Les Tables d'Olaria
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 Première leçon

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Onaria Dimitres
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MessageSujet: Première leçon   Première leçon EmptyDim 3 Avr - 13:13

Le pluie tombait drue depuis quelques heures déjà, il y avait peu de monde dans les rues. Grand-Mère, le regard perdu dans le vague se demandait quand ce rideau gris allait ce lever. Ce n'était pas qu'elle aimait pas la pluie, c'est qu'elle préférait le soleil, sentir la chaleur de ses rayons sur sa peau translucide et la douceur d'un petit vent tiède. Quand la pluie, comme à l'instant, tombait depuis des heures, elle trouvait ça déprimant. C'est alors qu'une idée germa dans son esprit. Cette pluie était peut-être l'occasion rêvée pour une première leçon de chirurgie plus poussée pour Lell. Si elles se rendaient au cimetière maintenant, elle passeraient inaperçues, ombres au milieu des ombres. Elles pourraient discrètement ramasser un cadavre et le ramener dans la maison, sans être vues de personnes si elle prenaient les chemins les plus boueux, ceux que personne n'empruntait par un temps pareil. Elles prendraient un corps pas trop grand, facilement transportable à elles deux.

Grand-Mère commença à se préparer à sortir, enfilant une cape pour se protéger un peu de la pluie, et des bottines de cuir plus ou moins imperméables. La précarité dans laquelle elle vivait ne la dérangeait pas, le luxe de la bourgeoisie lui rappelait trop un passé qu'elle préférait oublier. La lettre qu'elle avait écrite pour Lell resterait soigneusement rangée jusqu'à son décès, et elle n'y penserait plus. Son passé revenait encore trop souvent la hanter : les rires d'enfant, l'arbre, le cri, la chute, le bruit, atroce. Non, non, aujourd'hui, elle n'y penserait plus, aujourd'hui, elle allait transmettre à Lell un savoir particulier qui requerrait toute son attention. C'était un moment important dans la vie que son apprentie, il fallait que tout se passe bien. Celle-ci était en train de fabriquer quelques remèdes dans l'atelier à l'arrière, et Grand-Mère alla la chercher. « Il est temps, Lell ! »

La jeune fille avait dû comprendre, depuis le temps qu'elle en rêvait et que Grand-Mère refusait de céder à sa Volonté. Pour faire ce qu'elles allaient faire, il fallait avoir le coeur bien accroché et non seulement de la Volonté, mais aussi du courage, beaucoup de courage. Ce qu'elles s'apprêtaient à faire était contraire à toutes les coutumes Ilédores, à tous les enseignements. Mais Grand-Mère ne se lançait pas là-dedans à la légère, si elle envisageait d'aller au cimetière avec Lell, c'était que cette dernière était prête. Jugeant que son apprentie était trop lente à se préparer, elle retourna la voir. « Allez Lell, habille-toi, on va au cimetière, je vais avoir besoin de toi. »

Une fois que Lell fut prête, elles se mirent en route, et prenant des chemins détournés, se dirigèrent vers le cimetière. Cimetière était un bien grand mot pour cette fosse commune putride dans laquelle les corps étaient jetés sans grand ménagement. Les corps étaient cependant enroulés dans un drap avant d'être recouverts de terre. Les Ilédors avaient compris depuis bien longtemps qu'il était nécessaire de recouvrir les morts pour éviter la propagation des maladies. L'odeur qui se dégageait de l'endroit était épouvantable, mais Grand-Mère avait prévu quelques chose pour cet inconvénient. Elle attacha un foulard parfumé devant sa bouche et en offrit un à Lell. La jeune fille lui paru reconnaissante, mais Grand-Mère, d'un air bougon lui répondit que ce n'était rien.

Grand-Mère savait prêter une oreille attentive à toutes les informations qui circulaient dans la ville basse. C'est ainsi qu'elle avait appris qu'un jeune homme était décédé après une chute importante, mort sur le coup. C'était son corps qu'il serait intéressant d'examiner, il y aurait des fractures, et peut-être même du sang dans le crâne, autant d'éléments qu'elle voulait montrer à Lell. Il avait été enterré la veille, pour le trouver, il suffirait de retourner la terre la plus fraîche. « Viens, on va prendre celui-là. Il doit être encore assez frais, c'est important. Si le cadavre est trop vieux, il se décompose et un liquide putride s'en échappe. Il ne vaut mieux pas prendre ceux-là, ils ne peuvent pas nous apprendre grand chose. Il vaut mieux remettre la dissection à un jour ultérieur s'il n'y en a pas de frais. » Tout en parlant, Grand-Mère commença à déplacer la terre qui recouvrait le drap en lin. La pluie tombait toujours, rendant la tâche ardue. Dans ses jambes, Grand-Mère sentait les rhumatismes, mais elle ne se plaignait pas. Elle ne se plaignait jamais des douleurs de la vieillesse, cela aurait été admettre qu'elle était vieille, ce qu'elle ne parvenait pas à faire devant les autres.

Le trajet du retour fut laborieux, mais à deux, elles parvinrent à ramener le corps au domicile de Grand-Mère, dans l'arrière-salle, celle qui lui servait de laboratoire. Elles déposèrent l'homme sur la table qu'Onaria avait préparée avant de partir. La vieille laissa Lell le mettre en position pendant qu'elle préparait les instruments. Il fallait que tout soit prêt. Pour cette première leçon, elle ne laisserait pas Lell prendre le scalpel en main. Ce serait de l'observation, on ne coupe pas dans un être humain comme on coupe dans un chat crevé, quand bien même il était mort. Grand-Mère voulait que l'homme puisse encore avoir une certaine dignité dans la mort, il n'était pas question de labourer son corps de centaines d'incisions inutiles. « Garde bien le foulard, l'odeur va être pire quand je vais l'ouvrir. La mort, ça ne sent pas bon. Cet homme, selon mes renseignements, est mort d'une chute assez importante, il n'a pas fait de coma, il est mort sur le coup. Peut-être qu'il y aura une trace d'hémorragie dans le cerveau, mais je pense qu'il a simplement eu la nuque brisée. » Tout en parlant, elle prit un scalpel et entama la première incision, celle pour lui ouvrir le thorax. « Mais nous n'ouvrirons pas tout de suite son crâne. J'aimerais que tu observes d'abord les viscères. Ils peuvent nous apprendre de nombreuses choses. Tout saignement dans l'abdomen engendre invariablement la mort si on ne parvient pas à le stopper. Je vais te montrer quelques petites choses. »

C'est ainsi que la première leçon de chirurgie de Lell commença.
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyLun 4 Avr - 20:12

« Il est temps, Lell ! »

La jeune femme sursauta au son de la voix de Grand-Mère, elle ne l’avait pas entendue venir, plonger qu’elle était dans la concoction des remèdes dont il fallait refaire le stock avant la pénurie. Lell resta un instant, interdite, ne comprenant pas l’intention de son mentor. Elle ne lui avait fait part d’aucun disposition particulière pour la journée, et avec toute cette eau qui tombait, elle ne voyait pas bien ce qu’elles pourraient avoir à faire.
Hésitante, elle commençait à ranger l’établi lorsque la lumière se fit. Un grand sourire éclaira son visage, et ses mouvements s’accélérèrent, pressée qu’elle était de répondre à l’invite de Grand-Mère. Car aujourd’hui, depuis tout ce temps qu’elle l’attendait avec impatience, le grand jour était enfin arrivé. La Chirurgienne allait lui transmettre son savoir.
La deuxième visite de la guérisseuse à l’atelier fut pour la presser un peu plus, mais Lell passait déjà une cape sur ses épaules, aussi n’eut elle pas à la faire patienter davantage. D’ailleurs, la simple mention du cimetière suffit à la précipiter sur ses talons, quoiqu’avec un minimum de retenu. L’exubérance n’était pas une attitude que son mentor appréciait, aussi il aurait été idiot de voir cette chance lui passer sous le nez à cause de son comportement.

Le chemin jusqu’au cimetière ne fut pas très long, mais suffisant pour que la pluie parvienne à pénétrer la laine de sa cape. C’est donc dans une atmosphère froide et humide qu’elles parvinrent à la fosse commune où l’on enterrait les corps des gens pauvres. Plus elles se rapprochaient de leur destination, moins l’odeur devenait soutenable, et c’est avec beaucoup de reconnaissance que Lell accepta le mouchoir parfumé que lui tendit Grand-Mère. Il n’était guère étonnant de constater que seuls les plus démunis vivaient aux alentours immédiats de cette zone insalubre. Qui, en temps normal, souhaiterait coexister avec une telle odeur ? Même la pluie ne parvenait pas à l’atténuer, que penser alors du plein été…

Grand-Mère commença ses explications, celles-ci concernaient l’état du cadavre sur lequel elles allaient travailler. Lell écouta avec attention, comme toujours lorsqu’il s’agissait des enseignements de la vieille femme, et acquiesça à ses paroles, avant de l’aider à excaver l’homme enterré là. Selon la coutume Ilédore, ou du moins ce qui était la base pour éviter la propagation des maladies, il était enveloppé dans un drap de lin, ce qui leur facilita grandement la tâche pour le déplacement.
Pour le trajet du retour, il fut surtout question de passer inaperçu – tâche grandement facilitée par la pluie qui continuait à tomber drue et gardait tout le monde chez soi – et de transporter le corps, ce qui était tout de suite moins évident, surtout que malgré la fierté de la vieille femme, elle ne pouvait décemment la faire participer de façon trop importante à l’effort, du fait de son âge.

