Les Tables d'Olaria
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 De l'art de cajoler les cultures

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Gribus Sandragil
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MessageSujet: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyVen 15 Avr - 12:10

Les grandes occasions étaient toujours sources d'effervescence au Palais, tout autant pour les maîtres que pour les serviteurs. Au-delà des tracas que pouvait causer l'organisation de tels évènements, il y avait aussi l'excitation à l'idée d'être aux premières loges d'un rassemblement des hommes et femmes les plus puissants et les plus en vue d'Isle. Bien entendu, les domestiques du Palais vivaient chaque jour au contact de la noblesse, mais la Cour était un monde à la routine bien réglée, où les bouleversements d'envergure étaient rares : le Bal des Fiançailles du Gardan Edorta était autrement plus imprévisible, et chacun avait ses raisons d'être impatient. Que ce soit par curiosité, par admiration ou par loyauté, chaque serviteur voyait ceci comme une occasion précieuse entre toutes.

Gribus ne faisait pas exception. Le Bal était pour la Dissidence l'occasion de placer de nouvelles pièces sur l'échiquier, de se faire des amis et de repérer le terrain, notamment en ce qui concernait la future Reine, dont les enfants allaient un jour décider le futur du monde. En fonction de ce qui se passerait, le Scribe pourrait probablement bien se faire voir des Dissidents et enfin obtenir une autre position que celle de larbin à qui l'on ne disait que le strict minimum. A terme, peut-être pourrait-il même obtenir qu'on laisse les siens en paix. Sinon, il aurait également l'occasion de considérer d'autres opportunités pendant ce Bal : on avait jamais trop d'amis dans l'arène politique et le jeune albinos ne désespérait pas de trouver un jour une échappatoire qui ferait sortir la famille Sandragil des griffes de l'Al'Faret. En bref, il n'était pas excité ou impatient comme ses collègues, mais Gribus n'en était pas moins nerveux et prêt à en "découdre".

Il était donc bien dommage qu'il se retrouve coincé auprès d'Alagos Torandal. Le Scribe avait passé des semaines à préparer son approche de ce Nobliau, à lire ses œuvres et à étudier son caractère, mais il n'aurait jamais pensé que le convaincre aurait pris autant de temps. Le sieur Torandal était Noble, sa famille ayant obtenu le titre il y a une ou deux générations grâce à un exploit guerrier ; lui-même ne tenait pas beaucoup de ses ancêtres : c'était un homme charmant et très aimable, quand on considérait qu'il parlait avec un domestique, mais si inepte et soporifique qu'il aurait probablement amené le Fou à se pendre d'ennui. Sa seule valeur venait du fait qu'il était marié à l'une des dames de compagnie de la future reine, ce qui en faisait un angle d'approche parfait.

Après l'avoir étudié suffisamment, le Scribe avait décidé de l'approcher à l'occasion du Bal. Dans les premières heures de l'évènement, Gribus était resté auprès du roi, afin de l'assister et de lui fournir les noms et informations qu'il lui faudrait pour ne jamais être pris au dépourvu, mais le Gardan Edorta avait fini par congédier le jeune albinos, lui disant de profiter de la fête. Le seigneur Ysor avait l'air bien décider à en faire autant, au vu des regards discrets qu'il jetait à sa promise et des trésors d'ingéniosité qu'il déployait pour échapper à la Douairière. Le jeune homme ne s'était pas fait prier et s'était alors faufilé dans la foule à la recherche de sa première cible.

Il l'avait rapidement trouvé seul auprès d'un des buffets, apparemment très occupé à faire semblant d'apprécier la musique, moyen assez peu inventif de contrer la honte qu'il y avait à se trouver délaissé par l'intégralité des invités. Le sieur Torandal était un homme qui approchait l'âge mûr, au visage poupin et aux grands yeux naïfs, qui avait couvert sa discrète bedaine et sa petite carrure par un pourpoint d'une sobriété élégante, mais qui n'allait pas vraiment avec les exubérances que déployait le reste de l'assistance. Il avait l'air de s'ennuyer désespérément. Aussi fut-il intrigé lorsqu'il vit s'approcher un jeune homme portant la mise discrète des serviteurs et surtout la livrée blanche du Gardan Edorta, couleur qui allait avec celle de ses cheveux, reconnaissable entre tous.

Le Scribe s'était préparé de fond en comble et il aborda le Nobliau avec un professionnalisme sans ambages. Etant le Scribe personnel du roi, il pouvait s'abstenir de faire des courbettes devant un homme de ce rang. Saluant le sieur Torandal, Gribus lui annonça d'une voix posée que le Gardan Edorta considérait de l'inviter pour un entretien. Calmant immédiatement l'homme qui semblait prêt à s'évanouir de bonheur, le jeune albinos lui intima de ne pas laisser ceci s'ébruiter : ce n'était pour l'instant qu'une pensée qui trottait dans la tête du souverain, et il serait inconvenant de la part de l'invité de vouloir accélérer les choses. On ne force pas la main au Gardan Edorta ! Mais comme la possibilité était là, il était du devoir de Gribus de préparer cet éventuel entretien ; sortant ses notes, le Scribe engagea la discussion, posant des question au sieur Torandal sur sa réputation, sa famille et enfin ses travaux. Une demi-heure après, ils en étaient encore à ce dernier point.

Alagos Torandal était féru d'agriculture, c'était sa grande passion, et le jeune albinos avait laissé entendre que c'était sur cela que porterait l'entretien, suggérant que la curiosité bien connue du roi s'était portée sur ce sujet. Bien entendu, l'agriculture était une chose dont on ne parlait jamais à la Cour, et c'était de plus un domaine qui n'avait pas cours dans une Cité assiégée. Inutile de dire que le sieur Torandal ne verrait jamais le commencement de cet entretien. Mais Gribus avait espéré que ce sujet le rendrait plus avenant et qu'il pourrait ainsi amener plus facilement le sujet de sa femme. Elle était dame de compagnie de la future Reine, il était donc normal qu'on en parle à propos de cet entretien, mais le Scribe devait obtenir plus que des renseignements de base : il devait savoir comment l'on pouvait se servir d'elle comme point d'accès à Lis Diantha.

Malheureusement, la discussion en était coincée à l'art délicat de l'irrigation et au dilemme insoutenable de l'engrais à utiliser pour stimuler la croissance de l'orge. Le jeune albinos n'avait bien entendu pas changé d'expression tout du long, gardant le masque impassible du serviteur dévoué, mais intérieurement il avait une envie montante de couper la parole au Nobliau d'une remarque cinglante avant de passer à autre chose. Avec peine, il ravala sa frustration et regarda alentours brièvement. Il était en train de perdre son temps à présent, et il perdait de précieuses secondes qu'il aurait pu passer à exploiter les autres opportunités du Bal. N'y avait-il pas un scandale à proximité, une catastrophe qui lui permettrait de s'échapper, ne serait-ce que brièvement ? Il pourrait revenir au sujet de l'épouse après le Bal et il avait d'autres chats à fouetter ici que la passion d'Alagos pour les enclos à vache !
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Charis Sandragil
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptySam 30 Avr - 14:54

