Les Tables d'Olaria
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 La trahison se paie

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Sieben Raetan
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Sieben Raetan


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MessageSujet: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyLun 24 Jan - 22:19

« On a des excités des haricots ce midi, encore deux commandes pour la table huit. Faut dire qu'il y a que çà à préparer. »

Sieben tâcha d'éviter de regarder Melyor qui cossait quelques fèves dans son coin, mais l'espace était plutôt étroit et ne s'y prêtait pas vraiment. Il contourna la table, lava sommairement ses mains dans un baquet et finalement s'assit à ce même plan de travail pour faire sa part d'écossage,, ses gros doigts étant étonnamment habiles à cette tâche. Chaque fève devait faire la taille de l'ongle de son auriculaire, mais il avait un rythme soutenu assez surprenant. Lui et Melyor étaient seuls pour la première fois de la journée.

Le petit concours de lutte qui avait bien commencé et qui avait fini avec elle dans sa chambre datait déjà de bientôt cinq jours, où il avait eu une attitude mi-figue mi-raisin avec elle, devant certes assumer qu'il y avait une nouvelle femme dans son lit, mais vivant dans la honte constante que cette femme ne soit pas Elenor, il se donnait lui même l'image d'une dilettante, ou d'un bourreau des coeurs efféminé qu'il avait toujours rejeté du plus profond de lui. Il pensait être l'exact contraire de ce genre d'homme, il devait maintenant se dire qu'il en était un lui-même, et c'était plusieurs années de rigueur qui partaient en fumée. Il avait bien connu plusieurs femmes dans sa vie, il fut même un temps où elles venaient plutôt facilement, vers la fin de son adolescence, et tout son temps dans l'armée, mais jamais il n'avait trompé ses amantes. Même quand elles étaient vulgaires et relativement peu attachées à lui, qu'elles le voyaient comme un trophée. Cela dit, à cette époque là, il s'en fichait, il vivait de combats et d'eau fraîche.

Il avait des problèmes de conscience qui n'étaient pas de son âge théoriquement: à son âge, on est marié, et on s'arrache les cheveux avec l'Aîné qui a décidé de saboter sa vie, on ne vit pas dans la crainte que sa maîtresse aînée découvre la maîtresse cadette. Et il avait cédé pour la plus stupide des raisons: la frustration d'affection. Il aurait cru être plus fort que ca, au lieu de ça, il s'apercevait qu'il était un homme friable dès qu'on touchait à la tendresse et l'affection qu'il recevait quotidiennement. Sieben Raetan, ancien lutteur, aubergiste farouchement indépendant, avait besoin de son câlin du soir.

Pouah! Comme ma mère me donnait ce chat cousu en jute quand j'étais gosse

Il eut un geste un peu plus nerveux, plus maladroit que les autres. Il réussit à se faire mal en fracassant son doigt contre la table.

Et le pire c'est qu'il est au fond du coffre à vêtements en haut. 45 ans et toujours môme.

Il leva le regard, Melyor le regardait avec un air vaguement inquiet. Il n'aimait pas qu'elle s'inquiète pour lui, il aurait dû continuer à n'être rien pour elle, que rien ne se soit passé, et qu'il n'y ait pas cette relation de couple dont il ne savait plus s'il la voulait ou pas. Sentant qu'il devait répondre à l'inquiétude de cette amante-ci, il fit un sourire pauvre.

« Rien, je survivrais. Je vais plutôt vider les cosses dehors. »

Il retira la chaise, prit le panier et en deux pas alla ouvrir la porte. Il poussa un petit cri et sursauta:

Elenor était là, ce qu'il craignait le plus.
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Elenor Jagharii
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MessageSujet: Re: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyMar 25 Jan - 10:47

Souvenirs… Deux mois auparavant.
« Tu dis que tu reviendras, mais en attendant quel souvenir garderas tu de moi ? »


Dans la rue, déjà, elle sentit une bouffée de chaleur monter à ses joues. Son éternel manteau anthracite, mais le visage masqué par un foulard relevé (une mode qui, par ces temps, semblait mystérieusement prendre de l’essor…) elle se dirigeait à pas tranquille, en toute discrétion, vers le Ceste Clouté. Depuis combien de temps n’y était-elle plus allée… A peine plus de deux mois, mais cela lui semblait une éternité. Une éternité sans ses mains, sa tendresse, son amour. Elle n’avait ce jour là aucune mission particulière à effectuer… A moins qu’elle ne se soit volontairement dégagée de ses obligations pour lui.

Pour lui ? Elle s’était mise en marche presque inconsciemment, mais à présent, elle savait, et à présent son cœur battait à tout rompre en son sein. Elle n’était pas très élégante, mais elle portait des vêtements propres et s’était elle-même lavée, puis avait noués ses longs cheveux d’ébène en une interminable tresse qui pendait gracieusement sur son épaule. Peut-être s’était-elle un peu affinée, depuis la dernière fois… Elle gardait une force étonnante pour une femme, mais son corps était moins marqué qu’auparavant… Et son allure s’était grandement adoucie.

Un sourire heureux, doucement, s’étira sous l’étoffe lorsqu’elle aperçu au détour d’une rue l’encart branlant du Ceste. Du bois de bonne facture, dansant joyeusement dans la brise qui s’était levée. Comme pour l’accueillir, lui souhaiter la bienvenue… à nouveau.

« Sieben… » Sa voix s’était faite murmure. Un murmure doux, porté par l’amour.