Enfin elles parvinrent jusqu’au domicile de Grand-Mère et transportèrent le corps dans l’arrière salle attenante qui lui servait de laboratoire. Lell s’occupa alors de déposer le cadavre sur la table trônant au milieu de la pièce, puis défit soigneusement le drap qui l’entourait avant de le plier et le poser dans un coin. Lorsqu’elles en auraient fini, il faudrait à nouveau l’y envelopper, avec toute la correction et les remerciements qu’elles lui devraient, à défaut de la douceur et de l’amour dont sa famille avait du l’envelopper lors de sa préparation. C’était un respect qu’elles lui devaient.
Ce travail achevé, la jeune femme ôta sa cape de ses épaules et la suspendit à une patère, avec l’espoir qu’elle aurait le temps de sécher un peu durant ce cours improvisé. Puis elle alluma les quelques bougies et lampes qui se trouvaient là, histoire d’avoir un éclairage suffisant pour les yeux fatigués de Grand-Mère, avant de regagner la table, dans l’attente du début de ce cours pour le moins étrange.

A dire vrai, l’idée d’ouvrir un corps humain ne la dérangeait pas tant que ça. Après tout, elle avait bien déjà recousu la chair, et même une fois amputé un membre. En quoi était-ce si différent ? Elle s’était déjà exercée sur de petits animaux, et avait pu observer leur anatomie interne. Aujourd’hui, il n’y avait que l’échelle qui changeait. Mais aussi la morale. Ce qu’elles allaient faire était à l’encontre de tous les principes ilédors. Mais cela allait aussi lui permettre d’apprendre et de soigner davantage de personnes. N’était-ce pas le plus important ?
Lell s’était préparé depuis longtemps à cette première fois, et c’est avec un certain calme qu’elle observa Grand-Mère approcher avec un scalpel à la main. Les questions de morale, elle y avait bien réfléchi, avant de commencer la dissection d’animaux, et même après. Aujourd’hui, elle se savait prête et en paix avec elle-même. La leçon pouvait commencer.

Grand-Mère commença avec quelques explications relatives à la mort de l’homme qu’elle se préparait à ouvrir. Lell observa le corps tandis que la Chirurgienne parlait. Le temps avait déjà commencé son office, des lividités rouges à violacés se répartissaient sur tout le corps, mais la rigidité du cadavre, encore présente, attestait de sa mort encore récente. On ne pouvait pas dire que c’était beau à voir, mais Lell chassa ses pensées, se concentrant sur les faits et gestes de son mentor.
Le scalpel brilla un instant, reflétant la lumière dispensée par les bougies, avant de plonger précautionneusement dans le thorax. L’odeur se fit plus forte, et Lell se mit à respirer par la bouche pour tenter d’y échapper.
Il n’y eut pas de saignement, l’ouverture se fit proprement, nettement. La jeune femme observa attentivement les gestes de son aînée tandis qu’elle poursuivait son incision. Alors, Lell put constater de ses propres yeux l’anatomie humaine. Elle avait déjà pu le remarquer avec les animaux, rien n’égalait la vision directe des choses pour comprendre pleinement l’agencement de cette machinerie que constituait le corps humains. Elle avait certes appris par cœur les innombrables planches anatomiques de Grand-Mère, mais ce qu’elle avait sous les yeux étaient totalement différent.

« J’ai l’impression que ça n’a rien à voir avec les planches… Mais je reconnais quand même certaines structures. Tout semble si… embrouillé et pourtant, tout a l’air d’être à sa place pour faire fonctionner l’ensemble. » Elle avait du mal à exprimer clairement ses idées, concentrée qu’elle était sur ce qu’elle pouvait observer grâce à la guérisseuse. Et puis après tout, on était loin de la clarté et de la simplicité de dessins académiques…
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Onaria Dimitres
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyJeu 28 Avr - 20:21

Grand-mère était concentrée sur sa tâche, elle respectait profondément que les corps qu'elle utilisait, même si personne ne saurait jamais ce qu'ils avaient subis. La première incision qu'elle avait pratiquée était nette et sans bavures, le fruit d'une longue expérience sans doute. Lell avait le regard émerveillé par ce qu'elle voyait, enfin, elle avait accès à autre chose que des dessins ou des blessures superficielles. Désormais, elle pourrait mieux saisir tout ce que Grand-Mère lui enseignait à propos de l'anatomie. « Je comprends ce que tu ressens. La première fois que j'ai ouvert un homme, j'ai eu l'impression qu'un voile d'incompréhension se levait enfin. C'était merveilleux d'observer enfin comment les choses étaient faites. »

Tout en parlant à Lell, elle continua à inciser l'abdomen afin de révéler les organes de la digestion : l’œsophage, l'intestin, l'estomac, le foie, le pancréas, autant de viscère que Lell devrait identifier, dont elle devrait donner les caractéristiques, tout ce qu'elle étudiait depuis longtemps maintenant. Avec le temps et l'expérience, même quand il y avait des malformations, Grand-Mère savait reconnaître sans faillir les organes qu'elle avait devant elle. Un jour, ce serait la même chose pour Lell, la jeune fille qu'elle avait devant elle assurerait la relève, et Grand-Mère était fière, très fière.

« Bien Lell, maintenant, je vais te demander de me dire tout ce que tu sais sur cet organe. Je veux que tu me dises à quoi il sert, à quoi il est relié, ses caractéristiques principales, etc. » Du doigt, elle désigna l'estomac, ce n'était pas trop difficile pour commencer, elle devrait s'en sortir sans trop de peine. Si Lell oubliait l'un ou l'autre détail, ce n'était pas trop important, ce qu'il fallait avant tout, c'est qu'elle sache sa fonction globale et qu'elle puisse dire à quoi il était relié.

Le lien entre les différents viscère était quelque chose de fondamental, qui permettait de comprendre de nombreux maux. Le corps humain était une machinerie complexe, la moindre défaillance au mauvais endroit pouvait causer des troubles généralisé dans tout l'organisme. Au fil des autopsies, des opérations, des découverts et des erreurs, Grand-Mère avait fini par en apprendre plus que n'importe qui à Edor Adeï sur la chirurgie. Elle était fière de son savoir, et avait mis longtemps avant d'accepter de le partager avec qui que ce soit. Lell était une jeune fille spéciale, qui tenait dans son cœur, une place bien plus grande que celle que la vieille voulait bien admettre.

Depuis que les troubles en ville augmentaient, Grand-Mère se posait de nombreuses questions par rapport à son implication dans la Dissidence. Devait-elle en parler à Lell ? À certains moments, elle était convaincue que c'était une bonne idée, à d'autres, elle se disait que c'était bien trop risqué. La mort n'effrayait pas la chirurgienne, elle l'avait bien trop côtoyée que pour la craindre, mais Lell était encore jeune, et risquer sa vie pour un idéal qui n'était pas le sien n'était pas un risque à prendre. Mais la dissidence avait besoin d'une roue de secours, de la possibilité d'avoir recours à quelqu'un d'autre si pour une raison ou une autre, Grand-Mère n'était pas disponible. Ils pourraient toujours demander à Lell sans lui dire quoi que ce soit, mais quand il s'agirait d'aider un homme ou une femme recherché par les hommes du guet, qu'en serait-il ?

Décidant qu'il n'était pas encore temps d'aborder le sujet, elle se concentra à nouveau sur les paroles de Lell et sur ses mains. Pour que Lell puisse mieux voir ce dont elle était en train de parler, Grand-Mère décida de retirer l'estomac de l'abdomen de l'homme. Prenant ses précautions, elle trancha le duodenum et l'intestin grêle pour les désolidariser de l'estomac. Ensuite, elle découpa soigneusement les membranes qui le maintenaient en place dans la cavité. Quand elle eut terminé, elle le déposa sur la table. « Voilà, comme ça, tu pourras mieux voir les choses. Je vais l'ouvrir dans quelques instants, et tu pourras voir comment c'est à l'intérieur. Tu verras, c'est tout à fait fascinant ! »

Fascinant, c'était le mot. Grand-Mère ne se lassait jamais de regarder, d'analyser, de tenter de comprendre. Comprendre le corps humain, son fonctionnement, ses secrets. Cette étrange passion, elle souhaitait la transmettre à Lell, afin que jamais ne se perde un savoir si précieux.
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyJeu 19 Mai - 12:01

Concentrée, Lell observait les moindres faits et geste de Grand-Mère et écoutait avec attention chacune de ses explications à tel point qu’elle en avait presque oublié l’odeur du corps et le foulard lui protégeant nez et bouche. Toute son attention se trouvait entièrement focalisée sur la leçon.
Elle étudia avec soin l’organe que lui présenta la vieille guérisseuse, et prenant son temps plutôt que de répondre avec empressement, elle rassembla ses idées tout en continuant d’observer l’anatomie des différents organes. Elles avaient tout leur temps, aussi était-il inutile de se précipiter. Non pas qu’elle ne connaissait pas la réponse, mais cela faisait partie des leçons de Grand-Mère que de réfléchir posément à chaque situation avant d’agir, surtout lorsqu’elles n’avaient pas à courir après le temps. Et tel était le cas aujourd’hui…

