Les Tables d'Olaria
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 Un simple avertissement

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Sorastrata Hirune
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MessageSujet: Un simple avertissement   Un simple avertissement EmptyJeu 8 Déc - 5:30

Les Olarils sortaient du Grand Théâtre, encore ivres du triomphe de la Danse Taurine, et Grand-Mère n'avait pas à rougir de son enthousiasme. Marchant bras-dessus bras-dessous avec Luminara, la matriarche était toute occupée à régaler sa petite-fille de compliments lorsqu'elle aperçut un visage qui lui rappela amèrement ses devoirs. Tout près, le Chef des Olarils conversait avec une jeune Pélégon, et à son bras était Nydearin. Cela faisait déjà plusieurs jours que le prêtre d'Hésione s'était remis d'aplomb et tout le peuple d'Arestim était à présent au courant. Sorastrata ne faisait pas exception, mais elle avait gardé son opinion pour elle-même, en bonne partie parce qu'elle était occupée à préparer son audience au Palais, et surtout parce qu'elle ne voulait pas gâcher la soirée de la Danse Taurine avec une affaire aussi déplaisante. Mais le spectacle était maintenant terminé et la vieille Chasseresse ne voulait plus attendre.

Elle murmura une dernière félicitation à Luminara, l'embrassa sur la joue et lui souhaita bonsoir avant de se diriger d'un pas décidé vers Nydearin et Lysandre. Elle prit soin de contenir son amertume derrière un masque de sévérité lorsqu'elle serra le bras du prêtre de ses doigts noueux, mais son regard disait bien au jeune homme ce qu'elle préférait taire devant sa petite-fille.

"Beau-fils, j'ai à te parler," intima-t-elle d'une voix sèche qui ne laissait pas de place aux objections.

Tandis qu'ils s'éloignaient de la foule, l'Ancienne laissa son esprit s'emplir des souvenirs des dernières semaines, de tous les moments difficiles, tous les instants de doute et les obstacles insurmontables. C'était à Lysandre qu'elle pensait entre tous, à cette jeune femme si forte et si fragile qui avait dû porter tant de choses sur ses épaules. Elle se rappela à quel point sa petite-fille s'était trouvée perdue dans ce monde où elle n'avait plus la moindre autorité, presque abandonnée par son peuple et maintenant forcée d'assujettir son avenir au service d'Arngrim et des enfants qui hériteraient du trône après sa mort. Mais le pire était qu'elle avait dû affronter tout cela seule ; bien sûr, sa famille avait été auprès d'elle et les Olarils avaient finis par l'accepter de nouveau comme leur Chef, mais Sorastrata avait toujours vu, à sa grande tristesse, que même le soutien de tout un peuple ne pouvait remplacer l'amour d'un mari.

Alors qu'elle se postait au coin d'une ruelle, faisant face à Nydearin, il n'était pas juste de dire qu'elle avait du ressentiment envers lui, qu'elle était en colère ou qu'elle était déçue. Non, ce qu'il y avait dans son regard, on ne pouvait que le nommer "haine".

"Eh bien," fit la matriarche d'un ton plus acerbe que sarcastique. "Te voilà enfin descendu de la montagne, hein ? Et maintenant que tu as daigné faire ton retour parmi les tiens, ton épouse t'accueille avec pardon et amour comme le saint que tu es, n'est-ce pas ?"

Il ouvrit la bouche pour répondre et Sorastrata ne put s'en empêcher : son poing se ferma, son bras se détendit et elle le frappa en plein visage. Si elle s'était écoutée elle se serait ensuite servit du bâton et lui aurait craché dessus pour faire bonne mesure, mais elle se contint. Elle aurait préféré qu'il ne voit pas l'étendue de sa colère, elle aurait voulu pouvoir garder son calme, mais lorsqu'elle voyait son visage plein de fausse contrition, elle se sentait des envies de meurtre.

"J'aurais dû demander aux hommes de te traîner dans la boue plutôt que de te laisser te pavaner au bras de mon enfant, vaurien."

L'Ancienne s'efforça de calmer sa respiration, de ne pas céder à la voix qui lui chuchotait à l'oreille de le frapper jusqu'à ce qu'il ne puisse plus parler. Il était de toute façon probable qu'elle perde ses forces avant même de lui avoir brisé le nez. Elle ne voulait pas l'entendre se justifier, elle se fichait de ce qu'il pouvait avoir à dire, mais elle n'avait pas la force de le battre ou le droit de le tuer. Toute la retenue qu'elle avait acquise pendant ces deux mois menaçait de disparaître, mais elle savait aussi que sa petite-fille l'aimait, ce misérable. Ils étaient venus pour parler, elle n'avait guère d'autre choix.
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MessageSujet: Re: Un simple avertissement   Un simple avertissement EmptyJeu 8 Déc - 8:22