« Sipik. Demande Sipik, et elle viendra. A chaque fois. »


Pourquoi avoir attendu deux mois avant de revenir… Il ne l’avait pas demandée. Il n’avait pas demandé Sipik… Jamais, pas une fois. Elle lui avait pourtant confié son nom, mais il avait gardé le silence. Tel qu’elle le connaissait, il avait sans doute eu peur de la compromettre. Ce devait être cela. Ils s’étaient toujours aimés ainsi, faisant fi du temps et de la distance, deux corps qui, tous capables de s’éloigner, revenaient irrémédiablement l’un à l’autre… un jour où l’autre. Depuis des années
Il n’avait jamais appelé Sipik, pas même via Eleni pourtant fiable… Mais ce n’était plus grave aujourd’hui. Les choses s’étaient tassées, et elle n’avait rien remarqué aux alentours de l’auberge. Le danger était écarté, aujourd’hui, et elle reverrait son homme.

« C’est mon combat. Moi, et moi seule. Je m’en vais. Pour leur revenir plus forte.
Leur revenir telle que j’étais avant tout ça. Je ne perdrais plus. »


De son côté, elle avait eu peur que l’établissement ne soit toujours sous la surveillance de son père. Lui qu’elle avait fui ce fameux jour, peu désireuse d’être repérée, et mariée de force. Elle ne voulait d’homme que celui à qui son corps faisait pleinement échos. Le seul auquel elle s’était jamais enracinée… le seul qui l’avait vue au plus mal. Elle s’était remise, avec l’aide précieuse de Lan, de ses faiblesses, et aujourd’hui, sans avoir récupéré la pleine possession de ses moyens, elle n’avait plus à rougir de ses capacités à l’épée, ou au poing. Sa main droite frappait fort et bien, et elle avait appris à utiliser ce qu’il restait de mobilité à sa main gauche. Frapper du plat, au bon endroit. Coude, épaule, jambes… C’était un nouvel art, plus adapté, coupé de sa férocité habituelle. Elle pouvait être fière de le retrouver aujourd’hui, plus forte, plus autonome qu’en le quittant. Plus femme, mais presque aussi redoutable qu’avant son départ de l’armée. Elle le lui avait dit, elle ne perdrait plus, et il devait le voir.

Il serait fier d’elle, peut-être, ils partageraient son bonheur retrouvé. Celui de la lutte et du combat, de la puissance d’antan… Volonté, féminité… Elle regorgeait de sentiments dévastateurs qu’elle voulait voir déferler entre eux pour un moment unique, comme seuls pouvaient en jouir Sieben et Elenor.

Comme avant, avant tout cela.

Elle était restée un moment devant la porte en bois du Ceste, effleurant avec tendresse les pièces plus récentes de bois, celles qui avaient été rajoutées là où elle s’était montrée un peu trop… enthousiaste. Mais cela aussi, c’était derrière elle. Dans la clandestinité, elle avait réappris la froideur et le calcul, et Lan l’avait empêchée de boire. Du moins, de boire comme elle le faisait lors des soirs les plus difficiles… Elle devait être discrète, et s’y était appliquée.

Ses doigts trouvèrent les reliefs de l’embrasure et s’y plantèrent, puis elle laissa un profond soupir de plaisir lui échapper. Lan l’avait accueillie avec beaucoup de bienveillance, et à présent que les choses étaient claires entre eux, leur cohabitation était agréable… Mais il n’y avait qu’ici qu’elle avait compris le sens du mot foyer. Ces soirs de solitude devant le feu, Sieben, derrière son comptoir, à astiquer… Vivre au rythme de cette bâtisse…

A son rythme à lui.

Elle était de retour.

Enfin.

Elle poussa la lourde porte, un mince sourire aux lèvres, et constata qu’il y avait du monde dans la grande salle. Le commerce de Sieben tournait bien, en dépit des restrictions et des prix élevés qui étaient actuellement ceux du marché noir. Elle était heureuse pour lui, et le chercha du regard. Wulfin s’activait en salle, elle lui fit un signe joyeux de la main, auquel il répondit faiblement. Elle lui trouva l’air inquiet, tout à coup, et fatigué, surtout… C’était étrange, elle tenterait de passer un petit moment avec le jeune homme pour en apprendre davantage, mais plus tard. Avant ça, elle devait le voir, lui. Elle monta quatre à quatre les marches de l’escalier qui menait à leur chambre, espérant l’y trouver, ouvra la porte… et se figea.

Le coffre dans lequel elle gardait ses affaires autrefois était de nouveau occupé. Elle l’ouvrit… et y trouva des robes. Des robes vulgaires, que jamais de sa vie on ne lui verrait porter de son plein gré. Jamais.
Ce n’était pas les siennes, et ce n’était pas un cadeau qu’il lui préparait.

C’était une autre femme. Une femme au parfum fort et agressif, de facture modeste, vulgaire même. L’odeur d’une putain, qui cache derrière de lourds onguents sa crasse. Le lit était défait, elle secoua doucement les draps. L’odeur de foutre lui donna la nausée, tant et si bien qu’un instant, elle se vit prendre les armes, descendre et les égorger, tous deux. Pourtant elle resta là, droite devant le lit souillé, autrefois témoin de leur amour, tremblant de tous ses membres, réprimant déjà les larmes qui menaçaient d’emplir ses yeux plissés. Du bruit dans son dos, elle se retourna d’un bloc pour voir un Wulfin qui exprimait tout entier la peine qu’une telle scène lui inspirait.