« Il s’agit de l’estomac, je le reconnais à sa vague forme en "J". Il possède la fonction de digestion des aliments, ayant été préalablement mâchés dans la bouche puis déglutis dans l’œsophage. » Tout en le nommant, elle indiqua la tube en question, relié à l’estomac. « Il est donc relié à l’œsophage en amont et au duodénum en aval par lequel s’en va ensuite le produit de la digestion. »
Pour ce qui était des fonctions de l’estomac, Lell pensait ne rien avoir oublié. « Anatomiquement, il a des rapports avec le foie, qu’elle désigna, la rate, le pancréas, cette structure ici… » Elle hésita un instant face au complexe qu’elle ne reconnaissait pas, avant de se remémorer certaines planches. « C’est le diaphragme, et pour finir, en bas l’intestin. »

Tout cela était réellement fascinant. Son travail préalable sur les dessins de Grand-Mère lui avait permis d’acquérir une base solide pour la reconnaissance des différents organes et leur lien entre eux. Si elle hésitait sur un organe, il lui suffisait d’observer ceux qui l’entouraient pour retrouver son nom et sa fonction. Elle se doutait bien que tout ne serait pas toujours aussi simple, qu’il lui faudrait apprendre à reconnaître ces structures au premier coup d’œil sans besoin des planches anatomiques, mais pour l’heure, elle était heureuse de voir qu’elle parvenait à identifier les différentes structures sans trop de mal.

Cette vue d’ensemble du corps humain était bien différente de ce qu’elle avait pu observer chez les petits animaux. Bien que cela y ressembla, l’échelle était plus petite, et moins impressionnante que ce qu’elle avait sous les yeux. Lell commençait à entrevoir cette machinerie complexe qui faisait fonctionner chaque corps, mais qui semblait si fragile de l’intérieur. Le moindre dérèglement conduisait à des troubles plus ou moins graves, et c’était toute cette machinerie qui était remise en question.
Ceci, la jeune femme s’en était aperçue lorsqu’elle étudiait les poisons. Ils agissaient à des degrés divers, de façon différente, mais le résultat en était toujours un dérèglement, définitif ou non, du fonctionnement correct du corps humain.

Grand-Mère reprit la parole, et Lell lui accorda toute son attention. Elle se proposait maintenant d’ouvrir l’estomac pour observer son contenu. Inconsciemment, la jeune femme se rapprocha un peu plus et observa les mains de la chirurgienne, les yeux brillants de curiosité. De ce qu’elle connaissait, l’estomac contenait des sucs gastriques nécessaires à la digestion des aliments avant qu’ils ne passent dans le duodénum. Jusque là, tout lui avait semblé propre et… mécanique. Mais désormais, elle comprenait que les mécanismes n’étaient pas aussi simples que ce qu’elle avait supposé.
Elle avait hâte de voir la suite de la leçon…
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyMer 8 Juin - 22:53

Pour quelqu'un qui connaissait Grand-Mère, il saurait que ce qu'il fallait voir dans ses yeux en cet instant, c'était de la fierté. Lell connaissait parfaitement sa leçon, quand bien même Grand-Mère ne lui avait pas dit que la première vrai leçon de chirurgie serait pour bientôt. Nul doute que la jeune femme ferait une chirurgienne extraordinaire. Les yeux de la vieille femme brillaient d'une intense émotion.

« C'est parfait Lell, tu as retenu tout ce que je t'avais enseigné. Passons à la suite maintenant. »

Grand-Mère venait de retirer l'estomac de l'abdomen de l'homme et le posa sur une table juste à côté. Proprement, elle l'incisa sur le côté et l'ouvrit. Le pauvre gars devait avoir mangé peu de temps avant de tomber, l'estomac était presque rempli. L'odeur de la nourriture à moitié digérée était absolument épouvantable, mais depuis le temps, Grand-Mère était habituée. Lell aurait peut-être un peu de mal, mais la jeune fille semblait tellement fascinée par ce qu'elle voyait que la vieille ne s'inquiéta pas outre mesure.

Aussi répugnant que cela puisse paraître, Grand-Mère, elle ne s'en formalisait pas et continua sa dissection. Elle coupa l'estomac en deux et posa la nouvelle partie en vis-à-vis de l'autre. La nourriture n'était qu'une masse informe, mais elle était habituée à regarder au delà des apparences. Dans cette bouillie dégoûtante, on pouvait discerner des nuances différentes, certaines traces rougeâtres évoquaient des tomates, il n'y avait pas de reste de viande, mais quelque chose qui faisait penser à des pommes de terre.

« Tu vois Lell, je sais que ça ne ressemble plus à grand chose, mais on sait pourtant distinguer des restes de tomates et de pomme de terre là-dedans. C'est important d'identifier les aliments si jamais tu veux connaître la raison d'une mort suspecte. S'il a été empoisonné par des plantes, tu pourras en retrouver les traces de cette manière. »

Laissant à Lell le temps de regarder, elle finit par enlever les restes de nourriture de l'estomac et montra à sa jeune apprentie l'aspect si caractéristique de sa paroi. L'aspect plissé de celle-ci était repérable au premier coup d’œil. Quand Grand-Mère jugea qu'elles avaient assez analysé l'estomac, elle passa à la suite. L'intestin grêle était un organe très long, cela l'avait surprise quand elle avait mesuré sa longueur la première fois de constater qu'il faisait plusieurs mètres de long étendu. Elle en avait déduit que la digestion était un mécanisme compliqué qui nécessitait du temps.

Elle examinant précautionneusement l'intestin, désignant à Lell les artères principales qui l’irriguaient et les veines qui le drainaient. Tout était relié, tout était logique, les choses étaient parfaitement à leur place. Cet homme avait une santé de fer avant de mourir.

« Il était en parfait santé avant de mourir inopinément. Mais parfois, en ouvrant certains corps, tout ne sera pas aussi bien, certaines choses ne se trouvent pas à leur place. J'ai déjà vu une partie d'un intestin qui était tout noir, je ne sais pas comment ce genre de choses arrivent, mais si tu vois un cas pareil, il faut enlever le noir. Souvent, le patient meurt, mais il mourrait de toute façon si on n'essayait rien, parce que dans ces cas-là, ils ne savent plus manger. »

Plusieurs fois, déjà, elle s'était retrouvée dans cette situation. Quand les remèdes traditionnels ne fonctionnaient plus, il fallait trouver d'autres solutions. La chirurgie en était une, mais elle était peu acceptée par les patients en général. Sauf ceux qui n'avaient plus rien à perdre ou souffraient trop. Grand-Mère ne pouvait pas leur donner tort, si elle avait fait d'immenses progrès depuis ses débuts, il n'en restait pas moins que ses interventions n'étaient pas toute parfaitement bien rodées. La médecine avait encore beaucoup de progrès à faire, mais elle était sûre que Lell serait digne de son héritage.

Une fois l'abdomen entièrement examiné, elle poursuivit la leçon en ouvrant la cage thoracique. Une fois les poumons et le cœur à l'air, l'odeur nauséabonde se fit encore plus forte, mais elle ne s'en formalisa pas. La mort ne sentait pas bon, c'était un fait, et des faits, on pouvait toujours s'en accommoder. Désignant à Lell les organes qu'elle avait devant elle, elle reprit la parole.

« Alors ? Que ce sont organes ? À quoi servent-ils ? Montre-moi que tu les connais aussi bien que l'estomac. »
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyLun 13 Juin - 15:13

La suite se trouvait être tout aussi intéressante… quoi que l’odeur devint un peu plus insupportable. Lell accueillit la section de l’estomac par un froncement de sourcils, non pas que le geste la gêna, mais l’effluve qui en résultat était véritablement nauséabonde. L’aspect non plus n’était guère engageant, mais elle s’efforça de rester stoïque, à l’image de Grand-Mère. Celle-ci n’avait laissé paraître aucune gêne, ni avant, ni maintenant.
L’odeur jusque là oubliée revenait l’assaillir, et s’appliquant à la reléguer au second plan, la jeune femme se concentra sur le contenu stomacal plutôt répugnant. Elle avait senti la fierté dans la voix de Grand-Mère après qu’elle lui eut correctement énoncé de qu’elle savait de l’estomac, aussi ne voulait-elle pas la décevoir maintenant, pas alors qu’elle commençait enfin à entrevoir certains aspects d’un secret bien gardé. Il ne tenait qu’à elle de se donner les moyens de l’apprendre.
Ainsi, contemplant la boule informe résultant des produits de la digestion, Lell mit de côté sa répugnance et put conclure qu’effectivement, avec cependant parfois un peu d’imagination, on pouvait identifier ici ou là divers aliments partiellement digérés.

