêtise. Aujourd’hui, aujourd’hui seulement, alors que je comprends les raisons qui ont poussé Laclaos à te désigner, je suis réellement en mesure de dire qu’il a eu tord. Pas d’évincer mon fils, non. Mais de te choisir, toi, à sa place. Aujourd’hui, je réalise que j’ai trop sacrifié à ta personne. »

    Elle eut un sourire un peu triste. Elle l’était vraiment.

    « Il a pensé que tu te montrerais digne de lui. Que ta force te guiderait ta… Volonté, comme ils disent, ici. Mais il n’avait pas prévu que la seule chose qui puisse guider Lysandre Hirune… C’est Lysandre Hirune. Sans doute a-t-il compté sur la sagesse de ton entourage, sur la noblesse d’une Luminara, l’intelligence d’une Sorastrata… Mais tu es ton propre soleil, ton propre monde. Nous les… Les Olarii, nous ne sommes que des pions sur ton échiquier, et je ne doute pas qu’à l’avenir, tu te montreras plus impétueuse et dangereuse pour nous que tu as pu l’être, avant. Avec toutes ces… possibilités. »

    Elle contourna la tablette, et s’approcha de Lysandre, jusqu’à se tenir à côté d’elle.

    « Mais je n’en souffrirais plus. Car je vous quitte, tous. Je me contenterais de prier pour que ton peuple ne souffre plus. Ne les oublie pas ils… Ils ont besoin de paix, et d’une vie humble. Ne les entraîne pas dans une escalade au pouvoir, sans quoi ils seront, tous autant qu’ils sont, en grand péril. »

    Elle haussa un sourcil, et se pencha à l’oreille de Lysandre pour chuchoter : « Malgré ce que j’ai pu lire, je ne me mettrais pas en travers de ton chemin. Je ne m’y mettrais plus, pour le moment. Je suis fatiguée, Lysandre, et comme tous les miens j’ai grand besoin de repos et d’une vie sereine. Tu n’es plus dans la forêt, ici, et tes poings ne rivaliseront pas avec les leurs. Sois sage, et raisonnable… Je t’en… supplie. »

    Elle allait partir, lorsqu’elle se retourna, pour désigner les Tables. « Tu n’es pas le dixième du Chef qu’il était. Des chefs qu’ils étaient, tous. Tâche de te montrer plus à la hauteur à l’avenir. En mémoire, au moins, de celui qui t’a confié les rênes de son peuple. Car si tu peux faire illusion auprès de nous, jamais tu ne seras exempte de lui rendre les honneurs qui se doivent. »

    Elle frissonna. Elle n’avait pas voulu la laisser parler, depuis son entrée. Monopolisé la parole… Sans doute Lysandre allait-elle la retenir… L’insulter, menacer ou même frapper, dans toute sa finesse habituelle mais… Mais elle ne s’en formalisait plus, aujourd’hui. Quand bien même elle soutenait le regard du chef qui n’était plus le sien, quand bien même elle palpait la gravité que représentait la lecture des Tables… Elle avait l’air épuisée. L’enthousiasme qui avait été soulevé par leur entrée dans cette ville merveilleuse avait été soufflé par les derniers évènements.


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MessageSujet: Re: La Veuve et le Chef   La Veuve et le Chef EmptyMar 24 Aoû - 20:00

Elles étaient libres.
Leur détention n'avait pas été longue, à peine quelques heures. Mais rien n'était plus agréable que sortir de derrière les barreaux. Lysandre, comme Luminara sans doute, était une Fille de la Terre, du vent et elle ne supportait pas d'être encerclée, emprisonnée, qu'il s'agisse d'une cage ou d'une idéologie. Voire d'un affront. Elle ne pouvait concevoir de se laisser attacher, par quelque moyen que ce soit.

Aussi, pouvoir passer les portes de cette cellule sonna comme un triomphe dans son esprit. Amoindrit par les souvenirs de son échecs, mais grandie par la vision d'un avenir qu'elle allait saisir à peines mains. Reprendre les Tables, qu'elles soient en possession de Mithra Edorta, de l'Oracle ou de leur Therdone même ! Ils étaient les fils de Bakarne, pensaient-ils réellement qu'ils pouvaient être domptés, alors que le Dieu Taureau avait laissé en eux son sang ?