Elenor accepta l’étreinte maladroite du garçon, qui sans doute cherchait à réconforter celle qui quoi que gueularde, avait été la complice d’antan dans le dos de Sieben… Puis s’éloigna, sans rien oser dire. C’est Elenor qui, d’une voix brisée, brisa le silence :

« Où sont-ils. » Asséna-t-elle avec raideur. Il secoua la tête, ne voulait rien dire, de peur sans doute que cette histoire n’ait une conclusion sanglante, mais elle insista. « Dis-moi où ils sont, Wulfin, j’ai besoin de le savoir.
- Ma… mademoiselle Elenor, je ne crois pas que…
- S’il te plait, Wulfin. Vois, je suis calme, ça ira.
- Je…
- Je suis forte, dis-le moi. »

Il trépigna sur place, puis céda devant le calme olympien de la militaire, dont seul le regard humide et la raideur trahissaient la douleur.

Finalement, il le lui dit, dans la cuisine, avec Melyor. Alors cette putain se nommait Melyor… Lan la connaîtrait peut-être…
Le regard décidé, Elenor descendit les escaliers calmement. Devant la porte de la cuisine, elle sécha d’un revers de manche ses yeux puis approcha sa main de la porte…
Elle recula avec un sursaut lorsque celle-ci s’ouvrit, puis, sans intérêt aucun pour le cri et la surprise de Sieben, elle s’écarta de l’embrasure, le visage bas, concentrée.
Il fallait qu’elle lève les yeux, et croise le regard de la fameuse Melyor. Qu’elle voit par quoi il l’avait remplacée.

Un souffle haché par la douleur, elle releva les yeux, ignora ostensiblement Sieben, ne lui dit pas même un mot. Elle la vit, au fond, cosser des fèves et la regarder d’un ait interloqué. Décolleté plongeant, robes rongées aux mites, parfum capiteux et artificiel. Oui, c’était bien la femme qui souillait les draps qui autrefois l’abritaient. Celle qui venait lui voler son foyer. De l’épaule, elle poussa Sieben pour pénétrer dans la cuisine, et marqua une pause, à mi-chemin de la garce de son amant d’autrefois, pour la considérer avec le plus souverain mépris qu’elle n’ait jamais eu pour quiconque. Elle en avait eu moins pour Xander et ses hommes encore. Xander avait échoué, là où Melyor avait réussi. A mesure que la rage gonflait en elle, elle se redressait, poing droit crispé, le gauche agité de spasmes. D’une minute à l’autre, elle exploserait… Et personne ne bougeait plus, redoutant le moment où la Jagharii quitterait son immobilisme.

Elle craqua.

Elle se rua sur la grue avec toute la férocité dont elle était capable. Cette fille-là. Une putain, il l’avait remplacée par une vulgaire putain. Avant que quiconque n’ait eu le temps de réagir, elle la contraignit à se lever d’une poigne puissante, puis poussa de toutes ses forces, l’envoyant heurter l’une des étagères de la petite cuisine. Le coup en lui-même avait déjà du être plutôt douloureux, et elle en garderait sans doute un hématome, mais le plus douloureux fut sans doute les casseroles, marmites en fonte, bocaux et bouteilles d’alcool qui, sous le choc, basculèrent et s’écrasèrent sur elle et tout autour. Elenor en resta là, maîtrisant à grand peine sa respiration sifflante. Elle n’avait qu’une envie, lui sauter à la gorge et tordre ce cou malpropre. Elle voulait la mettre en pièce, se laisser aller à la rage et tuer celle qui prétendait lui voler Sieben…

Puis un éclair traversa son esprit… Un éclair gras et déplaisant… Sieben… Elle lui avait dit de l’appeler, elle lui avait dit qu’elle viendrait… Et il n’en avait rien fait. Il lui avait finalement préféré une truie de la pire espèce. C’était son choix. Sur ses gardes, elle se redressa et recula d’un pas ferme et sur de lui. Un coup d’œil, son épaule tendue, elle conseilla à Sieben d’un regard de ne pas la toucher, de ne pas approcher. De ne rien dire, même. Rien du tout. Pas de geste de compassion, pas de coup. Il l’avait de toute façon déjà frappée de la plus odieuse des façons. Elle était féminine, coiffée, formes délicatement mises en valeur pour son homme. Sur son visage pourtant, toute trace du bonheur qu’elle affichait en arrivant avait disparu. Il n’y avait plus rien de l’Elenor radieuse qui venait voir Sieben.

« Ne la laisse pas sortir. Ne laisse pas sortir ta putain de l’auberge. Dehors, elle ne resterait pas en vie plus d’une heure ou deux. » C’était un salut comme un autre. La menace était des plus sérieuses. Si Elenor, ou l’une de ses fréquentations actuelles, croisait cette chasseuse de dot dans les ruelles, Melyor disparaîtrait. Sur le long terme. Elle recula encore, et leva une main menaçante. Qu’il ne dise rien, qu’il ne dise rien ou elle le passerait par le fil du sabre qui battait sa cuisse gauche, et qu’elle avait retrouvé ces dernières semaines. Les yeux brillants de détresse, elle se tint sur le pas de la porte, et lâcha d’une voix étranglée : « Je… Quand je pense que je suis allée m’enterrer dans les bas quartiers parce que je ne voulais d’autre homme que toi… J’ai honte. Je me suis demandée pourquoi tu n’essayais pas de me voir, pourquoi… pourquoi tu ne m’as pas fait appeler alors que tu le pouvais… C’était stupide… A présent, je comprends mieux. J’aurais honte, à ta place. Je n’aurais jamais cru que deux misérables mois suffiraient à balayer des années de… »

Elle s’étrangla, déglutit péniblement, et releva le menton d’un air aussi digne que possible… ça, elle savait faire. S’avouer vaincue sans laisser s’exprimer son fiel, en revanche, elle ne savait pas faire. Incapable de poursuivre, de prononcer les mots qui étaient venus mourir dans sa gorge, comme leur signification mourrait dans son cœur, elle changea sensiblement de position, pour quelque chose de plus fort, et de plus stable. Son propos, lui aussi, changea.