Néanmoins, la remarque de son mentor concernant les plantes l’interpella, car elle ne la pensait pas entièrement vraie. Cela fonctionnait tout à fait si la personne concernée avalait tout ou du moins une partie de la plante, mais si l’on extrayait simplement le poison puis qu’on l’utilisait mélangé à une boisson ou à de la nourriture, Lell doutait que l’on puisse en discerner la trace dans le contenu stomacal, à moins que ce poison ait un effet direct sur l’organe en question. Cependant, Grand-Mère continuait, aussi se promit-elle de revenir plus tard sur la question. Elle ne savait pas exactement ce que la vieille guérisseuse savait de ses expériences sur les poisons ni de son engagement dans la dissidence, mais bien qu'il s'agisse d'un sujet qu'elle préférait remettre à plus tard, si elle détenait une connaissance plus complète d'un sujet que son mentor, elle se devait de le partager avec elle, tout comme l'aïeule le faisait avec la jeune femme.

Elle lui fit examiner en détail la paroi de l’estomac, montrant sa paroi plissée caractéristique de l’organe, avant de passer à l’intestin grêle tout à fait remarquable par sa longueur. Un léger sourire étira les lèvres de la jeune guérisseuse, caché par le foulard qui masquait son visage. Combien de fois lui avait on répété qu’un homme avec les viscères dehors ne faisait jamais long feu ? Elle ne se souvenait pas de qui exactement venait la remarque, mais son intuition lui disait qu’il s’agissait sans doute de son ancien instructeur.

« As-tu réussi à sauver des personnes qui avaient une partie de l’intestin noire ? » La réponse était importante aux yeux de Lell car si le risque était plus important que le bénéfice, peut être valait-il mieux laissé la personne finir ses jours tranquille plutôt que lui infliger des douleurs supplémentaires liées à une opération risquée et sans l’assurance d’une réussite. Certes, elle approuvait Grand-Mère dans sa volonté de vouloir en sauver en maximum en tentant l’impossible, mais ne devait-on pas parfois s’avouer vaincue ? Mais d'un autre côté, elle devait bien s'avouer que si personne ne tentait l'opération, jamais il n'y aurait aucune réussite ni d'espoir d'amélioration de la technique pour de futures guérisons.

« Pour le cœur, il s’agit d’un organe musculaire. Il assure la circulation sanguine grâce à des contractions rythmiques, pompant le sang vers les vaisseaux sanguins, constitués des veines et des artères, ces dernières assurant la circulation du sang venant des poumons. C’est un organe essentiel pour maintenant les fonctions vitales d'un corps car dès qu'il cesse de fonctionner, homme ou animal, le corps meurt. De même pour les poumons, au nombre de deux, organes de la respiration. Séparés l'un de l'autre par le médiastin, reposant sur le diaphragme, le poumon droit est constitué de trois lobes tandis que le gauche de deux seulement. C’est là qu’arrive l’air que nous respirons pour alimenter notre corps, partant du nez, passant par la trachée et arrivant finalement au poumon. »
Depuis que Grand-Mère avait ouvert la cage thoracique, l’odeur s’était faite un peu plus forte, plus difficile à supporter, mais Lell choisit de l’ignorer, tant bien que mal, résolue à afficher le même stoïcisme que la Chirurgienne devant elle. Il s’agissait d’un fait qu’elle devait accepter, ce ne serait pas la dernière fois qu’elle serait contrainte de supporter de telles émanations, et plus vite elle s’y ferait, mieux ce serait pour elle lors de ses futures leçons.

Contemplant le corps, celui d'un homme encore en parfaite santé quelques jours auparavant, une réflexion qu'elle se faisait depuis le début du Siège lui revint en mémoire, et avant que Grand-Mère n'ait pu reprendre la parole, Lell la devança. « Je ne comprends pas pourquoi ils ne décident pas de brûler les corps des morts. C'est... malsain. Tant de maladies peuvent provenir des décompositions et nous avons si peu de moyens à cause du blocus des Révolutionnaires. Je sais bien que cela ne fait pas tout à fait partie de la leçon, mais qu'arrivera-t-il si une maladie importante se déclare ? »
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyVen 8 Juil - 23:21

Grand-Mère fut heureuse que son apprentie lui pose des questions, cela signifiait qu’elle s’intéressait vraiment à la leçon et qu’elle ne se contentait pas d’apprendre simplement les choses sur le bout des doigts. Elle voulait comprendre et c’était un excellent signe, Grand-Mère elle-même avait commencé avec cette curiosité. Puis, avec le temps, cette curiosité avait évolué pour la pousser à aller toujours plus loin, trop loin peut-être, diraient certains, mais la vieille n’était pas de leur avis. En repoussant les limites de la médecine, elle avait été appelée à soigner des maladies qui jusqu’ici restaient inguérissables. Les interrogations que suscitait la question de Lell étaient d’ailleurs pertinentes : comment savoir quelles limites poser ? Où s’arrêter ? À ne rien tenter, on n’avançait pas. Mais à s’acharner, on n’obtenait pas toujours des résultats intéressants... Les débuts avaient été difficiles, puis, Grand-Mère s’était imposée quelques règles, il était peut-être temps maintenant de parler de tout cela à Lell.

Écoutant avec attention les réponses de la jeune femme à ses questions sur les organes du thorax, Grand-Mère nota que la jeune fille maîtrisait vraiment ses leçons d’anatomie.

« Encore une fois, Lell, tu me montres que tu maîtrises vraiment ton anatomie, ce qui est essentiel pour passer à la suite. Je ne crains rien, je sais que le jour où tu ouvriras quelqu’un de vivant, même s’il a des anomalies, tu t’en sortiras. C’est l’une des choses les plus importantes dans ce métier, la confiance en soi : si tu hésites, si ta main tremble, tu n’arriveras à rien. Il faut faire abstraction de ses peurs et trancher dans le vif. Avant de poursuivre la leçon, je vais tenter de répondre à tes questions qui sont parfaitement légitimes. »

Prenant le temps de rassembler ses idées, elle commença à refermer le thorax, espérant que l’odeur nauséabonde qui s’en dégageait serait moins forte. L’effet ne fut pas des plus marqués, mais c’était tout de même un léger mieux.

« Pour répondre à ta première question, oui, j’ai déjà réussi à sauver des gens avec des intestins en partie noirs. Mais je n’ai pas réussi du premier coup. Il m’a fallu comprendre comment couper et où, et puis surtout, comment recoudre. Sept patients sont morts sur ma table avant que je n’y arrive. Sept, c’est à la fois beaucoup et peu, sans eux, je n’aurais pu sauver les autres, mais je ne leur ai apporté aucun soulagement, pour la plupart, seulement beaucoup de douleurs. C’est peut-être ce qui est si difficile avec le choix que j’ai fait. Comment savoir où m’arrêter ? Comment savoir si ce que je fais n’est pas vain ? »

Si Lell n’avait pas clairement formulé toutes ces questions, Grand-Mère ne doutait pas qu’elle y pensait. Elle ne cherchait en rien à se justifier, Lell savait ce qu’elle faisait et se doutait certainement de comment elle y était arrivé. En médecine, il n’existait pas de miracles, les avancées se faisaient par essaie erreur, il n’y avait d’autre possibilité, pas encore en tout cas.

« Quand je me suis rendue compte qu’il fallait que je prenne des vrais risques, je me suis imposée des règles à ne pas dépasser : quand je tente quelque chose de nouveau, c’est parce que je n’ai pas d’autre possibilité. Je demande toujours l’accord au patient, ou au défaut, à sa famille s’il est incapable de prendre une décision. Et si après avoir tenté dix fois une opération sans l’ombre d’une réussite, j’abandonne. Je ne souhaite pas torturer les gens inutilement, je souhaite les aider, simplement. Tu as d’autres questions à ce sujet ? »

Grand-Mère se demandait si ces règles paraitraient suffisantes aux yeux de son apprentie, elles lui avaient toujours suffis, mais la chirurgienne savait que son orgueil était l’un des ses principal défaut, même si elle ne l’admettait jamais devant les autres. Mais il était maintenant temps de répondre à la dernière question de la jeune femme. Pourquoi la ville ne brûlait-elle pas les cadavres ? Longtemps, Grand-Mère s’était posé la même question. Peu à peu, elle avait trouvé des embryons de réponses. Sans être totalement sûre d’elle, elle avait tout de même quelques idées sur la question. Si elle péchait par son orgueil, il en était de même pour beaucoup des nobles et autres hauts gradés qui prenaient ce genre de décisions. La mort, bien qu’acceptée, n’en restait pas moins la fin d’une vie, ce qui posait toujours question aux hommes. La tradition de Therdone voulait qu’on enterre, pourquoi changer cela ?

« La réponse à ta dernière question est compliquée. Je sais que des avertissements concernant la salubrité ont déjà été émis, mais les nobles ne s’en préoccupent guère. Ils ont leur tombes, leurs mausolées, leur quartier, ils ne savent pas à quoi ressemblent les fosses communes, et tant mieux pour eux. Mais du coup, ils ne sont pas conscients du problème, ils n’imaginent pas instant que si une épidémie se répandait en ville, ils pourraient tomber malades au même titre que les autres. Ils se croient au dessus de nous, de ceux des bas quartiers. Ils pensent, à tort, que leur Volonté les protègera de tout. »

C’était un point dont elle avait déjà discuté avec Elandor, la salubrité des bas quartiers était inexistante. S’il parvenait au pouvoir, elle lui avait fait part de son souhait de le voir prendre des mesures sur ce point. Elle poursuivit ses explications à Lell.