Il s’y attendait. Ils s’y attendaient tous les deux. Elle l’avait mis en garde lorsqu’il était venu se présenter à elle après avoir vaincu ses propres démons. Ses proches possédaient une certaine rancœur – justifiée – à son égard et cela ne serait pas aisé de les faire changer d’avis le concernant. Il savait également que cette première « sortie » en public serait le théâtre – dans le théâtre, quelle ironie – des toutes premières confrontations avec eux et qu’il ne pourrait probablement pas s’en sortir sans avoir un échange plus ou moins cordial avec l’un d’entre eux. Nydearin avait été conscient de tout cela lorsqu’il était venu chercher Lysandre à sa chambre avant de prendre la voiture pour le Grand Théâtre. Ils n’en avaient pas explicitement parlé mais le Grand-Prêtre ne craignait pas ces rencontres pour la simple et bonne raison que la sincérité guidait ses paroles et même si cela ne suffirait pas, le monde entier pouvait être contre lui, tant que Lysandre l’aimait et lui faisait confiance, alors le reste n’avait aucune importance. Toutefois, il savait qu’elle attachait beaucoup d’importance aux siens et il lui serait sans doute difficile de vivre continuellement en conflit avec ses proches au sujet de son époux, d’autant plus que cela pèserait également sur Nydearin qui s’en voudrait d’être un tel fardeau pour elle, ce qui n’augurait rien de bon pour la suite de leur couple dans l’hypothèse où il ne se ferait plus accepter par les proches de son épouse. Que ferait-il dans un tel cas ? Il ne préférait pas y penser, mais de deux maux, il faut souvent choisir le moindre et même si cela lui briserait le cœur en une myriade de petits morceaux irrécupérables, il ne pouvait décemment pas infliger à Lysandre la torture des reproches des autres, chers à son cœur. On dit que l’Amour est plus fort que tout, mais la vérité est toute autre, hélas.

Alors que Lysandre remplissait son rôle de Chef des Olarils à merveille, comme toujours, Nydearin était à ses côtés, presque transparent, juste visible pour que l’on voie que la plus belle femme Olarile était accompagnée de son époux légitime et qu’elle n’était plus seule dans sa lourde et pénible entreprise. Il participait également un peu aux discussions mais de manière ténue et réservée. Il n’était ici qu’à un titre représentatif et il en connaissait encore assez peu sur la culture Ilédor pour ne pas éventuellement commettre un impair qui pourrait embarrasser son épouse, aussi mieux valait ne pas trop en dire et se contenter de quelques sourires, saluts et quelques phrases passe-partout. Il serait bien assez vite le temps d’utiliser le Verbe comme une arme lorsqu’il aurait fini de s’acclimater aux us, coutumes et mœurs de cette nouvelle société dans laquelle il replongeait une nouvelle fois. Au bras de Lysandre, il n’avait pas vu Sorastrata arriver, ce n’est que lorsqu’une main se posa sur son bras qu’il tourna la tête et l’aperçut, fidèle à elle-même, cachant à peine le mépris qu’elle avait de lui. Le scandale n’éclaterait pas ici, pas devant tout le monde, non ce n’était pas raisonnable mais le Grand Prêtre savait déjà ce qui l’attendait, du moins en quelque sorte. Il acquiesça doucement de la tête lorsqu’elle avoua vouloir lui parler bien que ses propos ne souffraient aucun refus et que son approbation soit complètement inutile et la suivit en silence après avoir serré un peu plus la main de son épouse une dernière fois, pour lui faire comprendre qu’il s’éloignait pour peu de temps, peut-être aussi pour lui dire qu’il l’aimait, et salué les personnes autour d’eux.

Ils sortirent du Grand Théâtre pour glisser dans la rue, laissant derrière eux la foule qui discutait encore avec enthousiasme de ce qu’elle venait de voir. Avant qu’il ne sorte, Nydearin avait pu remarquer à quel point Luminara était félicitée de toute part. Un sourire était né sur son visage mais il n’avait pas osé aller la voir pour lui faire part de son sentiment. Elle aussi devait lui vouer une rancœur tenace et il n’avait pas pour but de lui gâcher cette magnifique soirée. La lune éclairait la rue, donnant à l’atmosphère une couleur légèrement bleutée ce qui lui rappela brièvement les grandes plaines qui bordaient Arestim Dominae la nuit dans lesquelles il avait l’habitude de se balader étant enfant, même de nuit. Ces moments d’insouciance étaient dorénavant loin, très loin, trop loin peut-être. Devant lui, Sorastrata marchait encore un peu avant de s’arrêter au coin d’une ruelle et de se retourner pour lui faire face. Dire qu’il faisait face à une lionne aurait été certainement insuffisant pour décrire la sensation que lui procura le regard de l’Ancienne. Toutefois, il n’était pas du genre à prendre peur pour une chose, aussi terrifiante soit-elle, comme des reproches. Il s’attendait à ce qu’elle ne mâche pas ses mots et il ne fut pas déçu. Pourtant, aussi serein que d’habitude, il savait qu’elle avait raison, en un sens. Il allait d’ailleurs le lui dire mais elle ne lui en laissa pas le temps. Son poing, plus fragile que celui d’un homme, mais néanmoins assuré, vint frapper le visage du Grand Prêtre, laissant, par la lourde bague qu’elle portait, une petite trainée sur sa joue de laquelle se mit à couler un peu de sang. La tête tournée vers le côté sous le « choc », Nydearin ne prit pas la peine de porter la main à son visage pour vérifier ce qu’il savait déjà par la petite sensation chaude qui glissait très lentement sur sa joue.