« Je ne suis même pas jalouse de cette grue. Elle n’aura jamais l’homme qui était le mien, valeureux, fiable… Il est mort, tombé en cendres, avec ta Volonté et ton Honneur, le jour où tu leur as préféré l’idée de tremper ta queue dans la fange. »

Elle était déjà sur le pas de la porte, la dernière fois qu’elle mettrait les pieds ici, dans cette cuisine et dans cette auberge. La toute dernière fois. Après son départ, ils recommenceraient, il lui avait préféré cette fille, le constat était libre de toute ambiguïté. Autrefois, il lui avait confié qu’il craignait qu’elle ne soit obligée de le quitter pour un homme de rang supérieur, plus… à sa hauteur. Un noble, de bonne famille, qui conviendrait à ses parents. Cela n’en éclairait que plus crument la situation. Elle ne le quittait pas pour un noble, il la quittait pour une putain. Elle ne le quittait pas pour prendre de la hauteur, il la quittait pour la lie de la Cité.

C’était humiliant, au plus haut point, et pourtant, elle avait le souci d’opérer sa retraite avec le plus de dignité possible. Qu’il se souvienne d’une Elenor forte, Volontaire. Une Elenor qui l’abandonne la tête haute à la putain qu’il s’est choisi. Elle ne voulait leur laisser aucun espace, aucune occasion de répliquer, si tant est qu’ils en aient l’envie ou la possibilité. Avec le choc qu’elle venait de prendre, Melyor ne serait plus capable de tenir de propos cohérents avant longtemps, et elle espérait bien que le cœur de Sieben souffre assez pour qu’il reste muet un petit moment, lui aussi… Elle leva cependant une main pour couper court à l’éventuelle envie qu’il aurait pu avoir de répondre. Ses yeux, déjà, s’étaient emplis de larmes. Elle maîtrisa pourtant sa voix, et asséna, en conclusion : « Je ne veux pas t’entendre, je ne veux plus te voir. Plus jamais. Tu as gagné. »

Là encore, elle était sérieuse.

Elle sortie de la cuisine toujours ouverte, sous le regard estomaqué de la salle qui, soudain silencieuse, avait tout suivi avec attention. Elle réprima l’envie qu’elle avait déjà de hurler, croisa le regard de Wulfin qui descendait les escaliers d’un pas hésitant, puis secoua la tête et se précipita sur la porte du Ceste. Sous le choc, elle trembla et s’allégea de quelques pouces de bois. Ultime trace d’Elenor au cœur de la Vieille Dame. La Vieille Dame… Elle ne serait plus jamais la même, plus jamais, à présent qu’elle était hantée par la vénale Melyor.

Laissant derrière elle ses blessures à vif, le temps de rentrer, elle regagna leur petite maison, la petite cour, pour y lécher ses plaies.

Deux mois auparavant, Elenor…

« Ne crois pas que c'est facile. Le souvenir que je garderais sera aussi beau que douloureux...
Tu es… tu es un homme qui m’a sauvé la vie. Qui m’a offert l’hospitalité et qui a tenté de me protéger au péril de sa vie. »

« Tu… tu es la seule personne que j’ai jamais aimée à ce point. Ca ne s’oublie pas. »

« Pardon… »


Elle courrait, à perdre haleine. Elle avait lâché ses cheveux, les larmes échappées de ses yeux se glissant le long des interminables mèches d’ébène comme autant de perles lumineuses… Sans arrêter de courir, entre ses dents, elle glissa en guise d’adieu : « Fils de chienne… » Puis ce fut tout, la conclusion amère de l’histoire de Sieben et d’Elenor.




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MessageSujet: Re: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyDim 6 Fév - 17:50

La trahison se paie Avaf1011
~Melyor Tolriel~
Melyor faisait des efforts, des effortspour être à la hauteur, pour ne pas décevoir Sieben, pour qu’il s’attache à elle. Mais malgré les progrès, elle sentait entre elle et lui encore une distance que le sexe n’avait pas comblée. Il pensait toujours à son ex, elle en était sûre et ne pouvait rien faire contre cela. C’était rageant. Il en serait toujours ainsi ? Elle ne pourrait s’y résoudre encore longtemps, à peine cinq jours étaient passés depuis cette fameuse soirée, et l’attitude de Sieben n’avait pas évolué d’un chouilla… Elle savait qu’il avait besoin de temps, mais sa patience était mise à rude épreuve !