C'est avec une détermination sans borne qu'elle avança pour finalement suivre sans encombre cette femme au visage sinistre. Elle était plus blanche qu'un cadavre, à faire froid dans le dos, mais le Chef des Olarils y avait lu avec une sorte de frayeur l'étendue d'une soif qu'elle-même avait déjà ressenti. Elle commençait à voir en elle toute l'impatience de lire les Tables, comme ce qu'elle avait ressenti le jour où l'ouvrage s'était trouvé entre ses mains pour la première fois.

C'était une étrange procession que ces deux Olariles, cinq gardes pas moins autour d'elles, ou plutôt, autour de la Conseillère Tehanii. S'imposant en guide, sans pourtant être bavarde, la Chasseresse ne respecta pas le silence dans lequel l'Ilédore s'était emmurée. Cependant, elle ne la dérangerait pas, elle n'avait aucune envie de lui parler...

« Il faut prévenir notre Peuple que nous sommes libres, qu'ils ne tentent rien... Grand Mère leur aura sans doute expliqué, mais j'ai peur des réactions de certains. Nous avons traversé trop de peines, nos nerfs ne supporteraient pas d'autres nouvelles néfastes. »

Lysandre s'adressait à sa Cousine, mais ses yeux, ronds comme des billes, ne pouvaient se défaire des bâtiments immenses et royaux qui les entouraient. C'était irréel, encore, malgré qu'elle ait eu le temps de les observer lorsqu'ils étaient entrés. Elle s'y ferait, et elle s'attendait même à ne plus pouvoir respirer en voyant le luxe de ce que cette horrible femme appelait le Palais. Avec un geste sur la main de Luminara, laissant Vanhilde prendre de l'avance, elle ralentit la cadence.

« Je veux m'entretenir avec Mithra seule à seule. » Et comme si elle savait que la Danseuse serait prompte à lui conseiller de réfléchir avant d'agir de façon inconsidérée lorsqu'elle se trouverait face à la Veuve de Laclaos, l'Hirune eut un hochement net de tête. « Ne t'inquiète pas, je saurais me contenir. Mais si tu es la première à rejoindre les Olarils, tu pourras leur expliquer la traitrise de l'Edorta... »

Mithra avait du pouvoir sur eux, surtout en ces périodes de doutes, d'égarement. Elle restait la femme de Laclaos et Lysandre savait que si elle-même criait à la félonie, ils ne la croiraient pas. Alors, sans cracher au visage de l'Endeuillée, le Chef des Olarils voulait tout de même que la vérité soit faite sur le comportement de celle qu'ils prenaient tous pour une Sainte.

En priant ainsi Luminara de bifurquer, Lysandre pensait que sa Cousine aurait à lui faire cette faveur. Le peuple devait savoir ! Savoir que dans quelques heures, lorsque Vanhilde Tehanii aurait lu les Tables d'Olaria, ils seraient tous ces Elus que ces gens cherchaient tant. Ils seraient tous les futurs Rois de cette ville, de ce continent !

« Rends-moi ce service, encore une fois. Tu es meilleure oratrice que je ne le suis. » Fit-elle finalement, avec un léger sourire. Amusé mais complice, avouer certains de ses défauts n'était jamais agréable. Pourtant, les liens entre les deux Hirune étaient forts, malgré les jalousies que pouvait ressentir la Chasseresse envers sa Cousine...



Elle avait eu raison de penser que le Palais lui couperait le souffle. C'était impensable. Malgré les quelques croquis qu'elle avait pu voir dans l'Héritage des Dieux, jamais elle n'aurait imaginé pouvoir contempler pareille merveille. Et pourtant, elle ressentit immédiatement l'orgeuil des Olarils, celle qui lui soufflait que, certes, ces richesses étaient divines, mais que valaient-elles face à Arestim Dominae ?
Lysandre eut un frisson. Et si, lorsqu'ils seraient confirmés en tant que descendants de Bakarne, elle possédait tout ceci ? Un frisson effrayé et palpitant, d'excitation la secoua, alors qu'elle marchait sur les pas de la Conseillère, toujours aussi silencieuse. Elle ne répondait même pas aux saluts terrifiés des Domestiques, gardes, serviteurs qui venaient à sa rencontre. Cette femme était un miroir de glace... Et Lysandre, elle, ne pouvait s'empêcher de les observer avec intérêt, méfiance bien sûr, tout comme ils la regardaient d'ailleurs.