Rouvrant les yeux, il tourna à nouveau la tête vers l’Ancienne, sans ciller, sans un mot et sans une lueur de colère dans son regard. Pourquoi lui en aurait-il voulu ? Elle protégeait sa petite-fille d’un homme qu’elle jugeait comme un moins que rien et qui ne méritait pas d’être l’époux d’une femme si exceptionnelle. Les derniers évènements n’avaient pu qu’étayer ses propos, à ne pas en douter. Alors oui, le Grand Prêtre aurait accepté sans même protester qu’elle lui crache au visage, qu’elle l’assène de coups de bâton jusqu’à épuisement mais elle semblait décidée de s’en tenir à ce coup de poing. Ses derniers propos ne firent pas plus mal. De toute façon, il était en tort, aucune justification ne pourrait la faire changer d’avis, c’était une évidence. La supplier de lui donner une seconde chance était hors de question, lui faire comprendre qu’il s’agissait du choix de Lysandre, voilà ce qui lui était possible. « Bonsoir Sorastrata. Je suis heureux de voir que tu te portes bien. » Les premières paroles, prononcées sur un ton calme, posé, duquel était étrangement absente toute rancœur pour cette violence « gratuite » contre lui. Il ne jouait ni l’ironie, ni quoique ce soit d’autre, il était seulement d’usage de commencer ainsi les discussions. Debout droit devant elle, il la surplombait légèrement mais il n’était ni en position de force, ni vraiment en position de faiblesse. Si elle voulait le frapper, elle le pouvait, il ne se défendrait pas. Après tout, si elle avait voulu le tuer, elle aurait surement trouvé d’autres moyens, comme utiliser d’autres personnes ou cherché son bonheur dans l’usage des plantes. Un guérisseur empoisonné, voilà qui avait une certaine ironie.

« Pourquoi ne l'as-tu pas fait Sorastrata ? Pourquoi as-tu retenu tes hommes pour venir frapper toi-même le vaurien que je suis ? » Il connaissait déjà plus ou moins la réponse mais il voulait l’entendre de la bouche de la vieille femme. Ses pensées allaient à Lysandre car il savait que ce qui se jouait maintenant avait son importance pour eux deux. La chaleur sur la joue lui rappelait les erreurs qu’il avait commises à son égard et si elle n’avait pas jugé utile de le « punir » pour son absence, d’autres commençaient déjà à s’en charger à sa place. Mais n’importe qui aurait pu le voir venir. « Aucune justification ne pourra te satisfaire, même si Hésione venait te l’exposer elle-même. Mais je ne veux pas me justifier. Non pas parce que je ne pense pas pouvoir te convaincre mais simplement parce que je sais déjà que ce que j’ai fait est inexcusable. » Son regard clair était profondément ancré dans celui de l’Ancienne. Sa voix était posée, claire, douce. Il ne cherchait pas à l’amadouer mais il ne serait ni celui qui s’emporterait pour avoir été frappé ou malmené, ni l’enfant pleureur qui s’effondrerait parce qu’on le réprimande pour une bêtise. « Je ne suis pas un Saint. J’ai conscience du tort que je lui ai fait, et, crois-moi, j’en souffre également plus que tu ne le penses. Si cela ne te saute pas aux yeux, j’aime Lysandre, je l’ai toujours aimé et je l’aimerais toujours. » Il jeta un bref regard à la lune avant de croiser à nouveau les iris de la vieille femme. « Je suis un homme Sorastrata, et, en tant que tel, je fais aussi des erreurs. Si je suis revenu, c’est avant tout pour elle et pour personne d’autre et tu ne sais pas à quel point j’ai été heureux de voir qu’elle était prête à me pardonner. » Il eut un très léger sourire pendant quelques trop bref instants, penser à Lysandre lui faisait toujours énormément de bien. « Je suppose que tu aurais préféré qu’elle me rejette comme le moins-que-rien que je suis pour toi mais je sais ce que je serai prêt à faire pour elle et que, maintenant que la raison s’est imposée à moi, je serai toujours là pour elle. Et même si je sais que tu n'accordes aucune valeur à mes propos, cela ne change pourtant rien à leur réalité. »

Il aurait pu lui dire d’essayer de convaincre elle-même sa petite-fille d’abandonner ce « lâche », de venir se confronter à elle plutôt qu’à lui, mais il savait pourquoi c’était à lui qu’elle était venu parler et pas à Lysandre. Pas pour le frapper, ce coup de poing n’avait été qu’un « bonus », peut-être une faiblesse de sa part ou une envie refoulée depuis trop longtemps qui avait rejailli toute seule et s’était exprimée de la sorte. Le comportement de Sorastrata était surtout évident. Elle la protégeait, elle, sa petite-fille, de ce qu’elle avait vécu quelques semaines plus tôt alors que son mari aurait du être à ses côtés et s’était plutôt emmuré dans un silence des plus troublants. Il n’imaginait que trop bien ce que Lysandre avait pu vivre à l’idée que son époux ne lui adresse plus la parole, ne daigne poser sur elle qu’un regard vide et terne dans lequel plus aucune lueur ne brille réellement. Oui, tout cela il l’avait compris et ils en avaient déjà parlé tous les deux, succinctement surement, mais le Grand Prêtre était convaincu que les Dieux leur laisseraient le temps d’en parler, de panser mutuellement leurs blessures et d’avancer tous les deux pour retrouver cette complicité et cet Amour qu’ils échangeaient par le passé, lorsqu’ils n’étaient encore qu’en Arestim Dominae, lorsqu’il n’était pas encore Grand Prêtre et qu’elle était la Chasseresse la plus habile et la plus belle de tout Olaria. Il aurait payé de sa vie pour ne revivre qu’une nuit de ces merveilleux moments peut-être à jamais perdu mais les Dieux n’autorisaient pas de tels miracles et Hésione lui été déjà venu en aide en lui montrant à quel point la priorité de sa vie était Lysandre qu’il ne pouvait décemment lui demander un nouveau miracle. C’était à lui maintenant de faire le reste, de convaincre Sorastrata, Luminara et tous les autres, le monde entier s’il fallait qu’il n’était pas un vaurien, qu’il aimait Lysandre et que, s’il le fallait, il pourrait passer toutes les épreuves possibles et imaginables pour leur prouver à tous qu’ils avaient tort, et que, même s’il avait fait une erreur magistrale, il était prêt à tout pour la réparer et pour faire en sorte que la Chef des Olarils ne se retrouve jamais plus sans son époux, ne soit plus jamais seule, en quelconque circonstance, qu’il s’agisse de joie, de peine ou d’adversité. Nydearin comptait bien être présent pour elle pour le reste de leurs vies à tous les deux et cela, rien ni personne ne pourrait le remettre en cause. Jamais.