Son amant avait l’air préoccupé en ce moment, comment cherchant à mettre de l’ordre dans sa vie. De cet ordre, Melyor voulait faire partie. Tout en s’occupant de ses haricots, elle jetait de temps à autres des regards inquiets vers l’aubergiste, elle ne l’aimait pas, mais elle avait besoin de lui, alors elle jouait les femmes pleines de compassion et d’inquiétude. Quand il se fracassa le doigt sur la table, elle eut la confirmation de ce qu’elle pensait, il était bel et bien préoccupé, d’habitude, il avait plutôt des mains habiles, les gestes maladroits, ce n’était pas lui. Par un vague sourire, il tenta de la rassurer mais Melyor n’était pas dupe. Dans ses yeux, elle lisait la culpabilité. Culpabilité de quoi ? D’être avec elle ou de penser encore à son ex ? Elle était bien son ex après tout, non ? Alors ils ne faisaient rien de répréhensibles tous les deux. Mais elle n’eut pas le temps de se poser plus de questions, venait d’entrer dans la pièce une magnifique jeune femme. Cette simple vision fit l’effet d’une giffle à Melyor. Stupide, elle ne l’était pas, et elle comprit en un instant pourquoi Sieben était hanté par le souvenir de cette femme, jamais Melyor ne pourrait soutenir la comparaison, quand bien même elle faisait des efforts pour être plus présentable.

Avant qu’elle n’ait eu le temps de dire quoi que ce soit, la femme se rua sur elle. Melyor fut soulevée comme un fétu de paille et balancée contre le mur. Lorsque sa tête heurta l’étagère suspendue au mur, Melyor vit des centaines d’étoiles défiler devant ses yeux. Et comme si cela ne suffisait pas, dans un grand fracas métallique, des poêles et de casseroles s’écrasèrent sur elle. Melyor n’était pas d’une constitution faite pour résister à des chocs pareils, et elle sombra dans une demi-conscience. Elle ne percevait pas vraiment la douleur de son corps meurtri, elle flottait dans un nuage cotonneux, dans lequel elle ne percevait plus vraiment le monde extérieur, et certainement pas les propos de celle qui venait de lui casser la figure. Melyor était incapable de penser à quoi que ce soit…

Il lui semblait qu’elle était dans cet état depuis des heures dans elle sentit qu’on posait un linge humide sur son front. Par ce geste, elle reprit conscience de manière plus accrue du monde qui l’entourait, et par là même, de sa douleur. Son dos lui paraissait avoir été réduit en bouillie et elle avait l’impression que chaque centimètre carré de son corps avait été roué de coup. Trop fière, elle ne voulait pas verser de larme, mais cela lui demandait un effort important. Sieben semblait sincèrement désolé, mais c’était Melyor qui avait honte. Quand elle avait vu Elenor, elle avait compris combien son attitude avait été déplacée du début à la fin de cette histoire. Elle avait entraîné malgré lui Sieben dans une histoire dont il ne voulait pas vraiment, pour son bien à elle. Pas une seconde, elle n’avait réellement pensé à lui, à ce qu’il pouvait ressentir, aux difficultés qu’il devait avoir à faire confiance à nouveau à une femme. Melyor ne soutiendrait jamais la comparaison face à sa rivale, elle n’avait pas son éducation, sa prestance, sa force…

- Je suis désolée Sieben, articula-t-elle faiblement. Jamais… Je… J’aurais pas dû, c’est d’ma faute, j’l’ai mérité.

Tant bien que mal, elle essaya de se relever, la douleur qu’elle ressentit dans le dos lui donna les larmes aux yeux, mais elle resta debout. Il était temps qu’elle soit un peu plus digne, elle voulait Sieben, alors elle se hisserait à sa hauteur et ne lui demanderait pas de s’abaisser à son niveau. Jamais jusqu’à aujourd’hui, Melyor n’avait eu conscience de ce que signifiait réellement avoir un rang plus élevé, un sang plus noble. La raclée qu’elle venait de se prendre lui avait fait comprendre qu’elle ne méritait pas Sieben, parce que jamais elle ne se serait battue de la sorte pour lui. Enfin, pas jusqu’à aujourd’hui. Mais les choses allaient changer. Elle allait tout faire pour être digne de lui, pour le mériter, elle n’arriverait jamais à la cheville de sa prédécesseur, mais elle relèverait le défi.

- Elle a quand même une sacrée poigne cette gonze ! Ouch, ça fait mal !

Pour la première fois que Melyor était pétrie de bonnes intentions, elle n’en n’était que plus pathétique. S’appuyant sur la table, elle tentait vaillamment de garder bonne figure mais le succès était mitigé, il fallait être aveugle pour ne pas voir qu’elle souffrait réellement et que sa fierté en avait pris un coup.
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Sieben Raetan
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MessageSujet: Re: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyMer 16 Fév - 21:17

Sieben aurait préféré d’autres châtiments : il aurait sûrement préféré sentir le collier rêche du chanvre autour du cou, ou bien se faire précipiter dans une rivière sans espoir de respirer jamais plus. S’il avait eu le choix, il aurait choisi d’endurer la morsure vicieuse du fouet ou le baiser d’une lame. Même se faire disloquer par de puissants chevaux aurait été plus doux que de subir sans bouger le déluge de vérités brûlantes qu’avait débité Elenor. C’était comme être plongé dans un creuset de métal en fusion, et garder sa conscience intacte. En fait, Sieben ne put supporter jusqu’au bout le discours d’Elenor, il s’affaissa avant.