L'arrivée des Arcarian au Bal fut des plus conventionnelles. Si Skadi était très enthousiasmée à l'idée de participer au Bal, Enlil l'était nettement moins. Toutefois, en regardant leurs vêtements or et gueules, couleurs du nouveau blason dont l'usage voulait qu'ils se dotent, et qui représentait une corne d'abondance débordant de fruits et de pièces, Charis se fit la réflexion que la Noblesse leur allait bien. Ses parents savaient porter le lourd artifice du Haut de la Ville avec naturel, et elle se réjouit en pensant qu'ils ne feraient pas pâle figure au milieu du Bal. Elle-même ne s'était pas vêtue selon leurs couleurs, parce qu'elle avait l'impression qu'elle se couvrirait de ridicule en suivant l'exemple de ses parents. Autant cette tenue leur allait à merveille, autant elle aurait été déplacée sur elle. Alors, elle avait opté pour la simplicité et l'élégance. Elle avait choisi une robe noire tirant sur le mauve – le noir était toujours seyant – laissant son dos quasiment nu, seulement couvert par quelques entrelacs, et drapant joliment son corps. Elle avait passé autour de son bras un somptueux ensemble de dentelles noires, mauves et bordeaux, avec même l'une ou l'autre touche de bleu. Ses escarpins, qui apparaissaient à peine sous la courte traîne de sa robe, suivaient la dernière mode. Charis s'était débrouillée pour paraître à son avantage, mais c'était tout. Ce qu'elle avait choisi, elle le savait, était parfait pour la discrétion à laquelle elle aspirait : les gens la trouveraient jolie et bien vêtue au premier regard et... il n'y en aurait pas de second, parce qu'ils ne verraient rien qui puisse attirer leur intérêt.

Soudain, la main de son père se posa sur son épaule. Il lui fit un grand sourire, un de ceux dont il avait le secret, pour lui remonter le moral. Sachant que ce n'était guère le moment des grandes embrassades, elle se contenta de lui sourire à son tour, puis se retourna vers l'aboyeur, l'air décidé. Elle allait tenter de profiter de sa soirée – soirée pendant laquelle elle ne pourrait pas faire grand chose, du fait qu'elle était là sous son véritable nom – et faire honneur à son nom. Leurs noms furent annoncés et ils pénétrèrent enfin la Salle de Bal. L'endroit était magnifique, il fallait bien le reconnaître. Et Charis sourit en pensant qu'elle connaissait presque tout le monde, mais que personne ne la connaissait, elle. Un geste démentit aussitôt cette pensée : de loin, le Petit Prince lui adressa un sourire qui étonna la jeune femme. Ses yeux s'adoucirent, et elle inclina brièvement la tête.

Au fond d'elle-même, Charis était presque déçue de ne pas pouvoir profiter du Bal. Elle avait l'impression d'aller voir un spectacle de marionnettes. En outre, elle détestait les pouilleux, et savoir qu'ils seraient là au grand complet pourrissait en avance sa soirée. Et elle regrettait de ne pas être une jeune fille anonyme rêvant du prince charmant et attendant l'événement depuis longtemps. Il lui suffisait de jeter un coup d'œil aux autres Nobles auxquelles elle avait été présentée depuis son anoblissement : elles étaient toutes parées de leurs plus beaux atours, devenues l'espace d'une soirée les princesses de leur rêve. Charis se promit de retarder le plus possible le moment où elle devrait aller les saluer. Elle savait que sa mise contrasterait férocement avec elles.

Très vite, ses parents furent invités dans des cercles fermés auxquels Charis n'était pas conviée. Elle se retrouva donc seule, ce qui ne la dérangeait pas. Un verre de liqueur à la main, elle s'adossa tranquillement à l'un des vastes piliers, pour observer enfin les relations qui s'instauraient entre les invités. C'était malheureusement tout ce qu'elle serait en mesure de faire. Elle commença par jeter un coup d'œil vers les Olarils. Certains parvenaient à faire illusion, mais d'autres étaient terriblement déplacés. Un peu comme la putain Olarile qui épousait leur Gardan Edorta... Venhilde Tehanii connaissait-elle seulement le passé de cette femme ? L'aurait-elle ainsi accueillie, si elle avait su ? Charis but une petite gorgée de son verre. Son regard obliqua vers la Générale des Armées, qui semblait plongée dans une grande discussion avec l'Inventeur. Elle repéra ensuite la Douairière, qui semblait plus dure que jamais. La toute nouvelle Dissidente, Meare Askarii, discutait avec une Olarile. Et... le Fou. Charis se sentit soudainement mal à l'aise. Elle avait toujours aimé le Fou, jusqu'à ce qu'il laisse cette énigme en suspens entre eux. Elle n'était jamais venu le trouver pour lui donner sa réponse, parce qu'elle était persuadée qu'il lui tendait un piège. Pourvu qu'il ne vienne pas lui parler ! Enfin, normalement, il n'avait aucune raison de le faire...

Son verre était déjà terminé. Elle fit quelques pas vers la table la plus proche, pour le rendre à une domestique. Alors qu'il ne lui restait plus que quelques pas à parcourir, un homme – un Olaril, évidemment – la bouscula violemment. L'homme – qui en fait ne devait pas être beaucoup plus âgé qu'elle – courait – déjà, on ne court pas dans une salle de Bal – pour rattraper... un grain de raisin ? Mais... à quoi pensait-il ? Quel jeu stupide lui paraissait plus important que l'image de son peuple ? Ils n'avaient pas été suffisamment avertis ? En tant normal, Charis serait sans doute parvenue à se rattraper, mais elle avait oublié une donnée primordiale : ses talons. Elle perdit l'équilibre et se retrouva au sol avant d'avoir eu le temps de réaliser ce qui lui arrivait. Dans sa chute, elle laissa échapper son verre, qui se brisa en mille morceaux dans un grand bruit. Charis se pétrifia. Toutes les conversations alentours cessèrent et les regards convergèrent vers eux. La honte lui brûla les yeux. Pourquoi fallait-il qu'à cause de cet imbécile, elle soit la cible de toutes les moqueries ? Pourvu qu'on reconnaisse l'Olaril et son manque de savoir-vivre, et qu'on ne l'accuse pas elle ! Pour passer inaperçue, c'était déjà raté.

Et pourtant, à peine une poignée de secondes s'étaient écoulées que déjà, quelqu'un se penchait vers elle et l'aidait galamment à se relever, alors que les domestiques s'empressaient déjà de ramasser les débris. L'Olaril paraissait désolé – qu'il aille se faire pendre. Heureusement, l'incident semblait déjà oublié, puisque toutes les discussions autour d'eux reprirent aussitôt. Elle voulut sourire à celui qui lui avait tendu une main secourable, et faillit s'étrangler en découvrant son identité. Mais qu'avait-elle fait pour mériter pareille situation ?!

Gribus Sandragil. Entre tous, il avait fallu que ça soit lui.

Si elle avait pu, Charis se serait enfoncée à six pieds sous terre. Il ne pouvait pas savoir qui elle était, mais tout de même... D'ailleurs pourquoi s'était-il porté à son secours ? Il voulait jouer le joli cœur, ou quoi ? Ce n'était pourtant pas du tout son genre, si Éléni avait bien cerné le personnage... à ceci près qu'Éléni ne l'avait jamais vraiment compris, justement.