[HRP : Je te demande pardon, je suis un peu parti en envolée "lyrique" pour le coup. Si quelque chose ne vas pas, n'hésite pas à me le dire.]
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Sorastrata Hirune
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MessageSujet: Re: Un simple avertissement   Un simple avertissement EmptyLun 9 Jan - 0:59

A cela aussi, elle s'y attendait. Lorsqu'elle avait décidé de l'accuser, elle ne savait pas exactement comment il allait réagir, mais elle s'attendait à ce qu'il se campe sur ses positions. Sorastrata ne pouvait pas se targuer de connaître Nyd, mais elle savait quel genre d'homme il était. A l'attitude qu'il avait adopté après son retour en public, elle avait compris qu'il n'avait pas changé ; le prêtre d'Hésione état toujours un homme plein de contrôle, d'un calme suffisant. Il n'affichait pas la fausse naïveté dont il avait l'habitude quand Arestim existait encore, mais c'était bien l'homme dont elle avait eu un aperçu le jour où Lysandre s'était réveillée de ses blessures. Elle avait vu de la force ce jour-là, une volonté féroce née de la jeunesse et de l'ambition, mais surtout, elle avait vu la loyauté et l'amour qu'il portait à son épouse. Elle l'avait aimé pour ces qualités. Mais aujourd'hui, cette même obstination arrogante emplissait l'Ancienne de dégoût et de colère. Lorsqu'elle vit le jeune homme sourire, la Chasseresse faillit le frapper de nouveau. Comment pouvait-il parler de son bonheur ? En quoi avait-il droit au bonheur ou au pardon ?

Sorastrata aurait pu hausser le ton, elle aurait foudroyer Nydearin du regard, l'insulter ou le maudire. Mais comme il le pensait, ni les justifications ni les menaces ne serviraient. Elle ne fit que secouer la tête et lui donner un regard désabusé.

Non, beau-fils. Maintenant que je t'ai entendu, j'en viens à préférer que tu sois resté dans ton trou et que tu y aies péri. Mieux aurait valu qu'elle ne te voie jamais revenir et qu'elle puisse continuer son chemin sans toi, avec des gens qui l'aiment et sur qui elle peut compter. Tu parles de la réalité de tes propos, mais les mots ne sont que du vent. Je suis une Hirune : ce sont tes actions que je regarde. Tu prétends aimer Lysandre, mais ton amour ne t'a pas empêché de l'abandonner alors qu'elle croupissait dans une geôle. Il ne t'a pas empêché de te terrer dans une chambre d'auberge alors que son peuple s'éloignait d'elle, alors que les Ilédors la menaçaient de mort. Il ne t'a pas empêché d'être absent lorsqu'on lui a annoncé qu'elle ne pourrait jamais avoir d'enfants. Tu n'as pas le droit de te nommer son mari et tu n'as pas le droit de te considérer comme un homme.

C'était une longue liste qu'elle énonçait, d'une voix basse et tendue par la rancoeur. Elle n'avait rien oublié des semaines de peur et d'incertitude qu'elle et ses petite-filles avaient passées lorsque Lysandre était en prison, la menace d'une exécution planait toujours au-dessus de sa tête. Elle se rappelait la souffrance ténue qui avait continué d'emprisonner le Chef des Olarils, même après sa libération. Lysandre avait semblée éteinte, perdue dans un monde où elle ne trouvait pas sa place et où elle semblait se retrouver seule, même lorsqu'elle était entourée par sa famille. Elle se souvenait de l'horrible sentiment d'impuissance qui avait pris son vieux coeur en voyant son enfant dépérir, malgré l'amour et le soutien qu'elle lui offrait. Elle avait su depuis le début qui était responsable.

Tu es sorti de ton égoïsme et tu supplies pour qu'on t'accorde une seconde chance, mais nous t'en avons déjà donné une. Nous t'avons donné deux, trois, quatre chances de te racheter et de remplir ton rôle d'époux. As-tu oublié les visites que je t'ai rendues dans ta maudite retraite ? Je t'ai offert ma compassion, mes conseils, mon aide, ma colère...et je n'ai pas été la seule. Je n'ai pas vu grand chose de ton amour pendant ces deux mois. Ce que tu appelles faute, misérable, j'appelle péché.

Sorastrata accusait et maudissait, mais c'était plus pour elle-même que pour Nydearin. Il lui avait dit à quel point il était conscient de sa faute, et elle croyait. Ces paroles ne l'atteindraient pas, à vrai dire il s'attendait sûrement à entendre tout ceci. Mais elle n'avait que faire de son avis. Ce n'était pas pour lui qu'elle était ici.

Je ne veux pas savoir pourquoi tu l'as délaissée, ou pourquoi tu es revenu. Je sais déjà ce que tu es. C'est dans les moments d'épreuve qu'on montre sa vraie mesure, beau-fils, et maintenant je connais la tienne. Tu tiens tes belles paroles lorsque la loyauté est facile, mais il viendra un jour où nous verrons de nouveau qui tu es vraiment. Comme tu l'as dit, il n'y a pas de justifications qui me feront changer d'avis, pas d'actions non plus. Il vaudrait mieux pour elle qu'elle soit heureuse sans toi, sans le risque que ta lâcheté représente.