« Les Nobles poursuivent une vieille tradition sans se poser de questions, sans imaginer que la situation de ce siège puisse changer les choses. Brûler les corps, ils verraient cela comme gaspiller du combustible, qui dès l’hiver, deviendra indispensable. Ces gens-là ne pensent pas à nous Lell, à nous de nous rappeler à eux. »

C’est alors qu’elle parlait et qu’elle se laissait emporter qu’elle se rendit compte que sans le vouloir, elle avait abordé la question de la politique pour la première fois avec sa jeune apprentie. Elle ne savait pas trop où tout ça allait les mener. Était-il temps de lui parler de la Dissidence ? Si Grand-Mère avait confiance en son apprentie, elle n’était pas sûre de ses opinions politiques, et elle n’aborderait pas ce sujet délicat tant qu’elle n’en saurait pas plus. Ici, elle avait juste révélé qu’elle avait quelques griefs contre les nobles conservateurs.
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyJeu 28 Juil - 22:47

Dix essais… C’était à la fois beaucoup, pour les familles, une seule personne pouvait représenter tant, et à la fois peu. Des milliers de personnes pouvaient mourir pour une cause et ces pertes ne seraient considérées que comme dérisoires. Que valaient donc dix vies comparées aux centaines, aux milliers qui pourraient être sauvées si l’on parvenait à guérir une maladie ? Que valaient dix tortures si l’on pouvait éviter la douleur à tant d’autres ?
Cela représentait tellement, dix personnes sacrifiées dans l’espoir d’obtenir un résultat. Lell comprenait parfaitement cette règle que s’imposait Grand-Mère. Leur but était de sauver des vies et d’apaiser si cela se révélait impossible, non pas de torturer, même avec les intentions les plus admirables.
Grand-Mère était fière de son élève, pourtant plus que jamais, Lell sentait sur ses épaules le poids de cette responsabilité qu’elle avait acceptée en devenant l’apprentie de la Guérisseuse. Elles détenaient une sorte de pouvoir, et à elles de l’utiliser à bon escient. La jeune femme devrait-elle un jour outrepasser les règles établies à cause de son engagement dans la Dissidence ? Une question qui ne cessait de la tarauder, mais jusqu’ici, elle n’avait pas eu l’occasion d’être confrontée à un tel cas de conscience. Elle aurait aimé pouvoir s’en ouvrir à Grand-Mère mais l’angoisse de la réaction de son mentor l’en empêchait.

Mais comme le disait Grand-Mère, il fallait se fixer des règles, et les respecter. C’était le seul moyen d’avancer et de rester… humain.
« N’as-tu jamais eu envie d’enfreindre cette règle en te retrouvant devant un cas sur lequel tu avais renoncé à tenter des… expériences pour le sauver ? En te disant que cette fois-ci, tu pourrais y arriver ? » Lell connaissait suffisamment Grand-Mère pour savoir qu’elle ne renonçait jamais facilement. Continuait-elle à réfléchir, même après avoir stoppé tout essai, à un moyen de guérir certaines affections ? Finalement, renonçait-elle totalement à toutes recherches ou réflexions après qu’elle ait échoué dans ses dix tentatives ?

La Chirurgienne répondit à sa dernière question. Elle confirma ce que soupçonnait déjà Lell, à savoir que les problèmes de salubrités des Bas Quartiers n’étaient qu’un détail aux yeux de ceux qui gouvernaient la Cité. Pourquoi se soucier de la manière dont les Pauvres pouvaient bien être enterrés puisque la Cité Haute disposait de ses propres cimetières bien ordonnés et de ses caveaux familiaux…
Pas étonnant que tout parte à vau l’eau avec de tels aveugles administrant la Cité. Cela leur ferait une belle jambe d’avoir de la Volonté une fois les maladies déclarées. Volonté ou pas, elles ne faisaient aucune différence et frappaient de la même manière les différentes populations.
« Tu as raison… A nous de faire en sorte qu’ils remarquent enfin qu’ils ne sont pas les seuls à habiter la Cité. »
Nous… ?
Elle venait seulement de remarquer le pronom utilisé par Grand-Mère qu’elle avait machinalement repris en répondant. Nous… Que voulait-elle dire par là ? Se pourrait-il que ses soupçons se révèlent fondés ?
Son cœur se mit à battre un peu plus vite tandis qu’elle observait la vieille femme avec attention. Aucune émotion particulière ne semblait l’habiter. Voyait-elle un sens caché là où il n’y avait rien ? Car Lell se rendait compte qu’elle voulait lui dire pour Belladone. Elle savait qu’elle ne se sentirait pas en paix tant qu’elle ne le lui aurait pas avoué, mais tant l’angoisse, il y avait aussi le fait que désormais, elle était engagée dans un mouvement qu’elle ne devait pas trahir. Même s’il s’agissait de son mentor. Pourtant…

« Mais je pense qu’ils ne tarderont plus à se rendre compte que nous existons. Si ce n’est déjà fait… »

Ce n’était qu’une vague allusion qui ne la vendait pas directement, mais allumerait peut être de l’intérêt chez la Chirurgienne. Mais encore fallait-il que ses suppositions soient exactes…
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyMer 31 Aoû - 20:07


La question de Lell au sujet de ses expériences plongea Grand-Mère dans une profonde méditation. Si, évidemment, elle avait songé plus d’une fois à poursuivre, malgré ses nombreux échecs, mais quelque chose l’avait toujours retenue. Parce que se fixer des limites était primordial. La chirurgienne respectait la vie plus que tout, elle savait combien elle était précieuse et combien il était important d’en prendre soin. Mais elle n’ignorait pas non plus qu’on ne restait pas en vie à n’importe quel prix. Quel était l’intérêt de sortir quelqu’un d’un sommeil trop profond pour qu’il en ressorte débile et incapable de prendre soin de lui-même ? Chaque jour qui passait, chaque patient qui guérissait lui apportait plus de connaissances sur le fonctionnement du corps humain. Fallait-il à tout prix vouloir aller plus vite, trop vite peut-être? Grand-Mère avait beau être orgueilleuse, incapable d’admettre sa vieillesse et certaines de ses faiblesses, elle se savait faillible et elle n’avait pas la prétention de pouvoir soigner tous les maux.

« Ta question est pertinente, Lell ! Si, évidemment, de nombreuses fois, j’ai pensé continuer, j’avais l’impression de toucher le but, d’y être presque... Mais sauver une vie n’est pas tout, encore faut-il que la personne que l’on soigne soit capable d’en profiter. Faut-il tenter à tout prix de ramener à la vie quelqu’un qui sera totalement paralysé ? Faut-il laisser aux gens quelques mois de vie sans douleur ou des années avec une souffrance quotidienne ? Je n’ai pas la réponse à ces questions... » Avant de poursuivre, elle reporta son attention sur le corps qui gisait entre elles. Et lui, qu’aurait-elle tenté pour le sauver si elle avait été là au moment des faits ? Elle joignit les bords du thorax pour refermer l’incision qu’elle y avait faite quelques dizaines de minutes plus tôt. Elle commença à recoudre puis proposa à Lell de la replacer. Rien de tel que s’entraîner sur des cadavres pour faire des points suture. « Tu veux t’y essayer ? Tu as vu ce que je viens de faire, continue ! La peau des cadavres est légèrement plus fragile que celles des personnes en vie, surtout lorsque la décomposition est bien entamée, alors sois prudente, va à ton aise, ne te presse surtout pas, nous avons tout le temps. »

Elle tendit alors les instruments à Lell et discerna un sourire sur son visage à ce moment-là. Oui, décidément, elle avait bien choisi son apprentie : non seulement elle était brillante, mais elle était également avide d’apprendre et d’en savoir plus. « Pour en revenir à ce que je disais, si après avoir essayé plus de dix fois de réparer ces intestins noirs, je n’y étais pas arrivée, j’aurais cessé de pratiquer des opérations sur ces patients. Parfois, tenter de sauver, c’est faire pire que tout... »

Volontairement jusqu’ici, elle avait évité de répondre aux sous-entendus voilés de Lell. Si elle ne se trompait pas, Lell lui cachait quelque chose, et comme elle, elle hésitait à en parler avec franchise. Mais qui oserait aujourd’hui s’y risquer sans être sûr de son interlocuteur ? Il fallait être prudent avec tout le monde, le guet n’attendait pas d’avoir des preuves pour mettre des suspects en prison. Si la guérisseuse avait parfaitement confiance en son apprentie et n’avait pas peur d’être dénoncée directement, elle savait que sous la torture, même les plus courageux ne pouvaient résister. Ne souhaitant se lancer tout de suite, elle détourna encore un instant la conversation. « Quand tu auras fini de recoudre, nous allons explorer le crâne. Je pense que tu vas grandement apprécier ce que nous allons y découvrir ! »

Cette fois-ci, il faudrait qu’elle parle, sinon, l’occasion partirait, et plus jamais elles n’oseraient aborder ce sujet. Parler de la Dissidence tout de suite ? Non. Ce n’était pas une bonne idée. Il fallait être prudente, continuer avec des allusions, tout en se montrant plus explicite que Lell ne l’avait été précédemment.