Quelle poisse.
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Gribus Sandragil
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyDim 15 Mai - 23:38

Ce fut au moment où le sieur Torandal allait évoquer son grand plan de réhabilitation de l'élevage porcher que l'oeil aiguisé de Gribus vit son salut arriver, à grande vitesse qui plus est. Dans la foule des courtisans se creusait une haie d'honneur pour laisser passer ce qui semblait être le roi des malotrus : un homme barbu, dont les vêtements de cuir et de laine disaient son origine, était en train de courir en pleine salle de Bal, les yeux rivés sur le sol de marbre comme s'il poursuivait une souris. Les invités le suivaient du regard, médusés, et le Scribe constata avec soulagement qu'Alagos s'était lui aussi interrompu pour contempler le singulier spectacle, mais arriva alors quelque chose qui acheva de secourir le jeune homme.

L'Olaril, tout à sa course éperdue, finit par bousculer une personne, une jeune femme semblait-il, qui perdit l'équilibre et tomba à la renverse, laissant tomber son verre qui se brisa sur les dalles du parterre. L'étranger s'arrêta net et afficha un air confus, apparemment surpris que son comportement brutal ait eu des conséquences. La jeune femme le fusillait du regard tandis qu'autour d'elle, les invités sortait de leur stupeur et commençait à murmurer, à prendre des mines amusées et à montrer la scène du doigt. Le sang du jeune albinos ne fit qu'un tour : il ne pouvait laisser à son vis-à-vis le temps de faire un commentaire et de reprendre la conversation. Fendant la foule d'un pas leste, il s'approcha de la jeune femme et lui tendit une main charitable tout en esquissant un sourire poli. Elle accepta son aide mais continua de foudroyer l'Olaril, qui hésitait à dire quelque chose, totalement perdu face au protocole Ilédor. Fort heureusement, la Cour se chargea de le guider vers la suite logique lorsqu'un jeune Noble posa la main sur son épaule avec franchise et l'entraîna vers un groupe de ses amis, qui affichaient tous des sourires carnassiers. Gribus ne lui prêta pas attention ; l'étranger allait recevoir ce qu'il méritait auprès de ces jeunes fauves, qui allaient probablement le ridiculiser de manière si charmante qu'il ne s'en rendrait même pas compte.

Le Scribe revint à la jeune femme, qui semblait à son tour confuse. C'était peut-être l'étrange couleur des cheveux de son sauveur, mais ce dernier ne prit la peine de s'offusquer, préférant la regarder droit dans les yeux et prendre un ton de sollicitude.

Vous êtes-vous blessée, mademoiselle ?

La jouvencelle en question n'avait rien de bien extraordinaire et affichait une mise plutôt modeste et discrète. Elle n'était pas assez richement habillée pour être une Noble de haut nom et avec trop de goût pour être une Bourgeoise ; Gribus en déduisit qu'il s'agissait probablement d'une fille d'une famille mineure. Il faudrait qu'il tâche de fouiller mentalement ses notes et de la reconnaître, mais pour l'heure il avait plus urgent à faire. Un bref regard lui indiqua qu'Alagos Torandal était aussi tenace qu'ennuyeux, car il n'avait pas renoncé et traversait les rangs des convives pour le rejoindre.

Son masque parfait de domestique se para d'une nuance de gêne tandis qu'il adressait la parole à la jeune Noble.

Pardonnez-moi de vous présenter cette requête, et je puis vous assurer que ce n'est pas dans mes habitudes, mais...pourriez-vous jouer le jeu ? J'ai besoin de me débarrasser poliment de...

Monsieur le Scribe, quel galant homme vous faites ! Vous venez au secours des demoiselles comme un chevalier des temps anciens, quand le pays n'était fait que de champs ! La dame pourra peut-être nous aider à achever le débat sur le meilleur engrais pour...

Gribus se retourna lentement vers le Nobliau, un sourire parfait aux lèvres, se répétant qu'il devait tout faire pour l'accommoder. Il aurait très bien pu lui couper le sifflet il y a une dizaine de minutes en prétextant une quelconque tâche urgente, il aurait pu l'arrêter sèchement et lui dire avec sévérité que le Gardan Edorta examinerait ses propositions, il aurait tout simplement pu le planter là et en finir. Mais il ne s'agissait pas simplement d'établir le contact, il fallait qu'Alagos Torandal lui mange dans la main, qu'il le considère comme son meilleur ami et qu'il soit prêt à tout lui dire. Obtenir accès à la Future était pire qu'urgent, car la Révolution allait bientôt apprendre l'identité des enfants, si ce n'était déjà fait. Qui obtiendrait le premier l'accès à la mère des Héritiers pourrait gouverner le futur d'Isle, et une telle victoire pourrait obtenir un peu de sursis à la famille de Gribus.

Le jeune homme n'eut donc aucun mal à se forcer à feindre le regret et le ton cordial nécessaire lorsqu'il coupa enfin la parole au Roi des Pâturages.

Messire Torandal, veuillez m'excuser de vous interrompre, mais par un heureux hasard, Mademoiselle se trouve être également une personne avec qui je devais m'entretenir. Je suis navré d'interrompre une leçon que je serais ravi de reprendre plus tard, mais comprenez que je n'ai qu'une nuit pour m'acquitter de ces devoirs...

La voix du Scribe n'avait pas une once de supplice, pas un signe de flagornerie qui pourrait indiquer ses vraies intentions, rien que l'obéissance courtoise du domestique, mais cela n'allait peut-être pas suffire. Torandal était terriblement amical en plus de tout le reste, et rien ne disait qu'il veuille participer à la conversation comme le malotru inconscient qu'il était. Tout dépendait de la bonne volonté que la jeune femme mettrait à jouer le jeu et à exclure Alagos de la conversation.
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Charis Sandragil
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyMer 8 Juin - 14:34

Mais il était carrément aimable ! Sa langue la brûlait, et elle était sur le point de lui jeter une de ces piques acides dont elle avait le secret. Mais Charis Arcarian avait été parfaitement éduquée et savait se comporter avec civilité ; aussi prit elle appui sur la main secourable que Gribus Sandragil tendait vers elle, et se releva vivement. Avec simplicité, elle répondit :

- Non. Je vous remercie.

Combien ces mots lui coûtaient ! Elle n'aurait jamais cru qu'ils sortiraient de sa bouche un jour. Et pourtant, c'était vrai : elle lui était reconnaissante d'être venu à son aide. Finalement, le scribe n'était pas aussi implacable qu'elle le pensait.
...
Elle retirait tout ce qu'elle venait de penser. Tout s'expliquait : rien n'était anodin. Elle aurait dû le savoir. Comment avait-elle pu se laisser aller à imaginer que Gribus Sandragil jouait ainsi les chevaliers servants sans aucune nécessité ? L'évidence la fit pourtant sourire : elle avait au moins compris ce côté-là du scribe. C'était comme si elle retombait sur ses pattes, en territoire connu. Jouer le Jeu, disait-il ? S'il avait su à qui il s'adressait, il n'aurait sans doute pas choisi ces mots-là. Il n'aurait probablement pas fait de requête tout court, d'ailleurs. Pourquoi s'intéressait-il à Alagos Torandal ? Éléni le connaissait comme un Noble dépourvu d'intérêt. Il n'avait pas le courage nécessaire pour se mouiller dans un mouvement comme la Dissidence, ce qui l'avait naturellement écarté de ses réseaux d'informations, qui gardaient un œil sur lui au même titre que tous les autres Nobles. Tant qu'il ne faisait rien d'anormal, rien sur lui ne remontait vers elle. Sa famille n'avait guère plus d'intérêt que lui : une femme conventionnelle à en mourir, un fils tout juste bon à porter un nom, une fille bientôt mariée à une Maison de noblesse égale.