Elle en avait dit assez. Sa rancoeur était satisfaite pour le moment, mais elle n'avait pas tout à fait fini. A la vérité, tout ce qu'elle avait dit jusqu'à présent n'avait que peu d'importance. Nydearin avait déjà imaginé toute cette conversation, et les émotions de l'Ancienne n'avaient pas voix au chapitre. Sorastrata savait qu'elle n'avait pas droit à cette satisfaction ; elle aussi avait péché et elle était écoeurée de voir la différence entre l'attitude du prêtre et la sienne. C'était ce qu'il avait fait pendant ces deux mois qui provoquait sa rancoeur, mais c'était ce qu'il ne faisait pas aujourd'hui qui lui inspirait tant de dégoût. Dans les ténèbres de la ruelle, Sorastrata se redressa et marqua une pause. Sa main se détendit autour de son bâton et depuis l'ombre de sa capuche elle jeta un regard perçant au Garthésia. Lorsqu'elle reprit la parole, sa voix était calme et froide.

Cependant tu dois déjà avoir toutes ces accusations à l'esprit. Si ce que tu m'as dit est vrai, tu as déjà pensé à toutes ces choses avant de te présenter devant nous. Mais tu n'es pas revenu pour elle ; tu es revenu parce tu souffrais d'être loin d'elle, de penser qu'elle nourrissait de la haine envers toi. Tu es revenu parce que tu espérais trouver son pardon et son amour. Voici comment je sais que tu es faux, que tu es vil : ceux qui sont conscients d'avoir commis pareil péché ne veulent pas d'un pardon, beau-fils. L'idée qu'on puisse leur pardonner si aisément est un blasphème à leurs oreilles. Ils ne sourient pas en disant à quel point ils sont heureux. Les gens comme n...comme toi savent qu'ils ne méritent pas le bonheur.

Elle s'était reprise juste à temps. Sorastrata ne voulait pas que Nydearin sache quelle culpabilité immense elle cachait. Elle avait gardé ce secret, refusant de le dire à ses plus proches amis, à sa famille la plus précieuse. Seule Luminara pouvait le soupçonner, car c'était elle qui l'avait sauvée du suicide, mais la Danseuse n'était pas venue à elle pour en parler. L'Ancienne préférait qu'il en soit ainsi. Sa souffrance n'avait pas à être exposée, elle ne devait pas affecter d'autres qu'elle. Cela aussi était une pénitence. Le prêtre d'Hésione était bien la dernière personne à qui elle voulait révéler ceci ; son péché n'était pas aussi grand que celui de la vieille Chasseresse, mais il était fautif et il semblait bien trop satisfait de l'accueil que Lysandre lui avait accordé.

Si tu étais sincère, tu te rappellerais, à chaque preuve d'amour qu'elle te donne, que tu ne la mérites pas. Tu saurais que ta faute ne devrait jamais être effacée. Tu te demanderais : qu'ai-je fait pour mériter une telle indulgence ? Après tout ce que tu as fait, comment peux-tu accepter si vite d'être pardonné ? Tu dis que tu seras infaillible dans ta loyauté, mais pourquoi cela devrait-il t'accorder une once de confiance ? Tu es comme un meurtrier qui demanderait la clémence en jurant qu'il ne tuera plus jamais. Si tu crois vraiment qu'il suffit de faire ce qui est juste pour effacer le mal que tu as fait, alors tu es encore plus vil que je ne le pensais.


La voix de Sorastrata s'était remise à trembler, de colère et de dégoût. Avec un soupir, elle s'appuya sur son bâton et dépassa Nydearin pour retourner en direction de la foule qui était presque dispersée à présent. Elle n'avait pas l'impression d'avoir accompli quoi que ce soit ; sa rage s'était épuisée et il ne lui restait qu'un sentiment amer, cette sensation d'impuissance qui ne l'avait jamais vraiment quittée. Nydearin et elle ne s'était jamais appréciés ni jamais vraiment écouté, et l'Ancienne connaissait son enfant. La pauvre Lysandre était véritablement amoureuse de ce misérable, à tel point qu'elle ne lui tenait aucune rancune pour tout ce qu'il avait fait. Même si ses paroles de ce soir avaient un effet sur le Garthésia, elle savait qu'il finirait par la faire souffrir. Même s'il était sincère, même s'il tentait sincèrement de lui être fidèle, Nydearin était un lâche, il l'avait prouvé sans faillir et il le montrerait de nouveau. Grand-Mère en avait assez de voir ses enfants souffrir, mais elle ne pouvait faire leurs choix pour elles. Elle ne pouvait que faire son devoir et leur offrir son soutien, rien de plus. Mais au moment de sortir de la rue, elle se retourna vers son beau-fils et tenta une dernière fois de lui parler, d'une voix fatiguée, vieillie.

Je n'ai que faire de tes souffrances ou de ton bonheur, Nydearin. Il n'y a qu'elle qui m'importe, et si tu veux vraiment son bonheur, tu te souviendras de ce que je t'ai dit aujourd'hui. Elle aurait beau te pardonner, tu dois savoir que des péchés comme les tiens ne doivent jamais être effacés ou apaisés ; dans ton coeur, ils doivent toujours être forts et ils ne doivent laisser aucune place, sinon tu les oublieras et tu les répèteras. Sois un bon époux, remplis ton rôle, c'est la seule chose que tu puisses faire. Mais ne t'avise jamais de croire que cela suffit.