« Oui, il est indéniable que les Nobles et le Conseil commencent à entendre parler de nous. Le peuple sait se faire entendre quand le besoin s’en fait sentir. Dans la ville résonnent de nombreuses voix que même les plus sourds entendront ! De mon côté, du mieux que je peux, j’aide ces voix dissonantes à se faire entendre ! »

Voilà, c’était dit. Sans être tout à fait explicite puisqu’au lieu de dire des voix dissidentes, elle avait parlé de vois dissonantes, mais Lell ne pourrait avoir de doutes si elle voulait bien le voir que Grand-Mère adhérait à la Dissidence.
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyMar 13 Sep - 14:22

Le doute se transformait peu à peu en certitudes. A qui d’autre que la Dissidence pouvaient correspondre ces voix dissonantes évoquées par Grand-Mère ? Qui d’autre manifestait tant d’énergie à se faire entendre de tous sinon ce mouvement issu du fond de la Cité et gagnant peu à peu les hautes sphères ?
Devait-elle cependant en dire plus ? Lui avouer son rôle, ce qu’elle faisait de ses enseignements ? Oui, sans doute, et puis elle finirait par l’apprendre, alors autant que ce soit de sa bouche.

Cependant, Lell prit le temps d’organiser ses pensées. Et puis elle avait aussi à réfléchir aux réponses apportées avant par son mentor concernant plus directement la leçon. La dernière phrase de la vieille dame avait fait marquer un temps d’arrêt à ses mains, mais celle-ci se réactivaient désormais, recousant avec soin l’incision pratiquée un peu plus tôt. Effectivement, la suture n’était pas aussi aisée que sur une personne vivante, mais en prenant soigneusement son temps, la jeune femme s’en sortirait sans mal. Elle était contente, quoiqu’un peu surprise, d’être devenue un peu plus actrice de la leçon, s’étant attendue à ne participer que par ses questions et ses réponses.
Quoi qu’il en soit, elle s’appliqua consciencieusement, réfléchissant aux paroles de Grand-Mère.

Celles-ci cadraient avec ce qu’elle pensait. Le bien-être de la personne passait avant tout, et cela amenait une autre question, tout aussi importante. « Tu dis que tenter de sauver peut parfois être pire que tout. Est-ce que tu as déjà… aidé quelqu’un… dans l’autre sens ? S’il n’y avait plus rien à faire… »
La question était difficile à poser, touchant un tabou important. Pourtant, la poser était capitale car un jour, Lell pourrait y être confrontée dans sa vie. Et sûrement plus tôt qu’elle ne le souhaitait si elle songeait aux évènements du moment. Cela la ramena alors à la question de la dissidence et à ses implications.
Il lui fallait s’en ouvrir, seulement elle redoutait de faire le premier pas. Pourtant il le faudrait bien car de son côté, Grand-Mère semblait toute aussi réticente. Mais comment aborder le sujet de façon naturelle ? Encore que cela ne fut pas forcément possible… Comment aborder avec naturelle une question qui pouvait les mener toutes deux directement sur la table de torture du Guet ?
Elle recousait un cadavre et pourtant cela lui semblait bien moins insurmontable que de parler de ça. Elles seraient bien avancées si aucune des deux ne prenait les devants…

Toujours concentrée sur sa suture, n’osant lever les yeux de son travail, et ainsi évitant de croiser le regard de la Chirurgienne, Lell tenta une approche du sujet qui les taraudait toutes les deux. Tâche véritablement malaisée tant elle ne savait par où s’y prendre ni par où commencer…
« Le soir des fiançailles, dans le camp révolutionnaire, il en est une qui s’est particulièrement faite entendre… » Elle faillit ajouter qu’il était heureux que certaines plantes soient toujours disponibles, mais elle craignait d’en dire trop en une seule fois.
Pour ce qu’elle en savait, la dissidence n’avait pas revendiqué l’action. Ajouté à la tentative de meurtre de la Future Reine, la nuit avait été riche en évènements extraordinaires dont les répercussions se faisaient encore sentir aujourd’hui.

Ayant achevé de recoudre le cadavre, Lell n’avait plus d’excuse pour garder les yeux baisser. Alors elle les redressa et les plongea franchement dans ceux de la vieille femme. Elle ne pouvait pas ne pas avoir compris, l’indication était trop flagrante pour être négligée…
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyMer 5 Oct - 16:02

Lell évitait son regard comme la peste, prétextant de se concentrer encore plus sur des sutures qui étaient déjà impeccables, mais Grand-Mère ne s'en formalisait pas. Quand le moment viendrait, quand son apprentie serait prête, elle la regarderait à nouveau, et de ce moment-là dépendait sans doute beaucoup de choses. En attendant, la vieille femme porta ses réflexions sur la question qui lui avait été posée sur le fait d'aider les patients à en finir. Elle s'était promis d'être toujours honnête avec Lell, alors elle répondrait la vérité, mais elle ne savait pas du tout comment la jeune femme prendrait la chose. Avouer qu'on a aidé des gens à mourir n'était pas quelque chose de simple et sans conséquence, et surtout, c'était un sujet particulièrement tabou. Si tout était une question de Volonté, alors ceux qui prenaient cette décision avaient échoué, il avaient failli à la religion de Therdone.

Elle réfléchissait à la meilleure manière d'aborder la question sans être ni trop mystérieuse, ni trop mélodramatique. Il fallait que Lell comprenne que sa Volonté à elle, c'était d'aider les autres, et ce, de quelque manière que ce soit, tant que ça ne portait pas atteinte à la vie des autres. Il lui faudrait être claire et posée si elle voulait que son apprentie la respecte encore. Celle-ci était particulièrement volontaire et aurait peut-être du mal à comprendre ce choix. « Je me dois d'être honnête avec toi Lell, sur ce point particulièrement. Oui, il m'est arrivé d'aider des gens à mourir, quand la médecine n'avait plus rien à leur apporter comme autre solution, quand leur qualité de vie était réduite à néant, quand eux-même en faisaient la demander, ou s'ils n'étaient plus capables de le faire : leur famille. Je n'aime pas particulièrement faire cela, mais je suis convaincue que cela fait partie de nos devoirs. » Oh oui, elle en était convaincue, mais elle était probablement l'une des seules. Se donner la mort ou demander de l'aide pour le faire n'était pas une pratique bien vue à Edor Adeï. Grand-Mère reconcentra son attention sur son apprentie qui réalisait toujours ses sutures, mais celle-ci n'avait toujours pas levé les yeux depuis quelques minutes.

Quelques instants plus tard, Lell reprit la parole et fit allusion à l'empoisonnement qui avait mis à terre une grande partie des Révolutionnaires le soir du Bal.

Grand-Mère ne put cacher complètement sa surprise, d'un coup, un voile s'était levé. Qui donc avait pu concocter cette potion rendant malade la plupart des Révolutionnaires à part Lell ? Elle n'avait pas réfléchi à la question jusqu'à présent, mais maintenant, ça lui paraissait être une évidence. Un instant, elle eut envie de rire, mais l'heure n'était pas à l'amusement, alors elle ne fit qu'esquisser un petit sourire. Quand elle avait appris que la teneur de la mission, elle avait été un peu étonnée qu'on ne lui demande pas de préparer le poison, mais elle pensait qu'ils avaient simplement réussi à s'en procurer au marché noir ou quelque chose du genre. L'air un peu coupable qu'elle avait l'impression de lire dans les yeux de Lell confirmait son intuition.

« Ainsi donc, c'était toi l'empoisonnement ? J'aurais dû m'en douter. » Elle sut qu'il fallait qu'elle ajoute quelque chose, mais elle se trouvait un peu désemparée. Elle ne connaissait bien évidemment pas tous les membres de la Dissidence, mais elle savait les compétences que l'empoisonnement avait requises, et elle savait également que Lell était l'une des seule à avoir ces compétences-là. Depuis toujours, elle s'était montrée très douée pour concocter toutes sortes de potions, certaines même qu'elle inventait elle-même, un art dans lequel Grand-Mère n'avait jamais excessivement brillé. « Je suis fière de toi, fière de ce que tu es devenue, des choix que tu as posés. L'Al-Faret est donc décidément doué pour s'entourer des gens compétents. Il faudra que je le félicite. »

Elle avait dit cela avec une certaine ironie, parce qu'elle en voulait un peu à Elandor de ne pas lui avoir dit qu'ils avaient engagé Lell, sa propre apprentie dans la Dissidence. Mais le fait qu'elle ne l'ait pas soupçonné était une bonne nouvelle, la Dissidence était douée pour garder ses secrets, et ses membres savaient rester discrets, ce qui était indispensable à son bon fonctionnement.

« Tu veux que nous en discutions quelques instants avant de revenir à la leçon ? Je crois que nous avons beaucoup de choses à nous dire toutes les deux. Dans notre métier, la confiance est important, primordiale même, alors je pense que nous devrions être honnêtes l'une envers l'autre. »
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyVen 18 Nov - 10:11

La réponse que Grand-Mère apporta à Lell au sujet de l’aide qu’elle apportait à ceux qui désiraient mourir ne satisfit pas totalement la jeune femme. Cependant, elle n’en attendait pas d’autre. Qu’aurait pu ajouter la vieille femme ? Oui, ce procédé, bien que contraire aux lois de Therdone, faisait parti de leur devoir. On abrégeait bien les souffrances d’un animal mortellement blessé, pourquoi les hommes se verraient-ils refuser pareil service ?
Enfin, ce ne serait jamais une décision facile à prendre et à appliquer. Lell se doutait qu’elle nécessiterait une longue réflexion de sa part et un jugement infaillible. Car prendre une vie, aussi petite puisse-t-elle être n’était jamais insignifiant, ni aisé.
Elle garda le silence, les yeux fixant résolument la suture qu’elle pratiquait. Elle aurait été bien en peine d’argumenter la réponse de Grand-Mère, n’ayant aucune expérience en ce domaine. Le jour où elle y serait confrontée… elle aurait quelqu’un à qui en parler.