À moins que ce ne soit Alagos Torandal qui ait été l'intéressé ? S'il s'était intéressé à Gribus Sandragil ? Et que celui-ci ne parvenait pas à s'en débarrasser ? Voilà une situation qui paraissait loufoque, presque impossible. Après tout, le Scribe ne sortait jamais de son rôle de « serviteur du Gardan Edorta ». Elle regarderait tout ça de plus près après le Bal.

Pour l'heure... eh bien Charis Arcarian ne voyait aucun inconvénient à jouer le jeu. Depuis qu'elle avait connu les cachots du Gardan Edorta, elle ne jouait plus, mais là, c'était inoffensif. Quand le noble Torandal s'approcha d'eux, et remit le grappin sur le scribe avec une Volonté des plus marquées, Éléni se composa un visage très sérieux, tout à fait celui de la jeune femme en pleine négociation, qui met tout son cœur innocent dans les pourparlers. Hors de question de jouer la maîtresse de Gribus Sandragil, il ne fallait pas non plus exagérer. Elle se tourna vers Alagos Torandal avec un regard de parfaite surprise, pendant que le scribe tentait d'expliquer qu'il devait s'entretenir avec elle. Les traits de Gribus Sandragil étaient parfaitement lisse, dénués de toute expression. Ce visage, elle le connaissait bien : c'était celui auquel Éléni avait tout le temps affaire. Et la performance la conforta dans l'idée que oui, il fallait placer Gribus Sandragil sous une surveillance renforcée, parce que son langage corporel ne l'aiderait pas à déceler un mensonge. Il était impossible de déchiffrer ses pensées, et la facilité avec laquelle il allait berner Alagos Torandal était effrayante pour l'informatrice.

Alors qu'Alagos Torandal la regardait, visiblement pour savoir quelle était l'affaire qui retenait le scribe, Charis adopta exactement l'attitude de la jeune femme si douce et si gentille qu'on ne peut rien lui refuser. D'un air confus, elle porta sa main devant sa bouche et s'excusa :

- Oh, je suis vraiment désolée, je ne voulais certainement pas vous couper... C'est seulement... tout ceci me tient tellement à cœur, et comme le seul interlocuteur qualifié de ma connaissance pour m'aider à faire de ma plaidoirie une arme qui puisse réellement convaincre ma Maison de... oh, mais je ne voudrais pas vous importuner avec mes soucis...

Il n'en fallut pas plus. Aussitôt, Alagos Torandal se fendit d'un large sourire paternel. Il hocha la tête d'un air compréhensif, conquis, et s'inclina légèrement devant Charis :

- Vous n'avez pas à vous expliquer. Tout plutôt que de voir de la peine dans vos yeux ! Je cède le pas à votre innocente jeunesse, et nous terminerons une autre fois, monsieur le Scribe. Je vous laisse en charmante compagnie !

Il rejeta sa cape sur son épaule d'un geste théâtral et partit. Charis Arcarian le regarda s'éloigner et devina le soulagement du scribe plus qu'elle ne le vit. Elle reprit contenance et l'observa d'un air neutre. Elle ne voulait pas l'accaparer toute la soirée – ça aurait été le bouquet, qu'elle passe la soirée à deviser avec Gribus Sandragil – mais il allait bien falloir qu'il reste un peu avec elle, s'il ne voulait pas qu'Alagos Torandal revienne au pas de course. Dans un sourire, elle demanda :

- Alors, monsieur le scribe, je suis curieuse de vous entendre. Quel genre de personne êtes-vous d'habitude ?

Si, comme vous l'avez affirmé, vous n'avez pas « ce genre d'habitudes », en général...
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyMar 5 Juil - 23:14

Le regard de Gribus alla du nobliau à la jeune fille tandis que celle-ci jouait son rôle avec talent, prenant son plus innocent ton pour raconter une histoire taillée pour éveiller la sympathie. Par chance, l'impolitesse d'Alagos Torandal avait des limites et il s'éclipsa avec courtoisie lorsque la conversation menaça d'échouer sur des sujets personnels. Le Scribe le salua d'un respectueux signe de tête tandis que l'expert en cultures s'enfonçait dans la foule d'un pas enjoué, fier comme un coq d'avoir un illusoire rendez-vous avec le Gardan Edorta.

Le jeune albinos tourna son visage impénétrable vers la jeune Noble et l'orna d'un sourire poli, mais elle prit la parole avant qu'il ne puisse prendre congé. Il avait espéré pouvoir la remercier rapidement et retourner à son travail, mais il semblait bien qu'il avait échangé une distraction pour une autre. Il y avait cependant deux différences cruciales entre ces deux contretemps : cette jeune femme semblait autrement plus gracieuse que le fat empressé qui venait de tirer sa révérence, et surtout elle était pour l'instant une inconnue. Le sieur Torandal était connu dans toute la Cour comme un homme sans influence aucune, qu'on prenait encore moins au sérieux que le Fou en personne. La jeune Noble qui tournait à présent vers le Scribe un regard intelligent pouvait être n'importe qui, elle pouvait être au centre d'un précieux réseau de relations et elle pouvait très bien être Dissidente. Gribus était d'ailleurs légèrement frustré de ne pas pouvoir mettre un nom sur ce visage, et finit par se dire que toute opportunité était à saisir.

Se rappelant l'effet que ce tour avait eu sur une jeune Olarile il n'y a pas si longtemps, il laissa subtilement son masque s'estomper et eut un sourire où perçait une note de soulagement. S'il pouvait convaincre la jeune femme qu'il laissait tomber les apparences pour elle, il n'en serait que plus aisé d'avoir sa confiance. C'était grâce à Eléni et à sa myriade de déguisements qu'il avait eu cette nouvelle idée ; après tout, il ne suffisait pas de ne laisser rien paraître : pour réussir dans ce monde, il lui faudrait aussi apprendre à tisser des faux-semblants élaborés, des mensonges qui s'échafauderaient sur plusieurs niveaux. La jeune Noble serait un coup d'essai, afin de voir s'il lui suffisait de paraître moins fermé pour qu'on croie être dans sa confidence.

Avec une expression un peu gênée, il répondit à la jeune femme.

Pas une personne qui importune les autres, et je vous prie de nouveau de m'en excuser. Merci pour votre aide. Il peut arriver que même les gens les plus distingués deviennent importuns.

Il marqua une pause délibérée tandis qu'il laissait son regard s'attarder sur ses traits. Il n'était vraiment pas aisé de la placer : son visage n'avait que peu de traits distinctifs, bien qu'il soit rendu gracieux et élégant par les discrètes touches de maquillage. Il aurait eu du mal à la reconnaître même s'il avait su son nom.

Mais je manque à tous mes devoirs. Je suis Gribus Sandragil, Scribe du Gardan Edorta, à votre service.
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyDim 11 Sep - 13:10

Ainsi, il voulait des présentations officielles ? Poliment, Charis Arcarian lui tendit sa main gantée, afin qu'il suive l'étiquette et l'effleure de ses lèvres. Elle faillit rougir en songeant qu'elle était, elle, en train de se présenter à un homme qu'elle connaissait depuis longtemps, mais avec plus de sincérité et de vérité qu'elle ne l'avait jamais fait. D'une voix qui ne tremblait pas, mais qui contrastait férocement avec l'habituelle fierté arrogante des Nobles déclamant leur nom, elle se fit connaître :

- Je suis Charis Arcarian, de la récemment nommée Maison Arcarian.