Il réussit tout juste à rester contre le mur tant qu’Elenor était là, mais avait perdu l’usage de sa respiration, et ses jambes, son cœur flageolaient. Là, il aurait souhaité tomber dans le coma, là il aurait souhaité fuir dans l’inconscience, mais sa lucidité ne partit pas. Il dût boire tout jusqu’à la lie, entendre nettement ce que murmurait ses pensées depuis ces derniers jours.

Il ne s’agissait pas d’entendre la vérité, et ensuite de la reconnaître. Il s’agissait d’être accablé par elle, puis être noyé dans sa propre fange, sans espoir de pitié.

Dès qu’il n’y eut plus que Melyor et lui dans la cuisine, ses genoux se plièrent enfin, et son souffle se relâcha en un « oh » pathétique. Il glissa le long du mur jusque par terre, et s’enfouit le visage dans le creux de son coude. Ce fut ainsi que Wulfin le retrouva, et il n’osa pas tout de suite le déranger. En fait, ca le gênait profondément, ne sachant quelle attitude adopter face à son patron. Décidant prudemment que la vie privée de monsieur Raetan ne concernait pas le travail, il osa pénétrer et demander tout bas où en étaient les commandes. Cela sortit Sieben de sa léthargie, il prit soin de frotter ses yeux avant de regarder Wulfin dans les yeux et de lui dire de présenter ses excuses au client pour le retard. Wulfin partit vite fait.

Sieben s'appuya sur le mur de planches pour se relever, celui ci craqua légèrement alors que la masse de l'aubergiste se remettait debout. Délaissant les dégâts matériels, il se pencha aussitôt sur Melyor, décidé à noyer son chagrin naissant dans les soins à apporter à sa maîtresse. Plein d'inquiétude, conscient de la gravité potentielle de ses blessures, Sieben mouilla un linge et à défaut, tamponna délicatement le front de Melyor, en guettant son retour à la lucidité. Avec plus de soulagement qu'il n'aurait dû avoir, il la vit revenir parmi les vivants. En la prenant avec délicatesse et fermeté, il l'installa mieux et la soigna plus avant.

Puis elle parla. Et Sieben chuchota:

« Chhhh. Paix. Ne dis rien Melyor... »

Il accorda sa totale attention aux blessures de Melyor pour se distraire des sentiments venimeux qui venaient de frapper à la porte. Cela dura un moment puis il se sentit obligé de corriger, avec une voix toujours aussi basse, mais bien audible:

« Ce n'est pas toi la fautive. Qui a dit oui, qui t'a caressé et embrassé? Qui a trahi son autre relation et toi même? Qui... »

Il ne réussit pas à finir sa phrase, il appuya un peu plus fort qu'il n'aurait dû et regretta son geste, puis il déboutonna la chemise de Melyor pour pouvoir juger des bleus dans son dos. Cette vision lui rappela à quel point il avait aimé ces nuits de tendresses amères, et la frustration qui les avaient précédés, pourquoi il en était arrivé là. A travers sa chape de culpabilité, une pensée égrillarde s'échappa fugacement: il aimait ce dos...

« Repose toi, c'est fini pour aujourd'hui. Et dors en paix, il n'y a qu'un seul rat dans cette histoire, qui a eu le tort d'abuser de deux femmes qu'il aim... » Un silence, hésitant et lourd. « à qui il n'aurait jamais voulu faire de mal. »

Alors qu'il aidait Melyor à se rhabiller, et qu'il était prêt à ouvrir la porte pour la laisser monter à l'étage, il se sentit obligé de dire penaud et n'en menant réellement pas large:

« Toi au moins, me pardonneras tu? »

Avec une moue de travers, il rassembla son courage pour poursuivre et après une grande inspiration, se lança dans un développement maladroit et peu assuré:

« Je croyais savoir ce dont j'avais besoin comme compagne. Je croyais que c'était Elle. Et je me suis accroché toute ces années à cette idée, comme quoi Elenor était tout ce dont moi j'avais besoin comme femme. Dès qu'elle et sa personnalité forte sont parties, que je ne les ai plus vus quotidiennement, j'ai eu du temps pour réfléchir à ma solitude... et pourquoi je n'étais pas marié à quarante cinq ans... je me suis demandé si finalement c'était bel et bien cela que je voulais... Si... »

Un nouveau silence gêné suivi par la reprise:

« Avant le blocus, j'ai reçu des nouvelles de mon frère où il m'annoncait que son fils aîné se fiançait. Mon neveu, le fils de mon petit frère sera père dans un couple d'années. Et moi, je suis une branche stérile de la famille. Je me suis mis à réfléchir à ca, je me suis mis à me demander à qui je lèguerai mon patrimoine. Toute une vie de travail, vendu en une matinée? Tu t'es présentée, tu étais tout d'un coup plus proche de ce qui peut être convenait à un bourgeois de quasiment cinquante ans, un homme qui avait râté sa vie privée au point de n'avoir jamais même tenté de se marier... 



Tu devrais peut être aller te reposer maintenant. »


Mais il ne réussit pas à ouvrir la porte.
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MessageSujet: Re: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyLun 7 Mar - 0:25


- Melyor Tolriel -


Melyor se sentit inexplicablement triste alors que Sieben s'occupait d'elle. Les paroles d'Elenor tournaient en boucle dans sa tête, elle se sentait triste. Sieben, de son côté, ne semblait pas en mener large non plus. La culpabilité se lisait sur ses traits, et, pour la première fois, Melyor eut envie de le serrer dans ses bras, simplement pour le rassurer et pour effacer cette peine de son visage. Aussi peu éduquée était-elle, et aussi enfui soit son coeur, le jeune femme avait cependant conscience qu'elle avait mal agi. Jamais un instant l'idée ne lui avait effleuré qu'elle pourrait réellement s'attacher à Sieben, tenir à lui. Il avait fallu pour cela qu'elle se fasse rosser par l'ancienne amante de son homme, raclée qu'elle avait probablement amplement méritée.