Elle en était là de ses réflexions lorsqu’elle fit sa fabuleuse révélation. A dire vrai, elle se sentait coupable vis-à-vis de l’enseignement de Grand-Mère, aussi fut-elle surprise de sa réaction. Elle s’attendait à… à autre chose. Quoi, elle l’ignorait, mais ce n’était pas cette réaction qu’elle avait envisagé dans tous les scénarios qu’elle avait pu s’imaginer de cette scène.
Lell se sentait coupable d’utiliser les connaissances enseignées par la Chirurgienne pour blesser au lieu de guérir. Enfin, là s’arrêtait son sentiment de culpabilité. Pour le reste, elle ne regrettait rien. Ni l’infiltration dans le camp, ni le résultat de cette audace qui avait paralysé les révolutionnaires pendant quelques temps. Elle s’était engagée dans la dissidence et l’avait servie grâce à ses capacités, et de cela elle ne conservait aucun remord.

Grand-Mère était fière de son apprentie, cette dernière en restait médusée. Si elle ne levait pas les yeux de sa suture, ce n’était plus pour éviter de croiser le regard de la vieille femme, mais plutôt pour dissimuler le rouge qui lui montait aux joues. Voyant ses craintes injustifiées, elle était tout à coup soulagée d’un grand poids et recevait d’un coup les paroles de son mentor.
Cependant, il lui fallait en être certaine et profitant que Grand-Mère lui proposait d’en discuter avant de reprendre la leçon, Lell releva la tête et regarda son interlocutrice dans les yeux.

« Je pensais que… je ne sais pas, que tu serais en colère que tout ce que tu m’as appris serve à empoisonner des gens.
Je me suis engagée dans la dissidence parce que je partageais leurs idées, mais avec une question qui me taraudait et à laquelle, à ce moment là, je ne connaissais pas la réponse. Je pense la connaître aujourd’hui. »
Lell se tût un instant, espérant de tout son cœur que ce qu’elle dirait ne changerait rien à l’opinion que Grand-Mère avait d’elle.
« Tu as dit que nous devions être honnêtes l’une envers l’autre, alors voilà. Au moment où j’ai dit oui à la dissidence, je me demandais si je serais capable de faire quelque chose sachant que cela pourrait ôter la vie de quelqu’un. Je… je pense que je pourrais le faire aujourd’hui. »

Ses yeux, presque suppliant, ne quittaient pas ceux de son mentor, y cherchant une réponse qu’elle ne savait y trouver. « Penses-tu que cela soit en totale opposition avec la fonction de guérisseur ? Penses-tu que je doive arrêter ? »
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptySam 21 Jan - 21:39

Grand-Mère regarda Lell avec bienveillance. Ses questions étaient légitimes, et les réponses difficiles. La guérisseuse insistait depuis tant d’années sur l’importance de la vie, et de la bataille quotidienne qu’il fallait mener pour reculer la mort. Féliciter Lell pour sa performance avait sans doute été maladroit, elle n’aurait pas de présenter les choses de cette manière. Bien qu’aux dernières nouvelles il n’y ait pas eu mort d’homme dans le camp des Révolutionnaires, les rendre simplement malade était à l’opposé de tout ce qu’elle avait enseigné à son apprentie. Les choses étaient en fait faciles à résumer en quelques mots : d’un côté, il y avait la lutte pour la vie, de l’autre, la lutte pour un monde meilleur. Mais comment faire la part des choses, où trouver la limite ? Tout en revenait toujours là. Les limites. Où commencer, où s’arrêter, comment savoir ? Grand-Mère n’avait pas la réponse idéale à ces questions, cependant, il lui était possible d’en discuter avec la jeune femme assise près d’elle.

« Je ne suis pas en colère. Je ne pourrais pas l’être pour ce que tu as fait si on regarde les choses dans leur ensemble. Oui, tu as rendu des gens malades, mais rien de plus, quelque chose dont d’ailleurs ils risquent de vite se remettre. Tu n’as pas encore attenté à la vie de qui que ce soit. »

Comme gênée par la conversation, Grand-Mère se frotta les mains l’une contre l’autre. Non, elle n’avait jamais enlevé la vie dans un but politique, et elle serait sans doute bien incapable de le faire, mais elle comprenait qu’on en arrive là. « Je suis fière de ton engagement et de ce qu’il implique. Bien sûr, je serais tentée de dire qu’il existe toujours une autre solution, un autre moyen que d’intenter à la vie des autres. Mais je sais aussi qu’aujourd’hui nous vivons dans un monde difficile. Et tu auras des choix à faire que je n’ai jamais eu besoin de poser. Quelque soit ta décision ce jour-là, je la respecterai. » Oh oui, elle la respecterait. D’une part, parce qu’elle avait absolument confiance en sa jeune apprentie qui ne poserait jamais un tel geste sans se poser les bonnes questions avant, d’autre part parce qu’elle savait que Lan ne le lui demanderait que si c’était absolument nécessaire.

Le regard de la vieille femme se perdit dans le vide quelques instants. Cette conversation n’était pas facile, elle savait que Lell voyait en elle un mentor de premier ordre, quelqu’un à qui elle pouvait tout confier, et qui saurait trouver les réponses adéquates. Mais l’honorable chirurgienne était loin d’être un modèle de perfection. Un jour, sans doute, elle raconterait son histoire à son apprentie, mais pas aujourd’hui, pas maintenant, elle ne se sentait pas encore prête. Pour en arriver là où elle était désormais, elle était passée par beaucoup d’étapes et d’essais-erreurs dont elle n’était pas fière. « Prendre la vie n’est pas un geste anodin, quelques soient les raisons pour lesquelles tu le fais. Ce geste est-il incompatible avec ton métier ? Certains pourraient penser que oui, et je ne suis pas moi-même sûre d’avoir la réponse à cette question. Cependant... Cependant je pense que tu sauras faire la part des choses entre mettre fin aux jours de quelqu’un dans le but d’en aider d’autres ou pour le simple plaisir. » Il lui semblait que les phrases étaient confuses, que rien de ce qu’elle pourrait dire ne serait véritablement d’une grande aide, mais il fallait pourtant qu’elle le fasse. « Nous pourrions voir les choses comme cela, tuer peut être un moyen d’y arriver dans des cas extrêmes, mais en aucun cas, ce ne doit devenir une fin en soi. Je ne pourrais pas, je crois, m’y résoudre, j’ai vu bien trop de gens partir trop vite que pour me résoudre à suivre cette voie. Mais je te fais confiance, je sais que tu prendras cette décision pour de bonnes raisons. »

Et puis, il y avait Lan. Grand-Mère savait qu’il était prêt à beaucoup de choses pour parvenir à ses fins, mais ce n’était pas un homme à se réjouir d’un bain de sang et de morts par dizaines. La Dissidence était un mouvement de l’ombre, elle évitait avant toute chose de se montrer et de se révéler trop avant au public. Si Lell était amenée à tuer un jour, ce serait parce qu’il n’y aurait plus d’autre choix. La vieille femme jugea utile de l’ajouter. « J’ai confiance en toi, Lell, mais j’ai aussi confiance en l’Al-Faret. Je connais l’homme, et je sais qu’il ne te demandera pas une chose pareille s’il pourrait y arriver autrement. » Elle laissa un paisible silence s’installer quelques secondes avant de poursuivre, « Ai-je répondu à tes questions ? »
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Lell Llureyin
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyJeu 2 Fév - 13:22

« Oui… » Des réponses, elle en avait. Peut être n’était-ce pas celles qu’elle aurait voulu entendre, mais à cet instant, elle ne souhaitait pas en entendre d’autres. Il lui faudrait du temps pour y penser.
« Je pense que tu y as répondu… bien que tes réponses soulèvent d’autres questions auxquelles il va falloir que je réfléchisse. »
Lell eut un léger sourire masqué par le foulard plaqué sur son visage. L’odeur devenait insupportable et saturait l’atmosphère de la pièce, mais pour l’heure, elle était reléguée à l’arrière plan de ses pensées.
A vingt ans, elle commençait réellement à comprendre les implications de la vie d’adulte. Elle commençait à avoir des responsabilités, à prendre ses propres décisions… et à s’émanciper des différentes figures ayant pu avoir un impact sur sa vie. Son père, Grand-Mère…
C’était un chemin nécessaire, elle s’en rendait compte, mais elle devait avouer qu’il était tout de même un peu effrayant à emprunter.