Elle n'avait aucune honte à dire qu'elle appartenait à la Noblesse de Rang ; présenter les choses sans artifices faisait partie des habitudes de Charis Arcarian. Elle n'avait aucun problème avec le fait d'appeler un chat un chat. Il s'agissait d'ailleurs d'une étrange qualité en totalement contradiction avec le rôle d'Éléni, qui camouflait tout sous un vernis d'apparences. C'était sans doute ce qui lui permettait de ne pas se perdre entre tous ses personnages : elle se jugeait avec une relative justesse, ne se faisant pas plus blanche qu'elle ne l'était. Elle savait que tout se payerait un jour, et qu'Éléni n'était pas – plus – un jeu. Elle songea que la phrase du scribe, « à votre service », était plus vraie qu'il le pensait. Pour une fois, les usages conféraient à des mots anodins une réalité bien tangible, et elle en sourit. Elle répondit gentiment :

- Ne vous préoccupez donc pas pour cela. J'estime que nous sommes quittes.

Charis lui offrit un sourire franc, dénué de toute ruse. Ensuite, elle regarda un bref instant autour d'elle, parcourant du regard les invités, repérant l'Olaril qui l'avait bousculée. Il était la cible de moqueries, maintenant, et elle se sentit satisfaite. Du coin de l'œil, elle distingua Limna Hirune, près de la Promise. Les assassins n'avaient donc toujours pas eu sa peau. Et voilà qu'elle avait couru chez les Conservateurs, quelle surprise...

Charis n'en revenait toujours pas d'avoir dit son plus grand secret à Gribus Sandragil. En fait, il était le premier Dissident à également la connaître sous sa véritable identité. Charis s'était volontairement tenue éloignée de Keesa, Meare et d'autres Nobles, dont elle aurait pourtant pu gagner l'amitié sans trop de difficultés. Mais quelle était la probabilité que le scribe parvienne un jour à reconnaître ses traits ? Nulle, elle voulait s'en convaincre. Son regard rencontra un instant celui de Gribus Sandragil, et elle se surprit à penser qu'elle préférait cette attitude sympathique à celle, renfermée, qu'elle côtoyait.

Elle n'avait pourtant rien à lui dire. Elle ne souhaitait pas se confier, elle ne pensait même pas à batifoler. Elle ne voulait rien partager avec lui, mais un silence trop long aurait été suspect. Qu'aurait demandé une jeune Noble de son Rang ? Pour une fois, le choix d'une conversation s'avérait difficile. Charis Arcarian était sous sa véritable identité, ce qui l'empêchait de jouer la petite grue sans cervelle. Question d'amour-propre, tout de même.

- Vous êtes de service, même le jour des Fiançailles ? En tant que scribe, vous devrez rédiger quelque chose de particulier, après ce Bal ? Pour les Chroniques ?

L'union prochaine du Gardan Edorta était tout de même suffisamment importante pour entrer dans l'histoire d'Isle. Toutefois, Charis Arcarian n'avait aucune idée de la personne qui était censée tenir à jour les Chroniques. Il lui semblait évident qu'il s'agissait du rôle du Scribe, mais peut-être était-elle dans le faux. À bien y réfléchir, cela demandait beaucoup de temps, temps qu'un scribe aussi occupé que celui du Gardan Edorta n'avait pas. Et au fond, peu lui importait. Tout ce qui comptait vraiment, c'était de rapidement mettre fin à sa discussion avec Gribus Sandragil, puis de reprendre l'observation des autres Nobles présents.
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyMer 14 Sep - 4:13

Tout en se penchant pour offrir à la jeune femme le baisemain, Gribus songea à la tromperie qu'il était en train de tisser, à des détails, des mimiques pour étoffer le mensonge et le rendre plus crédible. Il tâcha de paraître un peu empressé, un peu maladroit, pour suggérer le malaise du jeune domestique à sa première grande occasion. Il se dit vite que l'astuce n'avait pas grande valeur pour quelqu'un qui le connaissait un tant soit peu : il avait servi deux rois et le Palais était sa demeure depuis plusieurs années, ce n'était pas un Bal qui allait le faire transpirer, du moins pas de peur. Toutefois, il lui suffit d'entendre les mots suivants pour se dire que son masque devrait tenir.

Arcarian...il ne reconnut pas le nom, bien qu'il soit sûr de l'avoir déjà entendu quelque part. Il n'était pas si commun de voir des anoblissements ces temps-ci, avec le siège, mais la mémoire de Gribus était très sollicitée depuis son entrée dans la Dissidence. Il se fit un bref reproche intérieur et porta son esprit sur ce qu'il pouvait savoir. Murmurant un « Mademoiselle » respectueux, il prêta attention au ton que la jeune fille avait employé, à sa voix calme, confiante mais sans arrogance ou défiance. Enfin un trait distinctif, inhabituel même : la drôlesse venait à peine de quitter la bourgeoisie, elle était plongée dans la Cour et en face d'un des plus proches serviteur du Gardan Edorta en personne, et pourtant on ne l'aurait jamais cru, à l'entendre. Il n'y avait pas de peur dans ses mots, rien de la nervosité qu'on aurait pu attendre, ni de la fierté excessive qui voudrait compenser la jeunesse de son titre. Charis Arcarian n'était pas une simple oie blanche venue s'émerveiller au Bal et Gribus se demandait bien où elle avait pu acquérir tant de force.

Son statut de nouvelle arrivée offrait cependant un avantage à Gribus ; elle ne savait rien de lui et il pouvait donc se faire passer pour ce qu'il voulait. Continuant de bâtir son image de jeune servant inquiet, il se redressa et jeta un ou deux regards nerveux alentours, cherchant une figure d'autorité qui viendrait lui reprocher de négliger ses devoirs. Fort heureusement pour lui, pauvre jeunot qu'il était, la Noble demoiselle lui offrit un sourire et un commentaire rassurants auxquels il répondit avec un soulagement qu'il espérait rendre sincère. Feindre une humeur était bien plus ardu que de la dissimuler, il s'en rendait bien compte, et le Scribe craignait d'en faire trop, de parer son visage d'une grimace plutôt que d'un sourire.

La jeune Noble engagea la conversation et Gribus tâcha de prendre un air plus posé, plus docte, ce qui lui fut facile étant donné le sujet.

Les grandes journées sont les plus chargées pour les serviteurs, Noble demoiselle. En tant que Scribe, je dois être la mémoire du Roi, lui rappeler les noms des invités qui auront la chance de lui parler, accueillir les uns, rejeter les autres, et porter ses messages, comme vous avez pu le voir avec le sieur Torandal. Quand aux Chroniques...je porte ma plume et du papier partout où je vais, et ils se souviennent des journées de Monseigneur Ysor, mais ce ne sont que des notes : je n'ai ni le temps ni la charge de les transcrire en un récit. Ce sera à un autre genre de Scribe de s'en acquitter, un homme avec plus de talent pour les bons mots.