Sieben, face à elle, se confondait en excuses et en paroles insensées, la mine défaite. Melyor écoutait ses mots et les comprenait. Pour la première fois sans doute, il y avait une réelle communication entre eux, ténu lien qu'un rien suffirait à briser.

- Je crois, je crois Sieben qu'on est tous les deux fautifs dans cette histoire... je me suis imposée à toi, sans m'préoccuper de ton passé. J'pensais que c'était fini. J'avais tort.

Oui, elle avait eu tort, elle avait eu tort de pousser Sieben dans ses retranchements pour l'avoir rien qu'à elle, pour assurer un confort matériel qu'un autre, moins gentil, aurait pu lui offrir. Elle avait profité de lui, il lui avait accordé sa confiance, et aujourd'hui, elle se rendait compte qu'elle ne la méritait pas.

- Ne te fais pas d'mal ! Ce qui est fait est fait, t'as rien à te faire pardonner pour moi...


Mais alors qu'elle allait poursuivre, Sieben reprit la parole, lui parlant pour la première fois de son passé, de sa vie d'avant. Il semblait terriblement gêné, légèrement maladroit dans ses propos, Melyor ne le trouvait que plus touchant. Mais il ne se contenta pas de parler de ce qu'il avait vécu, il poursuivi sur son avenir, sur ses envies. Melyor eut peur de ce à quoi tout cela allait mener... Un fol espoir naquit dans son coeur alors que Sieben parla à demi mots de son envie de fonder une famille, de se marier. D'un coup, elle entrevit tous ses rêves se réaliser et ne put empêcher un sourire de fleurir sur ses lèvres.

Pourtant, aussi vite qu'il était venu, le sourire mourut sur son visage. Elle ne pouvait pas lui faire ça. Elle ne pourrait pas épouser Sieben en sachant que c'était une autre qu'il aimait. Et quelle autre ! En quelques semaines passées aux côtés de l'aubergiste, Melyor avait beaucoup appris, en constatant notamment combien elle était éloignée de ce monde de bourgeois aisés. Malgré toutes ses tentatives, jamais personne n'avait pu oublier son milieu d'origine. Sieben, poliment, voulut la congédier, en l'invitant à aller se reposer, mais la porte resta close. Melyor, dans toute sa naïveté y vit là un signe de la Volonté de Therdone.

- Un jour, qui sait, Sieben, elle reviendra. Elle reviendra et te donnera les enfants qu'tu mérites. Je ne veux pas me mettre entre toi et elle... Ce s'rait pas bien. J'aurais pu t'aimer tu sais, j'en suis sûre. Tu es un homme bien, n'en doute jamais.

Melyor était très confuse dans ses propos, sans doute parce que le choc qu'elle avait reçu l'avait plus sonnée que ce qu'elle croyait. Alors même qu'elle était en train de se rendre compte qu'elle était plus que simplement intéressée par la fortune de Sieben, elle prenait conscience que ces sentiments l'empêchaient de se jouer de lui et de le manipuler pour parvenir à ses fins.

- Chui, désolée... Vraiment...

Melyor ne fit pas un mouvement vers la porte, attendant la réaction de Sieben.
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MessageSujet: Re: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyLun 11 Avr - 20:04

« Reste. »

Il avait perdu Elenor, il avait perdu ce qui le rendait supérieur aux autres hommes. Il avait perdu son orgueil. Si on remettait dans le contexte, il n'était qu'un homme, qui avait trompé son amante, et qui s'apprêtait à jeter la femme avec qui il l'avait trompée. S'accrocher à son code de l'honneur pourquoi pas, mais au nom de quoi? Etait il noble, avait il des terres un titre et des héritiers?

Il n'était qu'un aubergiste d'Edor Adei, égaré dans la masse, et personne ne l'avait jamais distingué pour s'être imposé plus de contraintes qu'un autre. Son commerce était prospère, mais parce qu'il était honnête en affaire, et doué en gestion, et non parce qu'il était amoureux ou en couple avec une noble de sang. Il s'était pris pour plus haut qu'il n'était et au final, l'amour ne remportait pas toutes les victoires: lui et Elenor étaient trop éloignés, les Nobles avaient gagné.

Il n'était qu'un aubergiste d'Edor Adei, égaré dans la masse, et il ne pouvait prétendre à mieux que ce qu'il avait. Dans une société aussi fermée qu'était devenue celle des Ilédors, on naissait et demeurait tel qu'on était: un bourgeois entrepreneur restait un bourgeois entrepreneur jusqu'à la fin. Aucun mariage n'était envisageable pour tirer vers le haut, aucun travail n'était à la hauteur d'une évolution.

Il n'était qu'un aubergiste d'Edor Adei, égaré dans la masse, qu'il y reste. Qu'il se fonde donc dans la foule, qu'il prenne donc femme et enfant et qu'on oublie son nom. Les belles histoires ne font jamais apparaître les taverniers, ils font partie d'un autre folklore. Il n'était ni plus beau, ni plus intelligent ni plus honorable. Il n'était qu'un aubergiste d'Edor Adei.