Ces mots dits, elle reprit sa pénible marche vers les Olarils, laissant Nydearin à ses pensées et aux ombres de la ruelle. Peut-être voudrait-il la retenir et dire son mot, peut-être voudrait-il lui assurer qu'il lui obéirait ou qu'il n'avait que faire de ses leçons. Elle doutait vraiment de vouloir l'écouter. Elle avait fait ce qu'elle avait pu, mais elle se doutait que cela ne serait pas assez. Quoi qu'elle fasse, ce n'était jamais vraiment assez.
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MessageSujet: Re: Un simple avertissement   Un simple avertissement EmptyLun 16 Jan - 13:19

[HRP : Désolé pour le retard, j’ai été un peu occupé ces derniers temps pour me pencher en profondeur dans ce topic important pour moi.]

Il savait. Il ne pouvait le nier. Il avait suffit de sentir la marque de la gifle et la chaleur du très léger flot de sang qui en coulait pour en être assuré. Lysandre le lui avait dit, il s’y était attendu. Personne ne lui ferait de cadeau. Personne et la dernière à lui en faire un se tenait à présent en face de lui, prête à lui énoncer clairement ce qu’elle pensait de lui, dans des termes aussi tranchants que véridiques. Il ne s’attendait pas à ce qu’elle lui pardonne. Non, il aurait été insouciant et naïf de penser qu’elle serait prête à consentir cela pour lui, pas après ce qu’ils avaient vécu tous les deux. Elle ne l’appréciait pas, elle ne l’avait jamais apprécié, mais s’il avait pu mettre cela sur le dos de l’Ancienne par le passé, ce n’était plus le cas aujourd’hui et il en était pleinement conscient. Si les proches de sa bien-aimée lui tournaient le dos et auraient, sans doute, préféré le savoir mort, c’était de sa faute, de ce comportement inexcusable que tous et toutes viendraient lui rappeler dans un défilé incessant. Sorastrata serait certainement seulement la première d’une longue file. Luminara viendrait à son tour et n’hésiterait certainement pas à être encore plus acerbe que son aînée. Il comprenait cette haine et il la supporterait de ses épaules. Être aimé par eux n’était pas son but. S’ils préféraient le haïr pour ce qu’il avait fait, et bien soit, il comprendrait, mais on ne pourrait lui reprocher d’avoir tendu la main vers eux alors, qu’enfin, il sortait du brouillard. Il était peut-être trop tard pour eux qui avait essayé de l’aider mais ils n’avaient pas compris qu’alors, il n’avait jamais été présent, que son corps n’avait été qu’une coquille vide de son esprit perdu dans les méandres de la pensée et du temps n’ayant qu’une vague conscience de l’extérieur.

Lorsque l’Ancienne reprit la parole, ses paroles n’avaient pas perdu en force. Elle le détestait, c’était une évidence même. Rien de ce qu’il aurait pu dire ou faire ne ferait plus aucune différence à ses yeux. C’était bien dommage mais même s’il ne renonçait pas à prouver le contraire à tous ceux qui le dénigreraient, il n’y avait plus rien que des actes ou des paroles immédiats ne puissent altérer et surtout pas la volonté et l’antipathie de Sorastrata à son égard. Elle le considérait comme un moins que rien, tout au plus une vermine qui ne méritait rien de ce qui lui arrivait aujourd’hui, un insecte que l’on aurait mieux fait d’écraser lorsqu’on en avait encore l’occasion plutôt que de le voir revenir ramper devant soi. Tout était compréhensible et ces paroles posées auraient certainement pu l’atteindre plus profondément mais son esprit, s’il était réceptif à ces paroles, s’était depuis longtemps lourdement caparaçonné. Hésione lui avait permis de revenir parmi les siens, plus fort qu’avant, plus déterminé aussi, et ce qui aurait du depuis toujours s’imposer comme une vérité absolue l’était désormais dans son esprit. La Déesse Chasseresse lui avait montré la force qui sommeillait en lui et qu’il avait oublié, désarçonné face à ce nouvel environnement qu’était cette nouvelle vie, ces nouveaux gens, ce nouveau « monde ». Il s’était passé beaucoup de temps durant cet « exil » forcé et Lysandre avait atrocement souffert de tout cela, il en était pleinement conscient et louait encore Hésione d’avoir soufflé sur leur couple le vent de la réconciliation. Oui, il avait manqué à beaucoup de ses devoirs conjugaux. Oui, il ne méritait peut-être plus le titre d’époux. Oui, il n’était peut-être plus un homme. Mais cela ne l’empêchait pas de pouvoir se battre pour reconquérir ce qui fut sien un jour et redevenir ce qu’il avait été.

Il faudrait un peu de temps mais Nydearin ne désespérait pas. Au contraire. Il montrerait à tous qu’il était bien un homme. Il montrerait à tous qu’il était le digne époux de Lysandre Hirune. Et, par dessus tout, il montrerait à Lysandre elle-même, qu’il était bien tout cela, et bien plus encore. La volonté ne manquait plus dans son esprit où elle avait fait défaut un jour. Alors oui, ces derniers mois, la présence effacée du Grand-Prêtre pouvait passer pour de la lâcheté ou pour toute autre chose négative qui venait à l’esprit de l’Ancienne mais elle jugeait un homme sur le passé d’un autre qui, paradoxalement, n’existait plus. Il prit néanmoins sur lui de ne pas la reprendre. Sorastrata semblait avoir beaucoup de choses à dire encore et, par respect mais aussi parce qu’il n’y avait rien pour s’opposer à elle, il préféra s’abstenir et la laisser poursuivre jusqu’à ce que les derniers mots sortent de sa bouche. Sans ciller, son regard fixé dans le sien, il l’écouta lui faire comprendre à quel point il devrait culpabiliser de son erreur, louer les Dieux pour leur générosité de lui avoir accordé le pardon de Lysandre, de souffrir de l’amour qu’elle lui offrait et qu’il ne méritait plus désormais. Oui, une part de lui-même vivait ainsi, à la fois douloureuse et heureuse d’avoir été pardonné. Heureuse car cela signifierait des jours meilleurs, douloureuse car il n’avait clairement pas mérité une telle clémence. Pourtant, il fallait aller de l’avant et, par dessus tout, l’Olaril était convaincu qu’il pouvait récupérer ce mérite, obtenir à nouveau le droit au bonheur. On n’effaçait pas une ardoise lourde de « pêchés », comme le disait si bien l’Ancienne, mais on pouvait y rajouter du crédit pour alléger la note et rééquilibrer la balance. Cela prendrait du temps. Beaucoup de temps. Mais cela, il en avait. Ils en avaient.