Il venait probablement d'en dire plus en une minute qu'il n'en avait dit pendant toute la soirée. Le jeune albinos ne se croyait pas capable d'être si loquace, et pourtant...Il ne s'était pas contenté de disserter sur ses devoirs avec un visage impassible, comme il aurait pu le faire à l'accoutumée. Au contraire, il s'était appliqué à suggérer des pensées, des opinions derrière ses paroles : la modestie qui se faisait fausse en devenant audible, le sourire indulgent devant l'erreur de la jeune fille, qui croyait qu'on donnait quartier libre aux domestiques, et même une touche de soupir à l'évocation des Chroniques, qui seraient l’œuvre d'un véritable artiste et pas d'un laquais comme lui...Gribus se laissa presque aller au plaisir de son propre mensonge, surpris qu'il était de se voir si facilement endosser les manières d'autres. Il avait emprunté des expressions à certains de ses collègues, une voix faite pour les confidences dans les quartiers du personnel, une pincée d'exagération comme il en avait vu des centaines de fois dans les gestes d'un acteur de rue, ceux qui feignaient vraiment, pas ceux qui pontifiaient lors des pièces historiques au Grand Théâtre. Mais son meilleur professeur, il s'en rendait compte, était Eléni. Sans son visage changeant, ses manières incertaines, il n'aurait jamais eu l'idée de changer le ton de sa voix et les tournures de son langage, jamais il n'aurait contemplé les vertus du mensonge.

Mais le Scribe ne se livrait pas à ce jeu pour le plaisir, bien que son étonnement soit, lui, sincère. Il ne faisait pas que servir le Gardan Edorta lors de ce Bal, et il en avait assez de n'être qu'un jouet dans les mains de la Dissidence : il était temps d'obtenir plus que leur collaboration méfiante, et pour ce faire il lui faudrait des résultats. Charis Arcarian pouvait sembler n'être qu'un maigre début, mais elle venait d'arriver à la Cour, elle était donc inconnue, ce qui pouvait être un avantage pour qui savait l'exploiter, et la jeune fille ne semblait pas incapable en société. Qui savait, peut-être avait-elle déjà acquis de l'influence ailleurs, peut-être était-elle même déjà Dissidente ? Et même si ce n'était pas le cas, si elle venait à avoir un quelconque pouvoir à la Cour, il ne ferait pas de mal au Scribe d'être dans ses bonnes grâces. Sonder les opinions était la première étape du recrutement, et il n'était pas bien difficile de le faire innocemment.

Gribus fit un nouveau sourire, timide mais sans nervosité cette fois, et jeta un coup d'oeil à la dérobée vers le roi des malotrus à qui ils devaient cette conversation. Le pauvre Olaril était à présent rouge de honte et de colère, au beau milieu d'un concert de rires moqueurs, et partout où il allait il se trouvait quelqu'un pour lui lancer une nouvelle pique à la face. Tout en se demandant si le barbare allait finir par perdre son sang-froid et faire couler le sang, le jeune albinos revint à Charis et marqua un moment d'hésitation, pour montrer que le pauvre serviteur qu'il était n'osait pas tout à fait parler en premier à la Noble demoiselle.

Et...comment trouvez-vous la Cour, pour votre première visite ? Vous avez bien choisi votre soir. Il se trouve bien des réactions à l'idée qu'une Olarile montre le trône d'Isle.

L'hameçon était tendu. Si elle était sage, la jeune fille dirait quelques platitudes et n'exprimerait pas une seule opinion distincte. Mais pourquoi serait-elle venue à la Cour si ce n'était pour se mêler à quelques intrigues, même si ce n'était qu'avec un serviteur ? Et après tout, pourquoi y avait-il des domestiques, si ce n'était pour qu'on leur confie les secrets qu'on voulait cacher aux Nobles ? Et même si elle ne voulait pas exposer ses convictions, Gribus espérait que son manège aurait suffit, qu'il aurait droit à une parcelle de la confiance de Charis Arcarian ; dans ce monde de trahisons et de dangers, il n'y avait pas d'outil plus précieux ou plus polyvalent que la confiance de quelqu'un.
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyMer 14 Sep - 21:42

Mais qu'est-ce qu'il lui faisait, là ? Éléni se retint de lui assener une réplique cinglante, où elle lui signifiait sans détours qu'elle le préférait encore impitoyable et sardonique. Elle s'était encore trompée : Gribus Sandragil n'était pas plus sympathique en scribe officiel, il était d'une fadeur exaspérante. À moins que... elle ne soit tout à fait déstabilisée par sa politesse et son respect, auxquels elle n'avait pas droit d'habitude ?

Charis n'en revenait pas de la nervosité affichée par le scribe ; qu'est-ce qui pouvait bien le mettre dans un état pareil, lui qui était ordinairement si placide ? Pourquoi donc était-il aux abois ? Avait-elle raté quelque chose d'important ? Était-elle au cœur d'un traquenard ? Sentant la méfiance se réveiller au fond d'elle-même, Charis dévisagea Gribus Sandragil, à la recherche d'un élément qui lui prouve sa félonie. Elle se reprit juste à temps, redonnant à ses yeux un éclat innocent au moment où le scribe relevait la tête.

Quand Gribus Sandragil lui énonça toutes les obligations de son travail, Charis songea qu'il s'agissait d'autant de raisons pour lesquelles la Dissidence l'avait approché. Oui, décidément, il était un pion majeur qu'il leur fallait de leur côté. La modestie du scribe l'étonna également. Qu'il ne soit pas celui qui rédigeait les Chroniques lui était parfaitement égal ; apprendre en revanche qu'il ne s'estimait pas talentueux lui parut... étrange. Malgré l'aversion qu'elle éprouvait pour Alouette, elle avait toujours considéré comme acquis le fait qu'il avait une belle plume, ou du moins un don certain pour la rédaction – il était scribe ! Était-ce une manière doucereuse qu'il utilisait quand il était à la Cour ou était-ce un réel reflet de sa pensée ? Elle ne commenta pas, se contentant d'un petit sourire relativement neutre. Qu'aurait-elle pu ajouter à cela ? Rien d'intelligent, aussi valait-il mieux s'abstenir.

Pourtant, au fond d'elle-même, Éléni souriait. Le scribe ne parlait jamais beaucoup, et l'entendre débiter autant de mots les uns à la suite des autres lui faisait un drôle d'effet. Certes, les rapports d'Alouette pouvaient aussi être longs, mais ce n'était pas une conversation qu'elle aurait qualifiée de spontanée, alors qu'ici, le scribe lui livrait naturellement des réponses. C'était à n'y rien comprendre. Soit il se fichait foutrement d'Éléni lors de leurs rencontres pour la Dissidence, soit il se fichait royalement de Charis Arcarian. Dans un cas comme dans l'autre, son attitude était offensante. Lequel des deux comportements pouvait être raisonnablement considéré comme la véritable personnalité de Gribus Sandragil ?

L'hésitation du scribe était presque palpable, mais il finit par lui demander... l'impensable. Aurait-elle eu un verre en main qu'elle l'aurait lâché. Seule l'habitude de contrôler ses réactions sauva Éléni d'une posture stupéfaite. Elle en aurait oublié de respirer. Il... il se moquait d'elle, ou il avait percé à jour son identité ! S'enjoignant de rester calme, Charis prit un instant de réflexion, tout à fait effrayée à l'idée de devoir fournir une réponse. Éléni connaissait parfaitement la réponse à cette question, et savait exactement déterminer le genre de réponses qui faisait pencher le recruteur vers une potentielle entrée dans la Dissidence. Quoi qu'elle réponde, Gribus Sandragil passerait sa réponse au peigne fin, pour déceler la signification de chaque mot. Mais que faisait-il au juste ? Tentait-il de recruter pour la Dissidence – en tant qu'Éléni, ça la faisait bien rire – ou tentait-il de servir au mieux Ysor Arlanii ?