« Je n'attendrai pas Elenor. Il existe dans son univers des erreurs impardonnables, et j'ai fait l'une d'elles. Elle ne me pardonnera pas, elle ne reviendra pas. »

Ses lèvres continuèrent de balbutier en silence « reviendra pas » un petit moment, trouvant dans ces mots un écho douloureux qui le distrayait de son discours.

« Il... reste une place. Si j'ai fini par coucher avec toi, c'est certainement parce qu'au fond je t'aimais bien. C'est parce qu'au fond je t'aimais bien. »

S'il avait voulu la faire fuir, il n'aurait pas pu faire mieux. En tout cas, toute femme mieux éduquée que Melyor aurait fui.

« Tous les projets non bâtis avec Elenor... je peux te les offrir aujourd'hui. Je ne supporterai pas d'être seul un court instant. »

Mariage, enfants, héritage et patrimoine... Tous ces détails encombrants dans la vie commune entre Sieben et Elenor. Tous ces détails qui pouvaient intéresser Melyor. Sieben n'avait pas proposé une grande et belle histoire d'amour, il avait proposé un mariage tout ce qu'il y avait de matériel, avec assez d'affection et d'attachement pour que l'Humble vive avec le Bourgeois. Curieusement, c'était la seule évolution sociale permise.

« Epouse moi, supporte moi, donne moi une famille. Je te promets d'être un meilleur époux et père que je n'ai été comme compagnon. M'acceptes tu Melyor? »
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MessageSujet: Re: La trahison se paie   La trahison se paie EmptyJeu 12 Mai - 15:00


- Melyor Tolriel -
Melyor tombait des nues. Alors qu'elle pensait que son histoire avec Sieben venait de prendre fin, voilà qu'il lui demandait de l'épouser. Son coup à la tête devait vraiment l'avoir sonnée pour qu'elle entende ça, ce n'était pas possible, Sieben ne pouvait pas la faire passer avant une femme telle qu'Elenor. Mais dans sa tête, une petite voix lui disait : « C'est la chance de ta vie, saisis-là, il ne te le proposera pas une seconde fois. » Alors même que tous ses rêves devenaient enfin réalité, Melyor éprouvait des remords, pour la première fois de sa vie, elle comprenait qu'elle faisait quelque chose de mal. Mais étrangement, cela ne la faisait pas renoncer pour autant. Elle avait travaillé toute sa vie pour en arriver là, Therdone en était témoin, alors il n'était pas temps d'abandonner. C'était son moment de gloire, il fallait qu'elle en profite. Un peu de modestie cependant ne serait pas malvenue, elle respectait réellement Sieben et ce qu'il était.

- Cette proposition m'étonne Sieben, je pensais qu'tu voudrais rompre après ce qui vient de se passer. J'suis pas comme elle, pas aussi belle, pas aussi noble. Elle est bien mieux que moi, t'es sûr que c'est bien de moi qu'tu veux ?

Elenor avait infiniment plus de raisons de plaire à Sieben que cette pauvre Melyor, mais qui sait ce qui pouvait se passer dans la tête de l'aubergiste. Le choix qu'il venait de faire était absurde pour une personne extérieure, et pourtant, il semblait savoir ce qu'il voulait. Il semblait déterminé, alors Melyor se dit qu'elle pouvait accepter après sa petite diatribe sur sa condition modeste.

- Si t'es sûr de ton choix Sieben, sûr que tu n'le regretteras pas, que tu la regretteras pas, alors j'accepte ta proposition. Je s'rais heureuse de t'épouser. Je s'rais heureuse de donner le fils que tu attends tellement, et tous les autres enfants que tu voudras. Je pense que nous allons être heureux ensemble.

Et c'était sincère. Sieben avait tout pour la rendre heureuse, de l'argent, un physique avantageux, elle savait qu'elle ne tarderait pas à tomber réellement amoureuse de lui. Quelque part, elle était dans son bon droit d'accepter cette proposition. Il fallait juste qu'elle se cache d'Elenor jusqu'à la fin de ses jours, ce n'était pas vraiment un soucis, étant donné que l'autre vivait dans la clandestinité d'après ce qu'elle avait compris.

- Je f'rai tout pour te plaire, pour qu't'aies pas à te plaindre de moi, jamais ! Plutôt crever que de te faire du mal.

Et elle était vraiment pleine de bonne volonté la jeune femme, l'affection qu'elle éprouvait pour Sieben était réelle, et même si ce n'était pas encore de l'amour à proprement parler, Melyor n'avait aucune envie de mal faire, de faire du mal à Sieben. Il était celui qui l'avait sortie de sa misère crasseuse, d'une vie sans avenir, et même si elle avait tout fait pour bien faire, il aurait pu la jeter, il ne l'avait jamais fait. Sieben était un homme respectable selon les critères de Melyor, et s'ils n'étaient pas ceux du commun des mortels, peu importe. Ils seraient heureux, elle se le jurait. Elle lui donnerait les enfants qu'il voulait, et il lui offrirait le confort dont elle avait tant rêvé toute sa vie. Une situation stable, un mari, des gosses, voilà qui s'annonçait une vie bien meilleure.

Timidement, elle se redressa et alla poser un baiser sur les lèvres de Sieben, comme pour sceller leur pacte et leur avenir. Melyor et Sieben, ça sonne plutôt bien, non ? Sur le visage de Melyor, un sourire ravi s'installa, peut-être le premier sourire sincère de sa vie.
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