Vanhilde se tourna vers elle uniquement lorsqu'elle s'arrêta face à une porte ouvragé avec un soin infinie. Là, ce Cadavre aux yeux toujours plus brillants lui fit un signe de main, lent et posé. Comment faisait cette femme pour se contenir avec autant de maîtrise ? N'était-elle pas avide de toucher les Tables, de les ouvrir, peut-être même avec brutalité, pour ingurgiter tout le savoir des Dieux ? De leurs ancêtres communs ? Comment faisait-elle enfin, pour ne pas ciller ?
Le Chef des Olarils, elle, peinait à calmer son pouls. Il y avait l'impatience de récupérer l'Ouvrage, certes... Mais derrière cette porte, se trouvait Mithra Edorta.

En Arestim, sans doute aurait-elle laissé sa haine l'envahir, la submerger pour ne cesser de frapper que lorsqu'elle n'aurait plus senti aucun mouvement dans le pantin qu'elle battait. Cette illusion passa devant ses yeux, sans doute ce frisson fut-il vu par la Conseillère, qui sembla prendre un plaisir malsain à constater sa hargne. Etait-elle ravie ?
Plus le temps de s'effrayer de ce Monstre, déjà, la porte s'ouvrait, et elle entrait d'un pas sec, rendu rigide tant elle se contrôlait.

La silhouette de Mithra lui provoqua des suées gelées, son sang cogna contre ses temps. Cette traitresse lisait les Tables ! Les iris rendues rondes et noires ne quittèrent plus le Livre. Mais la Veuve de Laclaos semblait vouloir parler... Qu'elle parle ! Qu'elle en finisse ! Lysandre entendit sa voix avec un désagréable sentiment de calcination de ses veines.
Elle savait, désormais, et avait du s'attacher à lire en détail ce qui concernait son époux et elle-même. Elle avait craché au visage de leurs lois, seuls les Chefs avaient à lire ces pages, elle avait enfreint leurs règles, elle qui se prétendait si intègre ?! La machoire de l'Hirune devenait douloureuse. Elle ne pouvait se résoudre à garder ce silence, ou cette inactivité qu'elle avait promis à Luminara et tacitement, à Grand Mère Hirune.

Cependant, elle réussissait à ne pas exploser, malgré l'électricité dans son corps. Qu'importait que cette femme, cette veuve, puisse déclarer que Laclaos eut tord ? Qu'elle importance ?! Malgré ses pensées à elle, l'Edorta l'avait désignée, sans même la consulter, elle, sa chère épouse... Malgré que Mithra se soit approchée d'elle pour lui souffler ses Philosophies à l'oreille, Lysandre s'avança et posa la main sur la garde de la Lame des Dieux, pour enfin la remettre dans son fourreau, à sa ceinture. La lourdeur de l'arme tira sur ses cicatrices si capricieuses.

« Toi qui penses savoir ce qui est bon pour notre Peuple, par une sagesse que ton Mariage avec Laclaos aurait pu t'apporter, tu as sali les Tables d'Olaria de tes yeux. S'il t'a choisi pour porter sa Descendance, qui n'a su lui donner satisfaction, il m'a désigné pour accomplir ce que les Dieux ont voulu pour les Olarils. »

Bien qu'elle boue, la Chasseresse ressentait l'envie de cesser de s'adresser à cette femme. Sa trahison envers elle n'était rien en comparaison de sa lecture des Tables. Quoi que la Veuve puisse en penser, Lysandre était blessée plus par ce viol de leurs traditions que par sa désobéissance devant l'Oracle. Bien que l'un attise l'autre ...

« Mes erreurs me seront pardonnées lorsque j'aurais mené à bien ma mission. Pense ce que tu veux de moi, Mithra, mais si j'avais voulu me détourner du chemin tracé par Laclaos, nous serions dans des ruines aujourd'hui, et je regarderais Mon nouveau Peuple reconstruire un village à mon effigie. Retire-toi et prie Bakarne pour que les Olarils ne souffrent pas, mais celle qui les conduit vers leur destin, c'est Moi, et j'ai l'aval de Laclaos et des Siens pour cela. »

Qu'importait la bénédiction d'une femme qui préférait s'effacer ?! Qu'elle se contente de prier, pendant qu'elle apporterait la Gloire à son Peuple ! Ce fut une main ferme qui s'imposa sur le cuir ouvragé, vieilli mais résistant des Tables d'Olaria. Ce qui comptait n'était pas ce que pensait une Veuve, mais ce qui était écrit sur ces pages encore vierges. L'avenir qu'elle écrirait, elle, rayonnerait encore dans mille ans, lorsque Mithra Edorta ne serait plus !