Les derniers mots de la vieille femme retentirent dans son esprit pendant plusieurs instants et il la laissa le dépasser pour se diriger vers le théâtre. Ce n’est que lorsqu’elle se retourna pour lancer son ultime tirade que le jeune homme se retourna et fit face, déterminé. Elle avait raison, certainement à plus d’un point de vue mais s’il ne comptait pas effacer ses erreurs pour en tirer des leçons, il ne comptait pas non plus vivre dans leur spectre toute sa vie. Il fallait les dépasser, les surpasser et n’en tirer que la substantifique moelle qui faisait du passé une force, un appui pour le futur. Alors qu’elle se retournait à nouveau, le Grand Prêtre la rejoignit en quelques pas rapides et se posta devant elle. Dans son regard brillait de la détermination, un soupçon de colère mais également un éclat de compassion. « Tu me préfèrerais mort, dis-tu ? Alors pourquoi ne pas m’avoir fait mourir dans mon trou à rat ? Pourquoi ne pas avoir offert à Lysandre la possibilité d’une nouvelle vie loin de moi comme tu l’aspires tant ? Ce n’était pas les opportunités qui devaient manquer. » Il n’y avait pas de défi dans sa voix, simplement de l’interrogation. Il s’accroupit légèrement et tira une lame de sa botte, une courte dague de facture grossière mais suffisamment efficace pour se défendre. La prenant par la lame, il tendit la garde à l’Ancienne. « Voici l’occasion, selon tes dires, de libérer Lysandre de ma lâcheté. Tue moi. Je n’ai pas peur de mourir si tu penses qu’il s’agit de ce qu’il y a de mieux pour elle, au contraire, je l’accepterais le cœur léger mais assume tes responsabilités, tes choix et ces actes qui sont si chers aux Hirunes. » Son ton était déterminé mais nullement agressif. Son regard n’avait pas quitté Sorastrata. « Fais-le ou accepte de me voir à ses côtés, accepte ma lutte pour son bonheur, et je parle du sien, non du mien, accepte de penser que je serais plus utile pour elle vivant que mort. J’ai fait bien plus pour elle que n’importe quel Olaril pourrait faire pour son épouse et cela tu ne pourras me l’ôter. Jamais. » Il tendit un peu plus la dague vers elle. « Quel est ton choix Sorastrata ? Tout ce qui importe, c’est Lysandre, qu’importent nos souffrances, nos douleurs et notre bonheur. »
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MessageSujet: Re: Un simple avertissement   Un simple avertissement EmptyLun 23 Jan - 5:17

Elle ne voulut pas le regarder. Lorsqu'il s'interposa entre elle et le bout de la ruelle, bloquant son chemin et exigeant qu'elle l'écoute, elle se contenta de baisser la tête et de regarder le sol. Son visage était pris dans l'ombre de sa capuche et camouflait la lassitude qu'il affichait, l'exaspération devant ce qui était devenu une perte de temps. Elle avait dit son mot, elle avait sans doute même trop parlé et elle avait clairement fait comprendre qu'elle n'en cèderait pas un pouce ; alors pourquoi cet idiot voulait-il encore parler ? Etait-il si désespéré d'avoir son approbation ? A l'entendre demander pourquoi, elle se dit qu'il ne parlait peut-être que par fierté blessée, parce qu'il n'était pas satisfait du peu d'effet que ses plaidoyers avaient eu. Il ne lui restait plus que la rancoeur et il en revenait donc à des arguments puérils : "Si tu me hais tant, pourquoi tu ne m'as tué ?" ; il n'y avait pas si longtemps qu'elle avait entendu de tels mots venant de la bouche de Lysandre, dans sa prison, lorsque le Chef des Olarils lui avait dit que puisque personne ne l'aimait, elle allait abandonner les Tables à Mithra et s'humilier devant le Gardan Edorta, et qu'ainsi tout le monde serait content.

Grand-Mère n'était pas d'humeur à écouter un morveux geindre et pleurer dans ses jupes. Elle allait écarter le prêtre et poursuivre sa marche lorsqu'il se baissa et tira quelque chose de sa botte. L'Ancienne vit l'éclat de la lame et son corps se raidit par instinct, craignant presque que Nydearin cède à la folie et tente de répondre à ses menaces par la violence. Mais il fit quelque chose qui était peut-être pire.

A mesure qu'il parlait, elle leva la tête pour voir son visage et le regarder dans les yeux. Elle fut d'abord incrédule ; il ne pouvait être sérieux. Un tel chantage était trop vil, même pour un homme comme lui. Mais elle finit par comprendre qu'il était bel et bien sérieux, qu'il comptait vraiment la mettre face à ce choix et attendre jusqu'à ce qu'elle le tue ou qu'elle refuse.