Autre chose perturbait Charis, une chose qu'elle n'avait pas envisagé dans ses plans. Mentir sous sa véritable identité était plus problématique que prévu. Si Éléni n'était que mensonges, Charis Arcarian était la digne fille de son père, franche et sereine. Charis brûlait de confesser sa conviction dissidente – et théoriquement, elle ne risquait rien, avec Gribus Sandragil, mais elle ne se serait jamais aventurée à laisser reposer son sort entre ses mains – mais sa raison lui hurlait de ne pas le faire. Elle cligna des yeux, consciente qu'elle devait fournir une réponse, maintenant.

Charis ouvrit sa petite bouche en un « o » parfait, caché par sa main, puis regarda le scribe avec un air effrayé. Revenant sur les propos qu'il avait tenus, elle répondit :

- Alors vous êtes en service, et le Gardan Edorta vous a demandé de vérifier ma loyauté ? Moi ?

Son expression entière clamait « Mais qu'aurais-je qui intéresse le Gardan Edorta », combinée à une surprise de type « Vous avez vraiment été chargé de venir auprès de moi en particulier ? ». C'était trop d'honneur pour une jeune femme tout juste anoblie, Charis comme Gribus Sandragil en avaient conscience. C'était hautement improbable, même. Sa réponse en elle-même était une erreur tactique, mais officiellement elle débutait à la Cour, aussi ne pouvait-elle maîtriser directement tous les arcanes sans paraître louche. En outre, elle ne pouvait pas décemment le laisser continuer dans cette voie-là. Elle rougit fortement, accordant le bénéfice de la confusion à Charis Arcarian. Sur le ton de la confidence, elle répondit, sans se départir de la fermeté avec laquelle elle s'était présentée :

- Je suis nouvelle, monsieur Sandragil. Je ne maîtrise pas les réponses à donner, encore moins la façon de les formuler. Pour répondre à votre question, j'ai toujours regardé la Cour d'un œil sceptique, mais... ce faste comble mes espérances les plus folles. Il est impossible de ne pas être émerveillé par le Palais. Quant à la Promise, c'est une véritable Reine de Beauté. Je suis certaine que son cœur est aussi noble que ses traits.

Ses yeux brillaient de ravissement. La formulation était soigneusement choisie pour former un compromis acceptable aux yeux de Charis Arcarian et de la Dissidente qui était en elle. Pour celui qui ne cherchait pas, cette réponse serait amplement suffisante...
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyMer 26 Oct - 4:24

Le Gardan Edorta ? Gribus fut d'abord perplexe face à ces paroles, mais il fut rapidement tenté d'afficher un franc mépris. Quelle idiotie s'était-elle mise en tête ? S'imaginait-elle vraiment que le roi d'Isle toute entière allait se soucier des loyautés de la drôlesse d'un bourgeois parvenu ? Le Scribe s'efforça de contenir sa morgue et afficha un sourire surpris, qu'il ponctua d'un bref rire.

« Non, Demoiselle, ne vous inquiétez pas, » fit-il avec un indulgence complice. « Le Seigneur Ysor n'a aucune raison de douter de votre loyauté, encore moins d'envoyer quelqu'un pour s'en assurer. Et s'il le voulait, je puis vous assurer qu'il manderait quelqu'un de plus haut placé que moi. »

Il avait beau rester poli et tenir son rôle de serviteur gêné, le jeune albinos songeait à couper court à la conversation ; quel intérêt pouvait-il bien y avoir à compter pareille pimbêche dans ses alliés ? Etait-telle stupide à ce point ? Même le plus simplet des mendiants aurait pu dire à Charis Arcarian que le Gardan Edorta n'avait sans doute même pas conscience de son existence. Cette naïveté ne correspondait pas à ce que le Scribe avait cru deviner de la demoiselle ; peut-être lui cachait-elle quelque chose ?

Le jeune homme étudia le visage de la Noble tandis qu'elle reprenait la parole pour lui servir d'autres banalités. Ses mots étaient ceux d'une fille ignorante des codes de la Cour qui arrivait au Palais avec des étoiles plein les yeux, mais il y avait des nuances plus caractéristiques ; elle affichait une franchise un peu maladroite en parlant de son scepticisme, et c'était surtout son commentaire sur la Reine qui montrait qu'elle jouait un rôle. Bien entendu, tout le monde trouvait la Promise belle à mourir, mais on ajoutait souvent à voix basse qu'elle était si charmante qu'elle aurait sa place dans les plus grandes maisons closes ; Lis Diantha était une putain, c'était bien connu, et ceux qui n'étaient pas aussi directs en parlaient comme d'une usurpatrice. Ysor Arlanii ne s'était pas fait d'amis parmi les familles nobles d'Edor Adeï, qui avaient toutes espéré que le Gardan Edorta choisisse sa future parmi elles. Charis avait dû l'entendre dire par ses parents, mais elle était assez prudente pour ne parler de l'Olarile qu'avec de plats compliments. Le mensonge était bien piètre, tout comme la bêtise qu'elle avait cru bon d'inventer au sujet de sa loyauté.

Oui, se dit Gribus, c'est là l'explication : la jeune Noble était assez intelligente pour savoir qu'elle devait mentir, mais elle ne savait pas encore comment correctement déguiser son opinion. Il y avait encore de l'espoir pour elle, semblait-il. Mais le plus intéressant était ce qu'elle ne lui avait pas encore dit ; à aucun moment Charis Arcarian n'avait-elle parlé de ses opinions politiques, pas même pour dire qu'elle était loyale à Ysor Arlanii, comme n'importe quelle nouvelle arrivante le ferait. En cela, le Scribe pouvait sentir qu'elle montrait de l'intelligence et qu'elle n'avait pas fermé toutes les portes. Leurs tons de voix suggéraient la confidence, mais les deux jeunes gens pouvaient sûrement sentir l'un comme l'autre qu'ils n'en étaient qu'aux généralités. Il faudrait encore du temps avant qu'elle accepte de lui parler plus franchement et sans doute encore plus pour qu'elle fasse une recrue potentielle.

Peut-être était-ce le bon moment pour laisser le masque glisser un peu. Gribus se rendait compte qu'il ne pouvait espérer obtenir de confiance sans un peu de franchise, même feinte. Quelques paroles et gestes lui avaient donné ce visage de domestique embarrassé, maintenant il ne restait plus qu'à remplacer ce mensonge par une demi-vérité ; avec un peu de chance, la jeune fille croirait que le Scribe lui avait révélé son vrai visage. Il se pencha légèrement en avant et son sourire courtois prit une nuance d'assurance.

« Vous n'êtes pas la seule du Palais à en être aussi certaine, croyez-moi... » lâcha-t-il d'un ton plus égal, qui rappelait plus la voix posée du serviteur parfait. « Ne vous inquiétez pas de vos débuts, Mademoiselle Arcarian, vous êtes prudente et c'est ce qui compte. Si mon avis vous agréé, je vous recommanderai simplement de garder profil bas pour l'instant et de bien choisir vos amis. »

Il ne fallait pas se faire passer pour un intrigant ou tenter de la séduire ; le jeune albinos n'était même pas sûr de pouvoir se rendre aussi mielleux. La meilleure image était encore celle qu'il maîtrisait, celle d'un homme fiable, à laquelle il avait tâcher d'ajouter un peu de sympathie pour cacher sa froideur habituelle. Ce qu'il venait de donner à la jeune Noble était un conseil désintéressé, rien de plus, ou du moins il l'espérait. Gribus était un peu inquiet des conséquences de la petite expérience d'acteur qu'il menait : s'il se comportait trop différemment de d'habitude, son comportement normal paraîtrait suspicieux, et il ne pouvait éternellement passer pour un jeune timide aux yeux de Charis Arcarian. Pire encore, elle pourrait peut-être le prendre pour un comploteur aux yeux plus gros que le ventre et le fuir ; le Scribe savait qu'il n'y avait rien de pire à la Cour qu'une mauvaise réputation. C'est pourquoi il préférait ne pas trop prolonger le jeu et revenir à un registre qu'il connaissait mieux. Le domestique embarrassé qu'il était semblait à présent plus en confiance, et plus rien ne le différenciait du vrai Gribus que des manières légèrement plus chaleureuses.