« Maintenant, si tu le permets, je me retire à mon tour, mais pour apporter la Vérité à ces Ilédors. »
Un battement de cils, et les Tables se serraient contre sa poitrine, comme si elles répondaient au battements effrénés de son coeur. Les Choses revenaient à leur place, et bientôt, cette place serait bien plus Haute encore.
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MessageSujet: Re: La Veuve et le Chef   La Veuve et le Chef EmptyMar 24 Aoû - 21:03

    La Veuve serra les poings. Elle la regardait, la toisait d’un œil noir. La houle qui menaçait, sous les tempes de Mithra était d’une violence sans égale. A tel point, sans doute, que son entame fut trop brutale.

    « De bien vaines paroles, pour une bien vaine personne, Lysandre. Les insultes te sont coutumières, mais elles ne sont pas pour autant l’apanage d’un chef. »

    Elle se tourna tout à fait pour lui faire face, avec aplomb, avec une force qui irradiait plus qu’elle insultait. Elle n’était pas un chien excitée, ni une femme dangereuse aux poings faciles. Et pourtant, dans cette pièce où Lysandre avait tout loisir de l’envoyer rejoindre son tendre époux, elle était son égale. Parce qu’elles le savaient, l’ordre établi en Arestim était ici un fantôme, que certes ils n’oublieraient pas, mais qui ne pourrait pas les mener à cette grandeur à laquelle elle aspirait.

    Sourcils froncés pour des appuis stables, Mithra avait encaissé sans défaillir les insultes, les accusations. La plus cruel, le rappel de la décision de Laclaos, du manque de confiance de ce dernier. Oh l’amour du Chef n’était pas feint, et Lysandre n’avait rien entendu des confidences qu’il lui avait faites, sous les draps. Des mots révoltants, soufflés dans l’air tendu d’une alcôve… Comme un présage des troubles à venir.

    Ces troubles étaient passés, vite remplacés par de nouveaux.

    « Contrairement à toi, j’ai l’esprit assez sain pour comprendre à quel point Laclaos a eu raison, de ne pas me désigner. Car sans sa mort, sans que Xan ne se révèle à nous… Jamais nous n’aurions su quelle félonie l’habitait. Et il me savait mère dévouée avant tout. Comme toute mère, la décision qui aurait été là mienne n’eut guère été la bonne. »

    Un mince sourire étira ses lèvres.

    « Certes, tu ne t’es pas éloignée du chemin voulu par mon époux. Ce n’est d’ailleurs pas ce que j’ai dit mais pour cette fois encore, je mettrais ta surdité sur le compte de l’emportement. Soit. Ce qu’il n’a pas prévu, ce ne sont pas tes décisions, mais toi. Toi, qui à en croire les Tables n’était pas destinée à gouverner avec tant de prétention et d’emportement. Toi dont la fougue, plutôt que de te faire sombrer dans la mégalomanie, aurait du te permettre de demeurer une femme solide et fiable pour assurer cette… intendance » Car non, ce n’était pas un règne, jamais, jamais elle n’en avait eu l’étoffe. Tout juste le potentiel, potentiel qui avait été englouti par son entêtement. « Quand bien même tu as dirigé les Olarils sur la voie d’un monde nouveau, quand bien même, grâce à toi, une infime partie de notre Peuple demeure en vie, établie, la personne que tu es devenue en apposant sur ces Tables ton propre œil n’était pas celle que Laclaos destinait à tant de pouvoir. » Elle s’approcha alors, dangereusement pour elle, une lueur de défi dans le regard. A voir Lysandre se crisper sur sa lame, ses Tables, elle en eut un léger sourire. Sourire qui n’ôtait rien à sa propre fureur. « Et si tu es si en colère, Lysandre… Si tu te sens l’obligation de blesser, de sentir saigner les cœurs sous tes mots… mon cœur, sous tes mots… c’est parce qu’au fond, tu sais que je te dis la vérité. » Elle plissa les yeux, à portée de main. Ou de coup. « Je la lis dans ton regard, tu ne caches pas grand-chose de tes sentiments. La hargne qui transpire de chaque pore de ta peau, ce sempiternel besoin de reconnaissance, celui d’obtenir en tout l’assentiment de tes proches. Tu cherches les caresses, les vivats… Parce que tu es incapable d’agir en étant sure de faire le bien. Parce que tu te connais. Parce que tes détracteurs n’ont pas besoin de mentir, pour répandre sur toi leurs opprobres. Ce doit être là un bien douloureux sentiment, n’est-ce pas, que de pouvoir être blessée par la stricte vérité ? »

    Elle abaissa légèrement la tête, lui masquant son regard.