Sorastrata sentit la bile lui monter à la gorge. Comment osait-il ? Comment osait-il ?! La vieille Chasseresse avait vu bien des choses répugnantes dans sa longue vie, elle avait vu des Olarils mentir et tromper, faire souffrir ceux qu'ils avaient autrefois aimés pour le seul plaisir de leur rancune, elle avait vu la jalousie mener des Chasseresses aux poings et même aux lames, elle avait vu le village entier menacer de se faire la guerre pour un titre, mais tout ceci ne lui avait pas inspiré autant de dégoût que ce que faisait à présent son beau-fils. Il n'y a pas pire acte aux yeux d'un Olaril que le meurtre, pas de péché plus inconcevable. Et c'était ce qu'il lui proposait de faire. Commets la pire des fautes ou accepte de me voir aux côtés de ta propre enfant, moi que tu vois comme le plus vil des hommes. Voici ce qu'il lui demandait, ce ver, et à voir son regard, il semblait très serein alors qu'il lui imposait ce choix.

Il ne lui avait pas fallu longtemps pour abandonner sa façade de noble pénitent. Sorastrata fit un pas en arrière, levant le bras pour mettre son bâton entre elle et Nydearin. C'était délibérément qu'elle l'avait foudroyé du regard il y a quelques minutes, en préambule à une accusation préparée, mais sa répugnance n'avait à présent rien de calculée. Etait-ce tout ce qu'il avait trouvé pour se faire pardonner, lui faire un chantage au meurtre ? Etait-il si immonde, ou simplement stupide, pour croire qu'un tel acte allait la faire changer d'avis ?

Elle ne sut comment réagir et fut bien tentée de le prendre au mot, d'enfoncer cette dague dans son coeur de traître et de débarrasser sa petite-fille de lui et de sa vilenie. Une foule d'injures et de malédictions se battait pour franchir la barrière de ses lèvres, mais elle savait que les mots n'y feraient rien. Elle lui avait dit tout ce qu'elle pensait, elle avait tout exposé de la colère qu'elle abritait en sa poitrine, et ce n'était pas la première fois qu'elle le faisait. Nydearin n'écouterait pas, il n'écoutait jamais. Déjà lorsque le village existait encore, encore lorsqu'il se complaisait dans sa misère et toujours aujourd'hui, alors qu'il se berçait d'illusions de rédemption, Nydearin n'écoutait que sa propre arrogance. Les yeux acérés de l'Ancienne retombèrent sur le pommeau de la dague qui était tendu vers elle.

Elle baissa de nouveau la tête. Le tuer n'y ferait rien non plus. Il en était bien conscient, le misérable ; il savait comme elle que prendre cette dague et le faire taire n'aurait aucun sens. Elle ne voulait pas rentrer dans son jeu pervers, elle refusait de davantage offenser les dieux par ce péché, mais plus que tout elle ne pouvait pas apporter une telle douleur à sa petite-fille. Lysandre avait déjà tant souffert, elle venait à peine de sortir de prison, de reprendre confiance en elle et de retrouver son époux. Comment Sorastrata aurait-elle pu lui infliger une telle chose ? Le prêtre d'Hésione le savait bien, il devait être certain que son chantage fonctionnerait et il se jouait cruellement de l'amour que la vieille Hirune portait à son enfant. Quel genre de créature pathétique était-ce là, quelle sorte d'être abject était-il pour faire une telle chose ? Etait-il si dévoré par la fierté pour vouloir gagner la dispute, pour vouloir reprendre son épouse à un tel prix ?

L'Hirune secoua la tête et puisa en elle toute la force qu'elle pouvait. Elle avait enduré pire que lui. Il n'obtiendrait rien d'elle, ni péché ni pardon.

Elle aurait pu le tuer, elle aurait pu le maudire, elle aurait même pu crier pour alerter la foule des Olarils et leur Chef, pour qu'ils viennent tous voir ce que Nydearin voulait lui imposer. Mais il ne méritait pas même cela.

Grand-Mère leva le visage vers le prêtre. Lentement, elle se racla la gorge et lui cracha en pleine face. Puis elle l'écarta de son bâton et reprit sa lente marche.

Elle sortit de la ruelle, sa tête toujours couverte de sa capuche, et elle se dirigea vers le groupe d'Olarils qui entourait Lysandre. D'une vieille main noueuse, elle ébouriffa les cheveux du fils de Liiken et embrassa sa mère avec affection. Elle prit Luminara dans une dernière embrassade et lui dit à nouveau combien elle était fière. Puis elle s'approcha de Lysandre et la regarda avec tristesse. Elle se pencha et lui murmura à l'oreille d'une voix éteinte.

Demande donc à ton mari ce qu'il vient de faire, et nous verrons.

Sans plus d'explications, elle se retourna et prit le chemin du retour avec la famille Aryassat. Elle ne savait pas comment Lysandre réagirait ; à vrai dire, elle s'attendait presque à ce que sa petite-fille pardonne à Nydearin cette nouvelle offense. Elle avait appris à ne rien attendre des dieux ces derniers mois. Les choses ne s'arrangeraient sans doute jamais vraiment pour le Chef des Olarils ou pour sa famille. Mais l'Ancienne n'avait pas le droit de s'y arrêter, elle ne pouvait pas dicter à ses enfants comment vivre et elle avait trop de devoirs pour se permettre de souffrir. Peut-être que Nydearin était un autre châtiment que Bakarne lui infligeait pour la punir de ses fautes. Elle aurait cru que lui enlever sa fille tant aimée et infliger le Feu au village aurait suffit.

Son pied glissa sur un pavé et seul le bras de Liiken l'empêcha de tomber à terre. Elle se sentait soudain vieille et fatiguée. Mais elle ne se donna pas le droit de protester. Comme tous les châtiments, elle devait l'accepter et continuer son office. Que lui restait-il d'autre à faire ?
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