« Si vous avez besoin de quoi que ce soit, » dit-il en se redressant, un sourire poli aux lèvres, « je reste à votre service. Peut-être êtes-vous venu dans l'idée de rencontrer quelqu'un ? »
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyJeu 3 Nov - 14:27

Charis Arcarian voulait maintenant en finir au plus vite. Cette farce était ridicule ; elle en venait à se demander s'il n'était pas plus simple de le planter là et de le traiter comme un vulgaire domestique – après tout, c'était ce que chacune de ses phrases lui criait : « je ne suis qu'un humble serviteur, blablabla ». Éléni s'en serait gorgée avec trop de plaisir pour que Charis Arcarian puisse s'y résoudre. Et jouer la gourde trop longtemps blessait étonnamment son amour-propre. Ce point précis était sans doute le plus inattendu de la soirée : cela faisait longtemps que Charis Arcarian avait renoncé à se préoccuper de l'image qu'elle donnait d'elle-même. Pour une raison inconnue, elle ne parvenait pas à garder de l'indifférence ou du détachement par rapport à son image face à Gribus Sandragil. Peut-être était-ce parce qu'elle le côtoyait régulièrement en tant qu'Éléni. Peut-être était-ce parce qu'elle avait souvent envie de le gifler jusqu'à ce que ses réactions deviennent lisibles... compréhensibles.

Elle allait s'incliner et lui murmurer une banalité afin de prendre congé mais il lui proposa de l'aider à agrandir son réseau de relations. Une fois de plus, elle eut le plus grand mal à ne pas écarquiller des yeux. D'où tirait-il cette assurance tranquille absolument inébranlable ? Il n'était tout de même pas en train de voir en elle une future... recrue ? N'aurait été le protocole, Charis aurait éclaté d'un rire franc et moqueur. Alors là ! C'était vraiment le bout. Il fallait définitivement mettre un terme à cette plaisanterie du plus mauvais goût. Gribus Sandragil l'avait sauvée d'un moment mortifiant, elle l'avait remercié ; maintenant que les apparences lui permettaient de se sauver, il était temps de se carapater en vitesse.

Le visage de Charis Arcarian adopta une expression d'agréable surprise, et elle commença :

- C'est très aimable à vous...

Avant de s'interrompre. Un enfant fendait la foule d'un pas décidé vers eux. Et pas n'importe quel enfant : Callixte Arlanii, le fils d'Elandor. Charis sentit son cœur s'arrêter, alors même qu'un sourire se plaquait sur ses lèvres. Elle aurait voulu disparaître ou faire comprendre au garçon qu'il ne fallait pas qu'il l'aborde, mais déjà, le cri du Petit Prince avait jailli :

- Charis !

Le temps du choix était arrivé plus tôt que prévu. Elle qui avait espéré garder le lien avec le fils d'Elandor Arlanii secret, voilà qu'elle se retrouvait une fois de plus – une fois de trop – au centre des regards. Il devenait impossible de faire comme si son interpellation était fortuite ou liée à quelque affaire de la Cour : la familiarité de l'appel était trop évidente pour tenter de donner une explication vaseuse au fait qu'ils se voyaient régulièrement. Vaille que vaille, Éléni tenta de se convaincre elle-même que tous se fichaient des fréquentations du Petit Prince. Après tout, les gens l'auraient peut-être oublié d'ici demain, puisqu'elle était inintéressante. Les gens, oui, mais Gribus Sandragil, non. Charis en aurait crié de frustration. Elle détestait quand l'une de ses cartes tombait avant l'heure. Elle s'inclina devant Callixte Arlanii et à ce moment précis, le chaos s'empara de la fête.

C'était à croire qu'elle ne pouvait rien faire sans être systématiquement coupée dans sa démarche. Tout d'un coup, la foule criait, courrait en tout sens et hurlait à l'assassin. Assassin ? Charis Arcarian chercha aussitôt dans la foule la tenue rouge et or de ses parents, soudainement terrorisée à l'idée de les perdre là, comme ça, sans avoir pu s'interposer. Elle finit par croiser le regard de sa mère, alors même que Callixte Arlanii venait s'agripper à ses jupes, sous couvert de la protéger elle, bien entendu. Rassurée, elle prêta enfin l'attention aux cris, refusant d'aller vers le centre du tapage, comme Éléni l'aurait fait, mais comme ce qui aurait paru du plus vulgaire à une jeune Noble. Elle n'était pas une poissonnière qui courrait aux nouvelles, elle était Charis Arcarian, ce soir. Enfin, le nom de la Promise sortit. Et là, le sang déserta le visage de Charis. Lis Diantha se mourrait, clamait-on sans fin. Comment n'avait-elle pas anticipé un tel mouvement ? Il ne s'agissait ni de la Révolution, ni de la Dissidence, sinon elle en aurait eu vent. C'était donc... incroyable. Les Conseillers ne reculaient vraiment devant rien. Le mépris que Charis éprouvait à leur égard grandit encore. Assassiner une femme de leur propre camp ! Qui était derrière le geste ?

Charis Arcarian se permit de parcourir à nouveau la foule du regard, cherchant les Dissidents infiltrés du regard. Elle fut rassurée de n'en trouver aucun. Avec le bon sens qui les caractérisait tous, ils avaient pris la poudre d'escampette. Une vague de soulagement déferla sur elle, tandis qu'elle murmurait, en état de choc :

- Therdone... Qu'il mesure sa Volonté à sa juste valeur.

Et qu'il la laisse crever, était bien entendu la suite de la phrase, parce qu'il ne fallait pas se leurrer, la Dissidence elle-même avait projeté de mettre fin aux jours de Lis Diantha, mais il n'avait pas été question de le faire avant que les enfants aient vu le jour. Charis était écœurée par les Conservateurs. Ils se coupaient eux-mêmes l'herbe sous le pied... Mais à quoi pensaient-ils ? Que voulaient-ils prouver avec un tel acte ? Allaient-ils accuser la Dissidence ou la Révolution ?

Charis avait envie de prendre ses jambes à son cou, à l'instar des autres Dissidents qui avaient disparu, mais elle savait qu'elle ne pouvait se permettre d'être fichée comme manquante lors des fouilles qui s'annonçaient. Et déjà, les gardes condamnaient les sorties... Quoi qu'il arrive désormais, Charis Arcarian devait sortir de la Salle de Réception comme elle était entrée : en Noble tout juste promue, pas en Dissidente.
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MessageSujet: Re: De l'art de cajoler les cultures   De l'art de cajoler les cultures EmptyJeu 3 Nov - 15:47

[Je suppose qu'il vaut mieux qu'on arrête le sujet là. D'ailleurs par un coup de génie, tu m'as fourni une parfaite transition vers mon rp suivant avec Callixte. Merki^^.]
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