    « Mais mon but n’était pas de blesser à mon tour. Retire-toi donc Lysandre, si c’est ce que tu souhaites. Retire-toi donc apporter à ces Ilédors ta vérité. Seulement, ne t’y brûles pas les ailes, car avec elles, ce sont celles de tout un peuple, que tu brûleras. Et c'est là une chose que nul, pas même ta propre famille, ne te pardonnera. »

    Elle fit un pas, à reculons, puis lui offrit son dos comme cible pour sa haine. La démarche tranquille, elle regagna la porte.
    Sur le point de l’ouvrir, lui barrant toute retraite, elle se tourna une ultime fois. De profil à elle, elle ne la regarda pas dans les yeux.

    « Peut-être qu’un jour, cet Olarii que leur prophétie appelle trouvera le trône. Peut-être cet homme-là en sera-t-il digne. L’un des nôtres l’un… des miens » Elle avait lu les Tables. Jamais Lysandre n’aurait cet héritier en son sein. Quelle douleur cela devait-il être… « Mais qui aurait pleine connaissance des Ilédors, et un respect de leurs coutumes. Lui… lui sera sans doute digne d’un pouvoir aussi merveilleux. Mais ce ne sera pas toi. Cesse donc de te voir rayonner, là où tu n’as été choisie que car malléable, et suffisamment brute pour t’obstiner dans la mission qui te fut confiée. Apporte à ton Peuple, comme tu dis, la paix, car c’est tout ce qu’il mérite. Et tu la lui dois, surtout. »

    Elle soupira, doucement.

    « Ne m’en tiens pas rigueur, Lysandre, mais je ne me sens plus la force de tenir sous le fiel de ton regard. Tu as gagné, depuis le début. Mais quand bien même je m’efface pour trouver à mon tour un repos et une paix bien méritée, sache cependant que je ne laisserais pas ma descendance ni mon clan souffrir d’ingérences. Sache que si le devoir de protéger Télarans et Edortas, de protéger amis, frères, soutiens se faisait sentir, je serais là pour eux. Ici plus que jamais. Tu pourras déverser toute la haine qui te sied sur mon compte, cela ne changera pas. »

    Bien entendu. Mithra le savait, elle allait l’accuser d’usurpation, du crime d’avoir lu les Tables… Si ce n’était pas déjà fait, avec Luminara. Mais ce n’était pas grave, non, car ces accusations là, elle les avait déjà plus ou moins portées sur ses épaules à compter du sacre de Lysandre.

    « Au revoir, Chef des Olarils. Je n’ai plus de mots pour toi. De toute façon, tu ne les entendras pas. »

    Puis elle disparut dans le dédale des couloirs. Loin, loin de Lysandre et de sa fureur, loin de Lysandre.

    Au détour d’une porte, plusieurs minutes plus tard, Mithra s’arrêta net. Son épaule trouva un mur, puis son dos…
    Puis ses mains son visage.

    Et elle pleura des larmes coupables. En son sein, l’atroce brûlure d’abandonner les siens à un chef qui ne les méritait plus. Son crime, celui d’avoir suscité la rage d’une femme qui n’en serait qu’injuste envers ceux des siens qui s’élèveraient devant l’amertume de Lysandre. Car demain, en son absence, qui élèverait sa voix contre l'Hirune serait félon. Demain serait un bien triste jour.

    Consciente, terriblement consciente de sa lâcheté. Mais elle serait là, pour eux. Elle serait là de loin, présente en leurs cœurs, présente en chair s’il était nécessaire pour elle de se dresser comme un bouclier à ceux qui avaient son amour.

    Mithra Edorta, la veuve épuisée, à bout… Jamais, elle le savait, elle n’aurait tout à fait le droit de faillir.

    Ce n’était que partie remise.

    Et pour l’heure, il lui fallait rester, et savoir quel accueil les nobles Ilédors, si dignes et si calculateurs, allaient réagir face à Lysandre. Mithra elle-même avait flairé le piège… Ils ne feraient, elle le savait, qu’une bouchée de la chasseresse. Qu’importe, aujourd’hui, elle ne saurait plus lui apporter son soutien.
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