« Voler de ses propres ailes est bien plus difficile que ce qui paraît au premier abord. On s’émancipe un peu, on croit acquérir un peu plus de liberté, mais on écope des responsabilités qui vont avec. L’un ne va pas sans l’autre je présume. » Elle poussa un léger soupir, et leva ses yeux vers la Chirurgienne. « Je suppose que ceux qui ne veulent pas de telles responsabilités se débrouillent pour naître dans une famille suffisamment riche pour leur épargner ce genre de… désagrément. »

« Merci Grand-Mère. »

Sans toi, je n’aurais sans doute jamais compris tout cela.
Son entrée dans la Dissidence avait aussi favorisé cette prise de conscience. Accepter la proposition de Sipik avait été l’impulsion d’une adolescente, mais choisir d’empoisonner les réserves révolutionnaires et surtout l’avouer à son mentor avait peut être été davantage une décision d’adulte.

« Si j’ai choisi d’entrer dans la Dissidence, c’est parce que je veux que la Volonté signifie à nouveau quelque chose et ne soit plus un simple concept évoqué lorsque l’on parle de Therdone pour leurrer les plus pauvres.
Je ne veux plus de cette tyrannie exercée par les Conseillers pour leur propre profit. Et je ne veux pas non plus de ces révolutionnaires qui ne veulent finalement que troquer un monarque contre un autre. Quand bien même ils se débarrasseraient des conseillers, les Olarii sont éloignés du pouvoir depuis trop longtemps pour prétendre diriger un pays tout entier. Et que dire de ces Olarils qui semblent avoir rejoint leur rang ? »
Lell s’interrompit un instant, repensant à la guérisseuse qui avait un jour poussé la porte de la boutique. A cet instant, elle avait eu l’impression d’une promesse, celle d’un échange entre deux civilisations ayant évoluées distinctement mais qui avait tant à partager.
Elle n’avait jamais revu cette Calathéa Weiss. Elle ignorait où elle se trouvait. Peut être était-elle en ce moment même dans le camp révolutionnaire ?

« Je ne comprends pas qu’ils se permettent de juger un peuple qu’ils ne connaissent pas. » Il y avait un certain ressentiment dans sa voix. Elle ne savait sans doute pas tout, mais les rumeurs en disaient suffisamment. « Plusieurs raisons m’ont menée vers la Dissidence, dont les promesses de l’Al’Faret. Tu m’as dit le connaître ? Qu’est ce qui t’as poussée à la rejoindre ? » Lell observa la vieille femme avec intérêt. Elle ne voulait pas connaître son identité – quoi que ? – mais simplement avoir l’avis de Grand-Mère.

« Est-il à la hauteur de ses promesses ? »
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Onaria Dimitres
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyLun 19 Mar - 22:55

La vieille ne fut pas tellement surprise des questions de son apprentie, et pourtant, elle hésitait sur les réponses à donner. La chirurgienne venait de parler de confiance, de ne plus se mentir, et surtout, de se livrer, et voilà qu'elle se retrouvait au pied du mur. En aucun cas, elle ne pouvait révéler à Lell qui était vraiment l'Al-Faret, même si sa jeune apprentie avait toute sa confiance. Les enjeux étaient bien trop graves, bien trop importants pour prendre le moindre risque. Comment raconter qu'elle n'avait pas rejoint la Dissidence, mais bien qu'elle avait contribué à sa création ? Le terrain était plus que glissant, et aucun mot ne pourrait être sujet à une mauvaise interprétation. Avant de poursuivre la conversation sur l'Al-Faret, elle tenait cependant à ajouter un mot sur les Olarils.

« Je comprends que tu aies du mal avec les Olarils et leurs prétentions. Therdone sait que j'en ai aussi, jamais je ne souhaiterait voir l'un des leurs pour nous diriger. Cependant, il faut garder à l'esprit que ces gens sont probablement un peu perdus, loin de chez eux, ayant perdu nombre des leurs. À peine sont-ils arrivés ici que nous les avons assaillis avec nos problèmes politiques... Ils ne connaissent pas vraiment notre situation et se laisse berner par les jeux d'influences. Sans les croire tous stupides, je pense simplement qu'ils sont déracinés et se cherchent une place parmi nous. »

Les Olarils seraient ici pour un bon bout de temps encore, voire définitivement. Il ne servait à rien de lutter sans cesse contre eux. Le plus intelligent serait de les associer à la vie des Ilédors, de leur trouver une place au sein de la ville. C'étaient de bons artisans pour la plupart, continuer à les intégrer par cette voie-là était sans doute la résolution la plus sage pour le moment. Grand-Mère respectait trop la vie humaine pour ne pas considérer que celles des Ilédors était supérieure à celle des Olarils. Ceux-ci n'avaient-ils d'ailleurs par une meilleure santé et une meilleure résistance que leurs hôtes ?

Une fois son opinion exprimée sur le sujet, Grand-Mère sut qu'il était temps d'aborder la questions délicate de l'Al-Faret. Elle décida de se montrer la plus honnête possible, tout en évitant certaines questions plus délicates. « J'ai connu l'Al-Faret avant la création de la Dissidence, nous avons longuement l'occasion de discuter. Je ne l'ai pas vraiment rejoint, vois-tu, c'est plutôt à nous deux que nous avons décidé de faire ce qui nous semblait juste. C'est comme ça que la Dissidence est née. » C'était un bien piètre résumé des choses, mais il ne recelait aucun mensonge, tout au plus quelques omissions. « Quant à savoir s'il est à la hauteur de ses promesses, je peux juste te dire que j'ai confiance en lui. Mais seul l'avenir nous dira jusqu'où il pourra nous mener. »

S'étaler sur cette histoire ne lui semblait pas une bonne idée, proposer maintenant de revenir à la leçon de chirurgie était peut-être un peu abrupt, mais Grand-Mère n'avait pas le choix. Elle espérait cependant que Lell comprendrait. Et si d'aventure son apprentie lui posait une question sur le sujet à laquelle elle pourrait répondre, elle ne le lui refuserait pas. « Si tu n'as pas d'autres questions, nous pourrions retourner à notre leçon de chirurgie, qu'en penses-tu ? »
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Lell Llureyin
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MessageSujet: Re: Première leçon   Première leçon EmptyMar 20 Mar - 9:52

Les explications de Grand-mère concernant les Olarils ne convainquirent Lell qu’à moitié. Elle voulait tout à fait admettre que leurs conditions d’arrivée dans la Cité n’avaient pas été des meilleures. Ils avaient vécu la destruction de leur pays et la traversée de la Gérax, pensant parvenir au pays de leurs dieux, pour ne finalement y trouver que des hommes. Et des hommes en guerre.
La jeune femme imaginait bien ce qu’avait dû être leur déception. Leur arrivée dans la Cité n’avait pas non plus été des plus accueillantes, marquée par l’arrestation de leur Chef. Mais était-ce une raison pour se placer en juges de leurs coutumes, de leur civilisation ?

Non, définitivement non. Lell n’acceptait pas le jugement d’un peuple que les Ilédors avaient accueillis, peut être pas de la meilleure façon qui soit, derrière leurs murs. Des murs que défendaient des Ilédors, protégeant ainsi des Olarils qui pour la plupart, traitaient avec les Olarii.
La colère enflammait peu à peu son souffle, brûlant derrière le foulard. S’ils cherchaient réellement à se trouver une place, ils visaient aussi haut que possible, ils visaient le trône et le gouvernement du pays, et cela, Grand-mère ne pouvait pas le nier.

Elle garda sa pensée pour elle et laissa sa colère se calmer pour écouter la suite. La Chirurgienne évoquait à présent l’Al’Faret, et Lell écouta de toutes ses oreilles et écarquilla les yeux. Elle entendit un résumé plutôt court, mais qui en disait long. Ainsi, elle connaissait l’homme avant même les premiers balbutiements de la dissidence… elle ne s’attendait pas du tout à cela. Devant elle se tenait l’un des créateurs du mouvement. Qui aurait pu soupçonner cela en voyant la vieille femme ? Bien sûr, elle possédait une grande Volonté, mais de là à être à l’origine de la dissidence ? Lell était abasourdie.
Quant à l’Al’Faret lui-même, elle n’en dit pas grand-chose, uniquement qu’elle avait confiance en lui. Cela suffit à son apprentie qui gardait confiance en le jugement de son mentor. Une foule de questions se bousculaient dans sa tête, mais lorsque Grand-mère lui demanda si elle voulait encore lui en poser, Lell répondit que non. « Ma curiosité a été satisfaite plus que de raison. »
C’était la vérité, et elle préférait d’abord réfléchir à tout ce qu’elle venait d’apprendre pour pouvoir formuler correctement ses questions.

Et puis, le temps passait, et plus elles restaient ici avec un cadavre déterré, acte hautement répréhensible, plus elles risquaient de se faire prendre. Il fallait que le cadavre soit réenterré avant la fin de la nuit, il était temps que la leçon reprenne.
La suture abdominale était propre et depuis longtemps terminée. « Que veux-tu me montrer d’autre ? »
La leçon reprit et la vieille femme lui montra de nombreux points qui prirent un sens nouveau par rapport aux croquis qu’elle avait étudiés. Le retour clandestin jusqu’au cimetière se passa sans encombre. La pluie n’avait pas cessée de tomber depuis la tombée de la nuit, et Lell aurait juré qu’elle avait redoublé pendant qu’elles se trouvaient dans la masure.
Mais au moins, il n’y eut pas un chat dehors, et leur besogne achevée, Lell put rentrer se débarrasser de l’odeur et repenser à tout ce qu’elle avait appris de la leçon… et des révélations.
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